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    Civilisation Inca

    Machu Picchu. Tiahuanaco et les Mystères des Cités incas

    À l’arrivée des conquistadors espagnols au 16e siècle, l’Empire Inca s’étendait le long de la côte pacifique et de la cordillère andine, de la frontière nord de l’actuel Équateur jusque dans le Chili central, englobant l’ensemble du Pérou et la quasi-totalité de la Bolivie.

    Les différentes parties de ce vaste empire étaient reliées entre elles par un réseau de routes. Les forces espagnoles surent d’ailleurs tirer profit de ces routes pour avancer jusqu’au cœur de l’Empire inca.

    Extermination et destructions ont malheureusement fait perdre à jamais à l’humanité une grande partie des richesses de cette civilisation. Les sites archéologiques qui sont parvenus jusqu’à nous restent pour la plupart des énigmes.
    Machu Picchu ou Tiahuanaco nous transmettent un savoir et nous délivrent des messages importants pour l’avenir de l’humanité.
    Je suis intimement persuadée que les légendes ne sont pas le fruit de l’imagination de quelques peuplades primitives. Héritage oral pour la plupart, elles sont là pour nous rappeler que, malgré toute notre technique sophistiquée, il nous reste le plus important à apprendre.
    Saurons-nous les déchiffrer à temps ?

     

    Machu Picchu : la cité perdue des Incas

    Machu Picchu, en Bolivie, n’a jamais été découvert par les conquistadors et les missionnaires espagnols. Elle a ainsi pu échapper aux pillages.

     

    Machu Picchu

    Vue d'ensemble de Machu Picchu. By robennals

     

    Ce n’est qu’en 1911 que Hiram Bingham, jeune explorateur américain, découvrit cette cité.

    De tous les grands sites archéologiques qui témoignent de la puissance de l’empire Inca, le plus surprenant est Machu Picchu.
    Cette cité se dresse à un endroit presque inaccessible. Elle demeure une énigme et on ne sait toujours pas à quand remonte sa construction.

     

    Machu Picchu

    Murs et maisons qui relient les différents niveaux des terrasses. By Amy Allcock

     

    Les ruines se situent à 2 800 m d’altitude, entre deux pics andins appelés Huayna Picchu (jeune pic) et Machu Picchu (vieux pic).

    C’est un lieu d’une beauté inouïe et unique dans le monde.

     

    Machu Picchu

    "Secteur agricole" situé en dehors de la cité. By Carnaval King 08

     

    Quand a été bâti Machu Picchu ?

    Les archéologues traditionalistes s’accordent à dire que la construction ne peut remonter avant le début du 15e siècle.
    Mais d’autres archéologues ont contesté cette hypothèse.

     

    Machu Picchu

    Machu Picchu est un lieu unique. By 00dann

     

    Rolf Müller, professeur d’astronomie, qui a étudié le site a affirmé dans les années trente que les vestiges comportaient des alignements astronomiques significatifs.
    En appliquant des calculs complexes, il en arriva à la conclusion que la cité avait été construite entre 4 000 et 2 000 avant notre ère.

     

    Observatoire. Machu Picchu

    Construction circulaire qui serait un observatoire astronomique. By auntjojo

     

    Bien évidemment, cette théorie est considérée comme une hérésie. En effet, cela voudrait dire que Machu Picchu est plus ancienne que la pyramide de Kheops.

     

    Le lac Titicaca

    La Paz, capitale de la Bolivie, est nichée au creux d’un cirque situé à plus de 3 000 m au dessus du niveau de la mer.
    Le lac Titicaca se situe aujourd’hui à près de 4 000 m au dessus du niveau de la mer.
    Les alentours du lac sont jonchés de coquillages fossilisés.
    Bien que vivant à plusieurs centaines de kilomètres de l’océan Pacifique, les poissons et crustacés du lac appartiennent en majorité à des espèces océaniques.

     

    Lac Titicaca

    Lac Titicaca . By Julia Manzerova

     

    Sa faune marine démontre que le lac était autrefois plus salé. En fait, il est évident que les eaux étaient marines.
    Donc, à une certaine époque, l’ensemble de l’Altiplano a été soulevé. Les eaux marines ainsi que sa faune se sont retrouvées emprisonnées dans les Andes.

    Cette précision géologique est importante pour comprendre les contradictions manifestes entre ce que nous livrent les sédiments et les roches et la théorie officielle sur la construction de Tiahuanaco.

     

    Lac Titicaca

    Lac Titicaca . By quinet

     

    A moins de 20 km du lac et plus de 30 m au dessus des côtes actuelles, se dressent les vestiges monumentaux de Tiahuanaco.

     

    Tiahuanaco : la cité du mystère

    Dès le 16e siècle, les conquistadors entendirent parler de légendes entourant cette cité. Ils y découvrirent des ruines abandonnées depuis déjà longtemps.
    Depuis, plusieurs chercheurs entreprirent des études archéologiques pour dater l’origine de la cité.

    Arthur Posnanski conclut que les origines de cette cité remonteraient à plus de 10 000 ans. Les archéologues plus orthodoxes exprimèrent leur désaccord et avancèrent comme date la plus ancienne 100 ans avant notre ère.

    Nous allons essayer de mettre en avant les preuves qui permettent de dater cette cité.

     

    Tiahuanaco

    Monolithes dressés au centre de l'enceinte du temple. By So_P

     

    Le point le plus déroutant est que la cité avait autrefois un port, les vestiges sont là pour en attester. Ce port était situé sur le rivage du lac Titicaca.

    Donc ces vestiges que nul ne peut nier posent le problème suivant :

    Les grandes transformations géologiques s’effectuent sur de très longues périodes. L’ensemble de l’Altiplano a été soulevé, sans doute à l’occasion des bouleversements géologiques qui présidèrent à la formation de l’Amérique du Sud.

    Il est prouvé que Tiahuanaco était autrefois au bord du lac. Partant de ce fait, soit depuis sa construction, le niveau du lac a considérablement baissé ; soit, le terrain sur lequel se situe la cité s’est surélevé.

    Le problème c’est que le soulèvement de l’Altiplano s’est produit avant l’apparition de l’homme.

     

    El Fraile. Tiahuanaco

    Le Fraile, une des sculptures les plus importantes de Tiahuanaco. On ignore le rôle et l'identité de ce personnage. By So_P

     

    Alors quand Tiahuanaco a-t-il été construit ?

    Le Professeur A.Posnansky a consacré 50 ans à étudier la cité. Il a livré ses conclusions dans un ouvrage intitulé Tiahuanacu : The Cradle of American Man.

    Il y expose ses calculs archéo-astronomiques qui ont été corroborés par plusieurs savants dont le Docteur Hans Ludendorff (Directeur de l’observatoire astronomique de Postdam à l’époque), plusieurs astronomes et astrophysiciens.

    Sa conclusion est la suivante :

    Les alignements solaires des diverses structures ont été déterminés en fonction d’observations des cieux.
    Les astronomes confirment que cette observation est largement antérieure à 500 avant notre ère.
    La date de – 15 000 ans avancée par Posnansky est beaucoup plus vraisemblable.

    Tiahuanaco a donc été édifié bien avant l’aube des temps préhistoriques.

    Des espèces disparues

    Le monument le plus spectaculaire de Tiahuanaco est sans conteste la Porte du soleil. Pesant 10 tonnes, elle est célèbre pour les frises de son linteau.

     

    Porte du Soleil de Tiahuanaco

    La porte du soleil. La frise du grand linteau représente des personnages ailés, dominés au centre par le dieu aux Sceptres, baptisé Viracocha. By So_P

     

    On peut distinguer sur la base de cette frise une tête d’éléphant. Le dessin est inattendu car les proboscidiens ont disparu d’Amérique du Sud à la fin du Pléistocène c’est-à-dire il y a 10 000 ans.

     

    Tete d'elephant à Tiahuanaco

    © A.Posnansky . Tiahuanacu : The Cradle of American Man

     

    Une autre espèce identifiée qui apparaît est le Toxodon, un mammifère amphibien qui a prospéré en Amérique du Sud à la fin du Pliocène (1,6 million d’années) et s’est éteint à la fin du Pléistocène (vers – 12 000 ans).
    On trouve pas moins de 46 têtes de toxodontes ciselées dans la frise.

     

    Tiahuanaco

    Les narines proéminentes de cette représentation sont celles d'un animal semi-aquatique. © A.Posnansky . Tiahuanacu : The Cradle of American Man

     

    L’animal apparaît également sur des poteries.

    D’autres représentations d’espèces disparues ont été découvertes sur le site : le Shelidoterium et le Macrauchenia.

    Le Macrauchenia était un ongulé sud-américain qui a disparu il y a 10 000 ans.

     

    Macrauchenia

    Macrauchenia. "Sur la Terre des Monstres Disparus". © BBC 1996.2002

     

    Il est à noter que la fin du Pléistocène a marqué une extinction de nombreuses espèces à travers le monde.
    En effet, à la fin de cette période, tous les animaux porteurs de trompe, les éléphantidés, les félins aux dents de sabre, les chalicothères et bien d ‘autres espèces sur tous les continents se sont éteints.

    Pourtant, les représentations sont bien là et par définition, on ne peut dessiner ou sculpter que ce que l’on connaît.
    Ces animaux ont bien été représentés d’après nature.

    Cela confirme sans aucun doute quoiqu’en disent les archéologues « traditionalistes » que Tiahuanaco a bien été construit avant la fin du Pléistocène.

    Un site inachevé

    Tiahuanaco n’a jamais été achevé. Les travaux et représentations ont été arrêtés comme si la civilisation qui avait érigé ces bâtiments s’était brusquement éteinte.

    Il semble probable qu’un évènement brutal soit survenu. Un cataclysme semble avoir frappé la cité au onzième millénaire avant notre ère.

     

    Tiahuanaco

    Statue mesurant 2,8 mètres de haut, appelée monolithe Ponce. By Theodore Scott

     

    La découverte d’une flore lacustre mêlée à des ossements humains tendrait à prouver qu’il s’agit d’une inondation.

    Une chose est sure et les géologues le confirment, des tremblements de terre ont ravagé la région. Ils eurent pour conséquence de faire monter le niveau des eaux.
    Le climat devint beaucoup plus froid.

    Ce qui est encore plus surprenant c’est que la population n’a pas quitté Tiahuanaco immédiatement. En effet, on a retrouvé des preuves d’expériences agricoles sophistiquées.
    Ces expériences semblaient avoir pour objectif de compenser la détérioration du climat.
    Notamment, des analyses chimiques de plantes ont été effectuées.
    Mais par qui ? A une époque où nos ancêtres vivaient encore dans des grottes.

    Selon des articles parus dans le magazine Nature, la dernière inversion géomagnétique a eu lieu il y a 12 400 ans.
    Cette date coïncide étrangement avec la disparition de la civilisation de Tiahuanico et de nombreuses espèces animales sur Terre.
    A quand la prochaine catastrophe planétaire ? La réponse est peut-être dans l’alignement des structures.
    Nous ne le saurons sans doute jamais, de même que cette civilisation restera probablement une légende aux yeux de la communauté scientifique traditionaliste.

    V.Battaglia (02.2005)

     

    Références principales et crédit photographique

    A.Posnansky. Tiahuanacu : The Cradle of American Man. J.J. Agustin 1945
    Splendeurs des civilisations perdues. Les plus beaux sites archéologiques. Gründ 1998
    Les sites archéologiques : Le patrimoine mondial de l'UNESCO. Gründ 2004
    Biographie de A.Posnansky. Wikipedia

    Toutes les photos, sauf mention contraire, étaient sous Attribution - Partage dans les Mêmes Conditions 3.0 non transposé au moment de la mise en ligne de ce dossier et proviennent du site FlickR

     

    Archéologie:

     

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    Chichén Itzá

    Mexique

     

    Dans le Yucatán, au Mexique, on peut admirer Chichén Itzá, une remarquable cité maya. Cette ancienne métropole est située entre Mérida et Cancan. Bien que le peuple Maya soit le plus connu, plusieurs peuples ont occupé ce site entre les IVe et Xe siècles.
    À la fin du Xe siècle, Chichén Itzá est occupée par les Itzás, un peuple proche des Toltèques qui donne son nom à la ville et la rebâtit.
    Chichén Itzá signifie en yucatèque « cénote des bas » ou plus communément « Bord du puits des Itzás ».
    Rituels et sacrifices se sont déroulés sur ce site pendant plusieurs siècles.

      

    Quetzalcóatl : Le Serpent à plumes

    Les Toltèques et les Aztèques l’appelaient Quetzalcóatl, les Mayas, Kukulcán. Le « serpent avec les plumes de l’oiseau quetzal » (traduction littérale du nom) était le protecteur des prêtres et des souverains, le maître de la sagesse et des vents.

     

    Quetzalcóatl

    Sculpture représentant le Serpent à plumes. By M I L I N T O C

     

    Dans le panthéon maya, peuplé de divinités sanguinaires, Quetzalcóatl- Kukulcán n’exigeait des fidèles que des sacrifices de serpents, d’oiseaux et de papillons.

    Pourtant, on sait que de nombreux sacrifices humains se sont déroulés en l’honneur de ce dieu.

    Le quetzal est un oiseau d’une très grande beauté. À l’époque des Mayas, tuer un quetzal était passible de la peine de mort.

     

    Quetzal

    Quetzal à Teotihuacan. By kudumomo

     

    Les plumes de l’oiseau étaient si précieuses qu’elles étaient utilisées comme monnaie. Les conquistadors et leurs descendants ont tué par milliers ce magnifique oiseau jusqu’en 1895, année de l’interdiction.

     

    Quetzal

    Quetzal. By toryporter

     

    Aujourd’hui, le quetzal vit en populations réduites dans quelques parcs protégés.

     

    La découverte de Chichén Itzá

    Selon une légende, le dieu-roi toltèque Quetzalcóatl conquit la plus florissante ville maya du Yucatán au IVe siècle.

    Au XVIe siècle, l'évêque espagnol, Diego de Landa, chargé de christianiser les Mayas du Yucatán, apprit que des fidèles accomplissaient régulièrement des pèlerinages en un lieu sacré. Il découvrit alors que tout près des ruines d'une ancienne ville, se trouvait un grand puits naturel vénéré depuis toujours par les indigènes.

     

    Cenote de Chichen Itza

    Puits sacré appelé cénote. By Ramonbaile

     

    Diego de Landa raconte dans La Relacion de las cosas de Yucatán que des hommes et des femmes sont jetés vivants dans les eaux troubles et profondes d'un puits que les Espagnols appellent « cénote », une hispanisation du mot maya dzonot.

    Peu à peu, il apprit qu'il s'agissait en fait de sacrifices humains pratiqués dans le cadre d'un très ancien culte de l'eau et de la fertilité. Quant aux vestiges près du puits, c'était ceux d'une des plus belles cités mayas : Chichén Itzá.

     

    El Castillo de Chichen Itza

    El Castillo. By Jimg944

     

    John Stephens et Frederick Catherwood s'y rendirent en 1814 pour y entreprendre les premières recherches archéologiques. Celles-ci seront poursuivies par des spécialistes nord-américains et en 1900, par le célèbre archéologue Edward Thompson, qui descendit dans le fameux puits sacré.

    Les nombreuses campagnes de fouilles ont permis de libérer de splendides édifices de l'emprise de la jungle.

     

    L’histoire de Chichén Itzá

    Chichén Itzá a été érigée sur un site occupé dès le IVe siècle de notre ère. La ville connut son apogée grâce à une tribu qui venait du sud.
    Les constructions en style puuc « colline » remontent à cette époque. Ce sont des constructions basses, arborant des mosaïques de petites pierres aux motifs géométriques.

     

    Chichen Itza

    Gros plan sur le mur des crânes. By theilr

     

    À la fin du Classique (800-950 après J.-C.), alors que les villes mayas des Basses Terres avaient commencé à péricliter et à perdre leurs habitants, une tribu, les Itzas, fonda un petit centre dont la vie dépendait essentiellement du culte du cénote Sacré (puits sacré).

     

    Jaguar à Chichen Itza

    Le jaguar est très présent à Chichén Itzá. By Jimg 944

     

    Les sources archéologiques et historiques attestent ensuite l'arrivée à Chichén Itzá d'une nouvelle ethnie, les Toltèques, vers la fin du Xe siècle. Ces derniers venaient de Tula, laquelle avait été pendant plusieurs siècles la capitale du plateau mexicain après la chute de Teotihuacàn.

    Des documents historiques d'origine toltèque nous apprennent que vers 987, une grande partie de la population la quitta sous le commandement de son roi Ce Acatl Topiltzin qui, destitué par son frère maudit Tezcatlipoca, avait entrepris un long périple dans les territoires mexicains pour échouer finalement au Yucatan.

     

    Tete de serpent de Chichen Itza

    D'énormes têtes de serpents sont présentes sur l'ensemble du site. By Flem007_uk

     

    Le souverain et ses sujets s'installèrent à Chichén Itzá, où ils fondèrent leur nouvelle capitale qu'ils embellirent de monuments grandioses. Les sources et la tradition historiques assimilent Ce Acatl Tolpitzin et Quetzalcóatl, le Serpent à plumes dont le culte et l'iconographie imprègnent tous les monuments du site.

     

    Chichen Itza

    Cet édifice était un pavillon où l'élite se retrouvait pour le jeu de balle. By Jimg944

     

    Les Mayas yucatèques vénérèrent cette divinité toltèque qui supplanta les divers cultes des ancêtres sous le nom de Kukulcán.

    Vers 1000 après J.-C., Chichén Itzá se transforme en un grand centre urbain dont les innombrables monuments reflètent la fusion entre la culture maya de la fin du Classique et celle des Toltèques.

     

    Chichen Itza

    Bas-relief. Guerrier décapité. By Alaskan Dude

     

    L'art de Chichén Itzá porte l'empreinte d'une classe dirigeante beaucoup plus militarisée que celle des villes qui se sont épanouies dans les Basses Terres aux siècles précédents. Tout comme à Tula, on perçoit nettement la présence d'une véritable idéologie guerrière.

    Chichén Itzá a été abandonnée par la population vers 1400 pour des raisons inconnues.

     

    Jeu de la balle

    Au nord-ouest du centre cérémoniel se trouve le terrain du jeu de balle. C'est actuellement le plus grand de Méso-Amérique avec une superficie de 7 000 m². Il est dominé à l’est par le temple des Jaguars.

    Le terrain se composait, en règle générale, de deux constructions rectangulaires parallèles, entre lesquelles se déroulait le jeu de la balle.

    On connaît mal les règles de ce jeu et on ne sait toujours pas de façon certaine si l’on sacrifiait en fin de partie les perdants ou le capitaine de l’équipe perdante.
    Ce jeu revêtait une grande importance, symbolique et religieuse, chez les Mayas. Les adversaires représentaient les forces cosmiques, par exemple le Soleil contre la Lune, ou, parfois, les dieux des Enfers contre les dieux célestes.

     

    Jeu de balle de Chichen Itza

    Vue panoramique sur le jeu de balle. By Paul Mannix

     

    Deux équipes s'affrontaient, occupant chacune une moitié de terrain. Du fond du terrain, un joueur frappait de la main la balle, qui devait arriver, après n'avoir fait qu'un seul rebond, sur le mur du terrain adverse.

    Les murs latéraux étaient jalonnés d'anneaux en pierre. Le joueur qui parvenait à faire passer la balle dans l'anneau obtenait un point exceptionnel pour son équipe.

    On pratiquait également ce jeu pour que les dieux se multiplient et que le cosmos continue d'exister.
    Durant les cérémonies du jeu, on se livrait parfois à des sacrifices humains et, à cette occasion, les victimes (souvent des prisonniers de guerre) étaient décapitées. La tête symbolisait l'astre, représenté par une balle en caoutchouc sur le terrain.

     

    Anneau du jeu de balle de Chichen Itza

    Anneau du jeu de balle. By Bill Hails

     

    Certaines représentations prouvent que des sacrifices se déroulaient en fin de match. L’un des bas-reliefs qui orne le mur du jeu de balle représente la décapitation d’un joueur devant ses camarades.
    Les bas-reliefs des murs du terrain illustrent avec précision la terreur des joueurs.

    Cela peut sembler sanguinaire, mais dans le Popol Vuh, texte religieux qui se rapporte à la création du monde, les dieux-héros affrontent les démons dans le jeu de balle.
    Ce n’était donc pas une simple compétition entre deux équipes, mais bel et bien l’avenir de tout un peuple qui était symboliquement en jeu.

     

    Le mur des crânes

    Appelé également mur des Crânes, le tzompantli est peut-être le monument le plus macabre de Chichén ltzà.

     

    Mur des cranes de Chichen Itza

    Mur des crânes. By Jimg944

     

    Il reflète une société complètement obsédée par les sacrifices humains. Il s'agit d'une plateforme rectangulaire en pierre dont les côtés sont tapissés d'une frise continue de bas-reliefs figurant des crânes embrochés.

    C'est une réplique du tzompantli d'origine qui était en fait une sorte de râtelier en bois sur lequel on enfilait les crânes des victimes décapitées. On pense que ces dernières étaient des prisonniers de guerre ou bien des membres de l'équipe perdante au jeu de balle.

     

    Mur des cranes de Chichen Itza

    Détail du mur des crânes. By Star 5112

     

    La présence de tels objets a été attestée à Tula bien sûr, mais aussi à Tenochtitlàn, la capitale des Aztèques dont certaines coutumes étaient d'origine toltèque.

    Le Castillo

    Cette pyramide est le plus grand et le plus emblématique monument de Chichén Itzá. Elle est surmontée du temple de Kukulcán, le Serpent à plumes

    Devant ce monument, trône un Chac-Mool, divinité couchée, qui tient dans ses mains un plateau. Il servait de dalle d’autel lors des sacrifices.

     

    El Castillo de Chichen Itza

    El Castillo. By kyle simourd

     

    Quand les Espagnols débarquent en 1514 et y installent leurs canons, qui, du sommet de la tour, dominent tous les environs, ils le baptisent El Castillo (le Château).

    La pyramide de 30 m de haut se décline sur neuf étages. Des escaliers, au total 365 marches (une pour chaque jour du calendrier), grimpent sur ses quatre côtés jusqu'au temple.

    C'est de là que, aux équinoxes (en général le 21 mars et le 23 septembre), se manifeste toute la beauté de la construction. Ces jours-là, les arêtes des neuf niveaux de la pyramide créent un jeu d'ombres sur l'escalier, qui semble se transformer en corps de serpent, ondoyant vers le bas, vers la base de la pyramide, où deux grandes têtes de serpent sculptées dans la pierre, la gueule ouverte, complètent cette vision magique du reptile couvert de plumes descendant de son temple.

     

    Tetes de serpent de Chichen Itza

    Têtes de serpent sculptées dans la pierre. By Jimg944

     

    Une large voie cérémonielle, sacbeob en langue maya, relie l'esplanade dominée par l'immense Castillo au cénote sacré, le grand puits d'origine karstique dans lequel on jetait les victimes sacrifiées à Chac, dieu de la Pluie et de la Fertilité.

    Le Caracol ou l’observatoire

    Appelée Caracol « escargot » par les Espagnols, cette étrange bâtisse est une tour cylindrique, coiffée à l'origine d'une fausse voûte érigée sur deux plates-formes superposées. À l'intérieur, une sorte d'escalier en colimaçon, d'où le nom choisi par les conquistadores, conduit à une chambre dont les fenêtres étaient orientées de façon à permettre l'observation des astres et de certains phénomènes comme les solstices et les équinoxes.

     

    Observatoire de Chichen Itza

    Caracol ou observatoire. By Jimg944

     

    Cet observatoire est une nouvelle preuve de l’ingéniosité humaine. Il est vraiment navrant que les Espagnols venus du Vieux Continent se soient acharnés sur ce qui restait de la culture raffinée des Mayas et que, pour justifier un tel gâchis, ils n'aient rien trouvé de mieux à faire que qualifier les indigènes de « sauvages barbares ».

     

    Caracol de Chichen Itza

    Caracol. By J Barcena

     

    En brûlant leurs palais et textes sacrés, ils ont anéanti un extraordinaire patrimoine de connaissances scientifiques et astronomiques, des notions qui n'ont pu être dépassées qu'à l'époque moderne. Nous ne saurons jamais jusqu'où l'Homme serait arrivé si l'intolérance n'avait pas, comme toujours, prévalu.

    Le temple des Jaguars

    L’un des plus célèbres monuments de Chichén Itzá est le temple des Jaguars. Ce sanctuaire religieux est orné de têtes de jaguars et de serpents.

    À l’intérieur du temple, on peut admirer un jaguar sculpté dans la pierre d’où se détachent des applications de jade.

     

    Temple du jaguar de Chichen Itza

    Jaguar en pierre dans le temple. By Paul Mannix

     

    Le jaguar est présent partout à Chichén Itzá. Ce symbole de la classe guerrière toltèque est présent dans le temple des Guerriers ou dans celui des Mille colonnes.

    Tous ces monuments sont richement décorés de bas-reliefs et de sculptures : jaguars dévorant des cœurs humains, guerriers, prêtres, aigles et serpents à plumes.

     

    Chichen Itza. El Castillo illuminé la nuit

    El Castillo éclairé la nuit. By Lightmatter

     

    Un peu partout, on peut voir des têtes de serpents, aux gueules béantes, qui ornent la base des piliers.
    Caractérisée par des crocs de félin, l’image du Serpent à plumes est propre à ce site. On l’assimile au culte de Quetzalcóatl.

    Le temple des Guerriers

    À l'est du tzompantli s'élève la masse imposante du temple des Guerriers et, tout près de là, le groupe des Mille Colonnes.
    Les colonnes, autrefois recouvertes de stuc et peintes, représentent des guerriers en armure.

     

    Temple des guerriers de Chichen Itza

    Temple des guerriers. By Jimg944

     

    Cette grande pyramide à degrés fut probablement érigée au XIIe siècle de notre ère. Le temple est dédié à Vénus, l’Etoile du Matin.

    Là encore, en haut du temple des Guerriers, se dresse un Chac-Mool. Cette pratique des sacrifices était devenue obsessionnelle à cette époque.

     

    Grand escalier du temple des guerriers à Chichen Itza

    By Jimg944

     

    Ce type d'autel était encore utilisé à l'époque de la Conquête pour immoler les victimes destinées aux sacrifices. Les quatre massifs de la pyramide sont recouverts de frises où alternent les scènes glorifiant les ordres militaires toltèques - les Aigles et les Jaguars - et les descriptions de sacrifices sanglants.

     

    Les Mille colonnes de Chichen Itza

    Le groupe des Mille Colonnes. By Ramonbaile

     

    Le groupe des Mille Colonnes longe deux côtés d'une place trapézoïdale sur laquelle donne une structure qui accueillait probablement un marché couvert.
    Mais, rien ne prouve que des activités commerciales aient eu lieu ici.

    V.Battaglia (04.02.2007)

     

    Références bibliographiques

    Splendeurs des civilisations perdues, éditions Gründ. Civilisations disparues, Nov’edit. Les Toltèques, l’histoire du Monde, Larousse, N°37. Les sites archéologiques, éditions Gründ.

     

    Archéologie:  Chichén Itzá - Mexique

     

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    Les momies en Amérique du Sud

     

    L’Égypte est sans conteste la terre des momies. Pourtant, les premiers embaumeurs ne sont pas égyptiens. Dans le monde entier, des cultures ont pratiqué la momification.
    En Amérique du Sud, on a embaumé les corps pendant au moins 6 500 ans, bien plus longtemps que dans le reste du monde.
    Les premiers à créer des momies furent les Chinchorros, un peuple chilien, qui vidait les corps avant de les remodeler.

    L’Amérique du Sud est le lieu de naissance de la momification et l’un des derniers endroits où l’on perpétua cette tradition.
    On y trouve aussi bien des momies naturelles qu’artificielles.

      

    Momie naturelle

    L’Amérique du Sud possède un climat qui a facilité la conservation de momies naturelles. Le long des côtes du Pérou et du Chili, le climat est chaud et sec toute l’année. De ce fait, les corps séchaient lentement et au bout du processus ne restait qu’une peau tendue sur les os.

     

    Momie du Mexique

    Momie mexicaine. By drini

     

    Au sommet des montagnes, il fait sec et il gèle en permanence. Les corps ne se décomposent donc pas.
    Congelés, ils laissent apparaître chaque détail de l’anatomie intérieure et extérieure.

    Les Incas sacrifiaient des enfants à leurs dieux et l’on a retrouvé certaines victimes qui sont devenues des momies naturelles.
    Ce rituel s’appelait « capacocha ». En 1995, on a découvert le corps congelé d’une de ces jeunes victimes qu’on a baptisé « Juanita », la Vierge des glaces.

     

    Momie d'un enfant au Perou

    Jeune enfant momifié découvert au Pérou. By Hesselink

     

    Elle fut tuée au sommet du mont Ampato au Pérou. Elle a peut-être été frappée à la tête ou droguée puis laissée sur place où elle est morte gelée.

    Enveloppée de tissus, l’enfant a été enterrée avec des statuettes en or et en argent, des pots en terre glaise et des sacs de maïs.

    Outre les sacrifices effectués, les Incas momifiaient les corps de leurs empereurs. Ces momies étaient exposées lors des fêtes. On les faisait « défiler » dans les rues comme des morts vivants.

     

    Momie de Nazca

    Momie inca découverte près de Nazca. By leander.canaris

     

    Leur présence était la preuve de la toute-puissance de l’empereur dans le passé comme dans le présent.

    Malheureusement, les Espagnols ont détruit la plupart des momies du Pérou.

    Les premières momies

    Les momies chinchorros sont connues des archéologues depuis 1917.
    Ce n’est cependant qu’en 1983 que la plus grande découverte fut effectuée. Cette année-là, des ouvriers ont mis au jour un cimetière. On y déterra 96 momies. La plus ancienne remonte à 7000 ans, soit 5000 ans avant notre ère.
    C’est donc devenue la plus ancienne momie connue jusqu’à présent.

     

    Momie chinchorros

    Momie chinchorros recouverte d'argile. © dinosoria.com

     

    Les Chinchorros étaient des pêcheurs qui vivaient le long de la côte nord du Chili. Chinchorro est un ancien mot espagnol qui signifie « filet de pêche ».
    On ignore en fait comment ce peuple s’appelait réellement. Le nom provient de la plage où l’on a retrouvé des vestiges de leur culture.

    L’écriture n’existant pas, ils ne nous ont laissé comme vestiges que leurs momies qui sont les plus vieilles du monde.

     

    Momie

    Momie péruvienne. By quinet

     

    On sait que ce peuple a ainsi conservé ses morts jusqu’en 1 700 avant notre ère environ. À partir de là, ils commencèrent à réaliser des fardos c’est-à-dire des ballots funéraires.

    La technique d’embaumement de ce peuple est unique. En effet, ils incisaient l’abdomen, ôtaient les viscères puis enlevaient la peau et la chair des os.
    Ils conservaient uniquement la peau.

     

    Momie du Perou

    Fardo funéraire du Pérou. By An en Alain

     

    Ils extrayaient le cerveau. Jusque-là, rien d’extraordinaire. C’est le processus de reconstitution du corps qui est unique.
    Ils redonnaient sa forme initiale au corps en se servant de bâtons pour renforcer la colonne vertébrale, les jambes et les bras.
    Ils appliquaient ensuite sur les os une épaisse couche d’argile et de fibres végétales pour remodeler la silhouette.
    La reconstitution achevée, ils tendaient la peau du mort, mise de côté, en complétant si besoin avec de la peau d’otarie.

     

    Momies Chinchorros

    Momies Chinchorros. © dinosoria.com

     

    Les embaumeurs enduisaient la peau d’une mince couche de pâte à base de cendres qui durcissait au séchage.

    La momie n’avait plus qu’à être peinte et parée de quelques atouts pour lui donner une apparence « vivante ».
    Les momies étaient peintes en noir ou en rouge selon les époques. Elles portaient des perruques faites de cheveux humains, des casques ou des masques.

    Les momies chinchorros n’étaient pas enterrées tout de suite. Elles étaient d’abord exposées un certain temps puis on les plaçait dans des tombes.

     

    Les fardos funéraires et la culture de Paracas

    Vers 400 avant notre ère, dans le sud du Pérou, la mode fut aux fardos. Cette pratique dura plus de 1 000 ans.
    Le principe consistait à conserver le corps par des moyens naturels. On laissait les organes en place. Les genoux étaient repliés contre la poitrine, puis le corps était lié à l’aide de cordes et de couches de tissu pour former une masse compacte.
    Une fausse tête était placée au-dessus de ce cocon de tissus.

    Les fardos étaient composés de couches successives de pièces de tissu appelées "mantos". Leur nombre était peut-être proportionnel à l'importance du défunt.

    Au fil du temps, le tissu absorbait les substances liquides et le corps se desséchait.

     

    Momie

    Momie de Nazca (Musée régional de Cuzco). By Exfordy

     

    C’est en 1925 qu’on a découvert, sur une presqu’île désertique de la côte sud du Pérou, l’un des plus surprenants trésors de l’Amérique précolombienne.

    Ce trésor est constitué de milliers de pièces de tissu. Ces pièces appartiennent à une civilisation baptisée Paracas du nom du lieu de la découverte.
    Certains tissus datent de 1 400 avant notre ère.

     

    Tissus Paracas

    Pièce de tissu Paracas. Crédit photo

     

    Tous les textiles de Paracas proviennent de chambres funéraires. Ces dernières abritent des corps momifiés qui ont été trouvés en position fœtale, bras croisés sur la poitrine.
    Toutes les momies sont enveloppées dans de la toile et du tissu.

    L’examen des crânes a révélé, dans de nombreux cas, des traces de trépanation ainsi que des déformations de la tête, qui est souvent en forme de « pain de sucre ».

    Le démaillotage des fardos a montré que les corps avaient été habillés de vêtements ainsi que d’immenses pièces de tissu mesurant jusqu’à 20 mètres de long et 6 mètres de large.

    Les fibres utilisées sont le coton et la laine de camélidés, notamment l’alpaga et la vigogne, des cousins du lama.
    Cela démontre d’ailleurs qu’à cette époque il existait déjà des échanges commerciaux entre les régions côtières et la montagne, ces animaux vivants sur les hauts plateaux andins.

    Les corps étaient ensevelis avec de nombreux objets du quotidien et des produits alimentaires. On retrouve là des rites très proches de ceux pratiqués en Égypte.

     

    V.Battaglia (27.10.2005). M.à.J 06.2008

     

    Archéologie: Les momies en Amérique du Sud

     

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    Sipán . Les Moches ou Mochicas

     

    Pérou

    La découverte, en 1987, de la tombe du « seigneur de Sipán », dans le nord du Pérou, a révélé au monde les beautés de l’artisanat mochica.
    La civilisation mochica s’est développée du IIIe siècle avant notre ère au VIIIe siècle de notre ère. La culture des Moches s’est principalement développée dans les vallées de la Moche et de la Chicama (actuelle province de La Libertad).

    Très hiérarchisée, la société moche est dominée par une aristocratie qui contrôle le pouvoir politique, militaire et religieux. Ce peuple précolombien avait une culture qui est considérée comme la plus raffinée et la plus avancée du monde préinca.

     

     La culture moche

    Les Moches se sont établis dans des vallées fluviales, le long de la côte aride au nord du Pérou. L’agriculture et la pêche nourrissaient une importante population. Cette société très hiérarchisée, bâtissait des canaux d’irrigation, des pyramides et des palais.

    Malgré l’absence d’un système écriture, les Moches ont témoigné de leur art dans de beaux vases en céramique, des laines élaborées, des peintures murales et de nombreux objets en cuivre, en or et en argent.

     

     

     

    Poterie provenant de la côte nord du Pérou. Art des Moches ; 400-700 après notre ère (British Museum, Londres)

     

    On ne sait pas si les Moches ont fondé un Etat centralisé avec une capitale ou si leur organisation reposait sur une confédération de plusieurs seigneuries.

    On sait par contre que la noblesse concentrait tout le pouvoir. Le sommet de la hiérarchie était occupé par un chef, peut-être un roi.

     

    Vase portrait d'un chef Moche

     

    L’agriculture constituait la principale ressource. La population se devait de participer à la construction des grands ouvrages publics. Ces participations volontaires ont d’ailleurs contribué à l’essor de la civilisation. Les Moches ont ainsi réalisé des ouvrages hydrauliques grandioses.

    Les Moches cultivaient des céréales, des légumes, du coton, du tabac et la coca. Ils élevaient des chiens, des cochons d’Inde et des lamas.

     

     

     

    La pêche était une autre source importante d’approvisionnement. Les pêcheurs utilisaient les totoras, des groupes d’embarcations individuelles, liées entre elles par des cordes en fibre végétale.

    La chasse n’était par contre pratiquée que par la noblesse.

    L’examen des objets retrouvés dans les tombes a confirmé l’utilisation de cosmétiques, de miroirs, de peignes ou de pinces à épiler.

     

    Pinces à épiler en or de facture moche (Lima, musée de l'Or)

     

     La sépulture de Sipán

    En février 1987, en creusant un tumulus sacré, des pilleurs de tombes ont mis au jour un incroyable trésor funéraire.
    Une querelle ayant éclaté entre les voleurs, l’un deux dénonça ses complices. C’est ainsi que les archéologues ont pu déblayer les restes de la tombe saccagée.

     

     

     

    Les huacas de Sipán étaient, à l'origine, de hautes pyramides de briques (© National Geographic)

     

    Cette huaca ou pyramide sacrée allait leur révéler de nombreuses surprises. A l’origine, les huacas de Sipán étaient de hautes pyramides de brique, lieux où se déroulaient les rites sacrificiels et où se trouvaient les tombes royales.

    Aujourd’hui, il ne reste plus que d’immenses tumulus.

    A l’intérieur de la tombe pillée se trouvait le squelette d’un homme coiffé d’un casque de cuivre et protégé par un bouclier.
    Des étendards de coton recouvraient le corps. Ils étaient décorés de cuivre plaqué or.

     

    © Walter Alva/Bruning Museum

     

    La sépulture de Sipán est la plus magnifique tombe jamais découverte aux Amériques.

     

    Dans la chambre funéraire, des cercueils de roseau abritaient deux hommes, deux femmes et un chien. Au centre, se trouvait le cercueil de bois où reposait l’homme en l’honneur duquel cette sépulture avait été érigée.
    Il mourut vers 40 ans. C’était un seigneur guerrier chaussé de sandales d’argent. Dans sa main droite, il tenait un sceptre d’or et, dans la gauche, un sceptre d’argent.
    Il était entouré d’objets en or et en argent.

     

     

     

    Figurine à la coiffe en forme de hibou. L'homme le plus âgé, retrouvé dans la troisième tombe, portait un ornement de nez de 11 cm de haut, identique à celui de la figurine (Bruning Museum)

     

    Des hommes sacrifiés entouraient le seigneur guerrier. On ne sait pas si les femmes étaient des concubines. En revanche, elles étaient mortes de puis longtemps quand elles ont été placées dans la tombe.

    Par la suite, on trouva deux autres sépultures autour du tumulus.

     

     Le site de Dos Cabezas : des tombes de géants

    Entre 1997 et 1999, une équipe d’archéologues a localisé trois sépultures à Dos Cabezas, dans la partie basse de la vallée de Jequetepeque, près de Sipán.

     

     

     

    Le noble Moche du tombeau 3. Il a été enfoui avec de nombreuses offrandes: une bouteille en forme d'oiseau, une tête de lama et des jarres (© National Geographic)

     

    Des tombes miniatures étaient accolés à chaque tombe. Les petits compartiments près de la tombe étaient calqués sur le modèle des chambres funéraires. Cette caractéristique est totalement unique.

     

     

     

    Tombeau 3 (1999) 1/ Tombe miniature contenant des céramiques, une tête de lama et une figurine en cuivre 2/ Jeune servante de 15 ans sûrement sacrifiée 3/ Homme enveloppé de bandelettes 4/ Enfant âgé de 9 ans 5/ Bouteille en céramique 6/ Bouteille en forme d'oiseau 7/ Marque du fabricant des briques

     

     

     

    Excavation Tombeau 2 (1998) 8/ Figurine en cuivre 9/ Bouteille en forme de condor 10/ Tête de lama 11/ Cinq pots 12/ Lama en offrande 13/ Corps 14/ Jeune garçon de 15 ans enterré sous le personnage principal 15/ Bouteille en céramique

     

    A l’extérieur de chaque chambre funéraire, une petite statue en cuivre représentait l’occupant du tombeau.

     

    Bec de chouette en or. C'est l'un des cinq objets en or retrouvés dans la bouche de l'occupant du tombeau 2 (© National Geographic)

     

    Chez les Moches, la taille des hommes variait de 1,47 m à 1,67 m. Or, les trois habitants des tombeaux atteignaient entre 1,75 m et 1,82 m. Ils étaient âgés de 18 à 22 ans et sont probablement morts à un mois d’intervalle.

     

    Visage menaçant d'une figure sur une bouteille en céramique du tombeau 2 (© National Geographic)

     

    L’archéologue Alana Cordy-Collins pense que ces hommes devaient souffrir d’une maladie similaire aux syndromes de Marfan, un désordre génétique à l’origine de l’allongement et de l’amincissement des os.

     

    (© National Geographic)

     

    Outre l’occupant principal, chaque tombeau contenait une jeune femme et une tête ou une carcasse de lama.

     

    Animal non identifié en céramique du tombeau 2 (© National Geographic)

     

    Dans le tombeau 2, l’homme a été enterré avec une chauve-souris en céramique. Les chauves-souris constituaient d’importants symboles pour les Moches. Elles apparaissent souvent dans les descriptions de sacrifices humains.

     

    (© National Geographic)

     

    Plus de 350 sépultures ont été mis au jour mais les tombeaux de Dos Cabezas sont uniques.

     

     Rituels et sacrifices

    De nombreuses céramiques mettent en scène des sacrifices, des rites funéraires et des épisodes guerriers.
    Certaines illustrations relatent les batailles entre les peuples des vallées fluviales. Ceux-ci s’opposaient en une série de combats singuliers, le but n’étant pas de tuer mais d’assommer l’adversaire.
    Le vainqueur déshabillait son ennemi, lui bandait les yeux et pouvait alors exhiber son prisonnier.

    Enfin, les hommes capturés étaient sacrifiés. Lors d’une grande cérémonie religieuse, un prêtre leur coupait la gorge et recueillait le sang dans une coupelle. Le contenu était offert au chef.

     

    Poterie symbolisant le sacrifice humain (© Museum für Volkerkunde, Berlin)

     

    On démembrait alors les corps des victimes sacrificielles, on attachait leurs têtes et leurs membres à des cordes et on les suspendait comme trophées.

     

     Lutter pour survivre

    Les catastrophes naturelles, El Niño, tremblements de terre, éruptions volcaniques, sécheresses et inondations, ont toujours fait partie de l’histoire sud-américaine.

    La mer était d’ailleurs au cœur de la culture mochica. Le courant de Humboldt, qui longe les côtes du Pérou du sud au nord, favorise la multiplication des fruits de mer. Ce courant permet des pêches uniques au monde.

     

    Seigneur guerrier. Cette mosaïque de coquillage, d'or et de turquoise, décorait une bijou d'oreille retrouvé dans la première tombe de Sipán (© Museum für Volkerkunde, Berlin)

     

    Mais, entre 562 et 594, une période de grande sécheresse s’abattit sur le pays mochica. La famine et la maladie décimèrent la population. D’immenses dunes côtières se formèrent, repoussant les survivants à l’intérieur des terres.

    Il fallut créer de nouveaux systèmes d’irrigation.

     

    Poterie moche à effigie (antérieure au VIIe siècle), provenant du nord du Pérou. (Musée des Beaux-Arts de Dallas)

     

    Les guerres, qui se limitaient autrefois à des combats rituels, prirent une ampleur meurtrière. L’enjeu était de préserver les ressources naturelles de sa propre communauté.

    Des fortifications s’élevèrent. En 800, cette lutte pour la survie avait divisé le territoire mochica en plusieurs principautés.
    L’unité culturelle qui liait les royaumes de la vallée du fleuve appartenait désormais au passé.

     

    V.Battaglia (20.05.2006)

     

    Références bibliographiques

    Civilisations disparues, éditions Nov’edit. Les grandes civilisations disparues, Sélection du Reader’s Digest. Magazine National Geographic, mars 2001.

     

    Archéologie:  Sipán  - Les Moches ou Mochicas

     

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    Des milliers d’années avant les célèbres Vénus du gravettien, nos ancêtres sculptaient des êtres hybrides, des animaux et des danseuses.
    Ces figurines, vieilles de plus de 30 000 ans avant notre ère, remettent en question l’origine de l’art.
    Les gisements de Vogelherd, de Hohenstein-Stadel ou de Hohle Fels ont livré d’extraordinaires créations.
    L’homme de Cro-Magnon n’était pas le seul à s’intéresser à l’art. Des réalisations d’Homo erectus ont été découvertes.
    L’art est bien plus ancien qu’on ne le pense traditionnellement. 

     

    Les vénus et l’art pariétal

    On pense souvent que les hommes préhistoriques ont inventé l’art figuratif en peignant notamment des animaux sur les parois des grottes.
    L’art pariétal a été pendant longtemps considéré comme le père de tous les arts à venir comme le montrent certaines peintures de la grotte Chauvet, âgées d'environ 31 000 ans.

     

    Grotte Chauvet

    Grotte Chauvet. © dinosoria.com

     

    Les célèbres Vénus du gravettien, âgées d’environ 28 000 ans, sont quant à elles considérées comme les premiers symboles de la féminité et de la fertilité. Elles marquent les premières valeurs de l’humanité, centrées sur la mère.

     

    Vénus de Laussel

    Vénus de Laussel ou "Dame à la corne". 44 cm de haut. Bas-relief sur roche. Musée d'Aquitaine. © dinosoria.com

     

    Ces idées schématiques ont été remises en cause par la découverte de statuettes qui remontent à au moins 34 000 ans, pour les plus anciennes.
    Ces gisements ont été mis au jour en Allemagne. Ces figures appartiennent à la culture aurignacienne, la même que celle de la grotte Chauvet.

     

     

    Les premières idoles de la préhistoire

    Il y a 35 000 ans, l’homme de Cro-Magnon, en Europe, sculpte, grave, poli et peint l’ivoire et la pierre.
    Son imaginaire symbolique ne fait aucun doute. Les gisements allemands nous ont livré d’extraordinaires statuettes.

    L’archéologue américain, Nicolas Conard, a notamment mis au jour ce qui pourrait être la plus ancienne des œuvres d’art.
    Il s’agit d’une statue d’homme-lion exhumée dans la grotte de Hohle Fels, à côté d’Ulm, dans le sud de l’Allemagne.
    Les représentations figuratives sont animales mais également humaines. Elles remontent à – 34 000 ans au minimum.

    Il s’agit de figurines d’os ou d’ivoire en forme de cheval principalement et à forme humaine.

     

    Figurine du Paleolithique

    Figurine en forme de cheval. Musée d'Ulm. © dinosoria.com

     

    La représentation de l’homme est assez ambiguë car il s’agit d’êtres hybrides avec un corps d’homme et un visage caché, comme par une cagoule, ou avec une tête animale.

    Ces figures seraient plutôt masculines comme en atteste la proéminence visible à l’entrejambe.
    Sur ce point, tous les préhistoriens ne sont pas d’accord. La reconstitution de la statuette à tête de félin serait une femme-lionne, dans la mesure où elle ne porte pas de crinière.
    Le débat reste ouvert.

     

    Figurine d'homme-lion

    "Femme-lionne". © dinosoria.com

     

    L’homme-lion mesure 28,6 cm de haut. Les morceaux de cette statue en ivoire de mammouth ont été retrouvés en 1939 parmi des centaines de fragments.
    Non étudiés, ces débris ont été redécouverts en 1969. La reconstitution a pris près de 20 ans.

     

    La danseuse de Galgenberg

    On l’appelle « Fanny » ou encore « la Danseuse ». Elle a été découverte en 1988 près de Stratzing, en Autriche.
    Elle est la plus ancienne Vénus paléolithique connue. Haute de 7,2 cm, cette représentation féminine vieille de 32 000 ans a été sculptée dans du schiste vert.

    Elle ne ressemble nullement aux opulentes Vénus ultérieures. Elle s’apparente plus à une jeune danseuse.
    Son sein gauche est déporté par un mouvement que l’artiste a très bien suggéré.

     

    Venus. La Danseuse

    Vénus baptisée "La danseuse". © dinosoria.com

     

    De même, la Dame à la capuche, trouvée à Brassempouy (Landes, en France) qui date de – 29 000 ans, semble trop frêle pour incarner une lourde déesse de la fertilité.

     

    Dame de Brassempouy

    Dame de Brassempouy. (Musée des Antiquités nationales). © dinosoria.com

    L’aurignacien n’était peut-être pas plus matriarcal que ne l’est notre époque.

     

    Le bestiaire de Vogelherd

    C’est dans la première moitié du XXe siècle que ces statuettes ont été exhumées. Elles sont datées de – 32 000 ans.

    Le bestiaire est très riche : cheval, lion ou bison. Les statuettes ont été sculptées dans l’ivoire.

     

    Statuette de Vogelherd

    Statuette de Vogelherd. © dinosoria.com

     

    Ces figurines, au modelé remarquable, ont le corps orné de petites cupules et de croisillons gravés.

    Il est difficile de croire, face à ces réalisations exemplaires, que l’art en était alors à ses débuts. Elles témoignent d’une tradition artistique certainement bien plus ancienne.

     

    La vénus de Berekhat Ram

    Taillée dans du tuf basaltique, cette figurine a été découverte sur le site acheuléen de Berekhat Ram, à la frontière israélo-syrienne.
    Ce serait la plus ancienne sculpture du monde.

    Œuvre probable d’Homo erectus, la statuette a été retrouvée entre deux niveaux de cendres volcaniques datés de – 230 000 ans et – 800 000 ans.

     

    vénus de Berekhat Ram

    Vénus de Berekhat Ram. © dinosoria.com

     

    Face aux doutes soulevés par cette découverte, les analyses microscopiques effectuées par l’anthropologue américain A.Marchack, ont incontestablement démontré que cette figurine a été taillée par l’homme.

    Une autre création d’Homo erectus aux formes humaines plus marquées a été dégagée en 1999, à Tan-Tan, dans le sud du Maroc.
    Son âge se situerait entre 300 000 et 500 000 ans.

     

    Symbolisme du premier art préhistorique

    Les statuettes de l’aurignacien ont été rarement retrouvées à proximité de tombes. Elles ne faisaient donc pas forcément partie d’un rite funéraire.
    On peut bien sûr y voir des dieux ou des déesses. L’homme-lion nous fait penser à la déesse égyptienne Sekhmet.

    Cependant, cet art démontre que les facultés d’abstraction de ces hommes n’étaient pas si différentes des nôtres.
    Il s’agit là de la représentation de la réalité. Nous sommes très loin des monstrueuses vénus du gravettien.

    Les statuettes ne sont nullement figées. La femme danse et le cheval galope. Il faudra attendre l’époque magdalénienne (Grottes de Lascaux et d’Altamira) pour retrouver cette dynamique figurative.

     

    Grotte de Lascaux

    Vache et cheval polychromes qui figurent dans l'une des frises principales. © dinosoria.com

     

    L’art de l’aurignacien qui semble surgir du néant reste à ce jour une énigme.

    V.Battaglia (13.12.2005)

    Bibliographie principale

    La femme des origines, image de la femme dans la préhistoire occidentale, Claudine Cohen, Belin-Herscher, 2003
    Au cœur de la Préhistoire, Chasseurs et Artistes, Denis Vialou, Découverte Gallimard, 1996
    Préhistoire des religions, Marcel Otte, Masson, 1997
    Les premières idoles, Sciences et Avenir, janvier 2004

     

    Archéologie:  Les vénus et l’art pariétal

     

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