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    Contes créoles

    Paul Baudot, Oeuvres créoles, Traduction et
    préface de M. Maurice Martin, 2e édition,
    Basse-Terre, 1935, 230 p.

     

    Contes Créoles:  Chat et Macaque

    Chat de Guadeloupe. Photo F.P.


    Chat et Macaque

     

    Gnon jou, chat et macaque, ces dé rompis fouipons,
    Té ka combiné plans con dé bon compagnons.
    Dans case à maite-yo, tout con à l'ôdinè,
    Pou trouvé lé moyens carré, pillé et fè
    Mille méchancetés, au lié sèvi planton
    Pou pouan ratte et souritte, longé à quate pattes,
    Dans cuisine, té ka veillé masse patates
    Yo té metté roti dans gnon michant foyé.
    Macaque té vlé pouan yo. Pou ça, failé fouillé
    Dans cende à di fé la qui té chaud con la bouaise.
    Du boulé pattes à li, macaque pas té aise.
    Dans l'embarras à li, li vini flatté chatte.
    «Tonnè ! li dit-li, tambou ! qui famé patte ! ! !
    Patté con vous yé là, vous tini grand valè !
    Si tan moin té con ça, moin sré gnon l'empirè...
    Si ou vlé couté moin, ou ké rampli di glouè ;
    Moin ké fè ou gagné gnon bien belle victouè.»
    Coument ? chatte mandé-li. Eh ben ! dit l'autre enfin,
    Avè gnon patte à ou, rallé jisqu'a la fin
    Tous ces patates-là. Pou ça, à vous la chique !
    Dans moune, cé ou sel qui pé mette en pouatique
    Gnon belle zaffè con ça. Quant à moin, moin kallé
    Rammasse pou nous dé, sitôt ou ké rallé.
    Ou kallé fè ça bien, ou grand coquemitaine
    Qui tout patout conni pou gnon grand capitaine. »
    Chatte fiè, et tout gonflé d'in si bel compliment,
    Lâché con gnon tonnè gnon grand miaulement.
    Vini vouè çu soto, rallé gnonne apouè l'aute
    Tous cé patates-là ! Apoué, vini vouè l'aute
    Pliché et chiqué yo ! Chatte té ka boulé-li
    Dans ti manège-là, ka souquoué patte à li,
    Mé li ka pouan patience. Avè gnon grand l'adresse,
    Li ka rallé toujou. Macaque, à la pouesse,
    ka dévoré, valé tout cà li ka trapé.
    Li ka ri en didans, coquin-là, tant li pé !
    Li pas ka troublé-li, et, sans pède la cate,
    Dans grand bajole à li, li ka fouré patate.
    Li ka bouré, foulé, jistant vente à li plein.
    Et pauve chatte, hélas ! pas ka trapé aïen.
    Dans même moument-là, gnon vié maman négresse,
    Qui té ka vouè tout çà fout gnon bon grais se
    A grands coups di bâton. Macaque voye en riant :
    Et chatte, quand li fouquant, pa té pé fè autant.
    Tini chatte et macaque, pami la race himaine,
    Qui pareils à ceux-là bon mouché La Fontaine.
    Moin connaite à dé pattes, aussi fô qui ceux-là
    Qui ka rallé patates, carottes con ceux-là,
    Couté bien gnon provèbe à nègue qui pas bête :
    «Toujou ka trappé coups cilà qui bon vallette.»
    Aussi fo méfié du cé mounes qui dou
    Qui, pou badiné ou, ka vini flatté ou.

     

    Traduction

     

    Un jour, chat et macaque, ces habiles fripons,
    Combinaient des plans comme deux bons compagnons.
    Dans la maison de leur maître, tout comme à l'ordinaire,
    Pour trouver le moyen de chiper, piller et faire
    Mille méchanchetés, au lieu de servir de planton
    Pour prendre rat et souris, allongés à quatre pattes,
    Dans la cuisine, ils surveillaient une masse de patates
    Qu'on avait mis à rôtir dans un grand foyer,
    Macaque les voulait prendre. Pour cela, il fallait fouiller
    Dans la cendre du feu qui était chaude comme la braise
    .
    De brûler ses pattes, macaque n'était pas aise,
    Dans son embarras, il vint flatter le chat.
    «Tonnerre ! lui dit-il, tambour ! quelle fameuse patte ! ! !
    Patté comme vous l'êtes, vous avez grande valeur !
    Si la mienne était ainsi, je serais un grand empereur...
    Si vous voulez m'écouter, vous serez couvert de gloire :
    Je vous ferais gagner une bien belle victoire.
    Comment ? Lui demanda le chat. Et bien ! Dit l'autre enfin,
    Avec une de vos pattes, tirez jusqu'à la fin
    Toutes ces patates. Pour cela, à vous l'adresse ! .
    Dans le monde, c'est vous seul qui puissiez mettre en pratique
    Une belle affaire comme celle-là. Quant à moi, je vais
    Ramasser pour nous deux, sitôt que vous tirerez.
    Vous ferez bien cela, vous êtes un grand croquemitaine,
    Connu partout pour un grand capitaine.»
    Chat fier, et tout gonflé d'un si beau compliment,
    Lâcha, comme un tonnerre, un grand miaulement
    Venez voir ce sot, tirer l'une après l'autre
    Touts ces patates ! Après, venez voir l'autre
    Les éplucher et les ma
    nger ! Chat se brûlait
    Dans ce manège, secouait sa patte,
    Mais prenait patience. Avec une grande adresse
    Il tirait toujours. Macaque, se pressant,
    Dévore, avale tout ce qu'il attrape
    Il riait en dedans, ce coquin, tant qu'il pouvait !
    Il ne se troublait pas, et, sans perdre la carte,
    Dans sa grande bajole, fourrait les patates,
    Il bourrait, foulait jusqu'à ventre plein.
    Et pauvre chat hélas ! N'attrapait rien.
    A ce moment, une vieille maman négresse,
    Qui voyait tout cela, leur foutut une bonne volée
    De coups de bâton. Macaque s'enfuit en riant ;
    Et chat, quand il courut, ne peut en faire autant.
    Il y a chat et macaque dans la race humaine,
    Pareils à ceux du bon Monsieur La Fontaine.
    J'en connais à deux pattes, aussi forts que ceux
    Qui tirent patates et carottes comme ceux-là.
    Ecoutez bien un proverbe de nègre qui n'est pas bête :
    «Toujours recoit les coups celui qui est bon valet.»
    Aussi, il faut se méfier de ces gens doucereux
    Qui, pour vous badiner, viennent vous flatter.

    Merci de lire ce conte créole sur ma page et n'hésitez pas à revenir...

    Bisous - Frawsy

     

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    La légende du roi Arthur

    Chevaliers, Table ronde et saint Graal

     
     

     

     

    On dit qu'un abbé du XIIIe siècle réussit un jour à réveiller ses moines endormis pendant son prêche avec ces quelques mots : «Il y eut jadis un roi nommé Arthur...».

    Il serait étonné de savoir que, huit siècles plus tard, le nom d'Arthur continue à tenir éveillés les lecteurs de tous âges. Depuis le Moyen Âge, la légende de ce roi ne cesse en effet d'intriguer et émerveiller l'Occident. Partons à notre tour sur les pas de Lancelot et de ses amis pour faire la part de la fiction et de la réalité, et surtout pour rêver.

    Isabelle Grégor

    À l'usage des collégiens et de leurs enseignants, voici un petit questionnaire amusant autour de la légende du roi Arthur et des Chevaliers de la Table ronde

     

    Prologue du Conte du Graal

    Version originale :

    Donc avra bien sauve sa peinne
    Crestiens, qui antant et peinne
    a rimoier le meillor conte,
    par le comandement le conte,
    qui soit contez an cort real.
    Ce est li contes del graal,
    don li cuens li baille le livre,
    s'orroiz comant il s'an delivre.

    Adaptation en français moderne :

    Chrétien n'aura donc pas perdu sa peine,
    lui qui, sur l'ordre du comte,
    s'applique et s'évertue
    à rimer le meilleur conte
    jamais conté en cour royale :
    c'est le Conte du Graal
    dont le comte lui a remis le livre.
    Écoutez donc comment il s'en acquitte.
    Et les Plantagenêts inventèrent Arthur

    Il n'est pas besoin de chercher très loin : il suffit de se rendre vers 1135 à la cour de Geoffroy Plantagenêt, celui qui se plaisait à «planter» un «genêt» à son chapeau.

    Il aimait particulièrement écouter l'histoire inventée par Geoffroy de Monmouth, cette Historia regum Britanniae qui lui rappelait le destin troublé de la Grande-Bretagne, c'est-à-dire de la terre du descendant d'Énée, Brutus.

    Parmi les héros qui se succèdent au fil des pages se distinguent le roi Lear et un certain Arthur. Geoffroy y voit un mythe destiné à concurrencer celui de Roland et du grand Charlemagne, fierté de ses rivaux capétiens.

    Son fils, le rusé Henri II, ne s'y trompe pas. Héritier de la couronne anglaise, il l encourage le poète normand Wace à vite rédiger le Roman de Brut en ancien français pour asseoir sa légitimité sur la Grande-Bretagne. La Chanson de Roland n'a qu'à bien se tenir !

    Un «best-seller» au Moyen Âge !

    Le thème chevaleresque inventé par le poète normand Wace est repris avec brio par Chrétien de Troyes, un écrivain champenois de la fin du XIIe siècle sur lequel on ne sait à peu près rien. Il reste malgré cela le père incontesté du «roman» arthurien.

    En cinq ouvrages et en remplissant les blancs laissés par son confrère normand, Chrétien de Troyes construit tout un univers.

    Ainsi développe-t-il les aventures des différents chevaliers sans manquer d'y ajouter une dimension religieuse.

    Rédigés entièrement en vers et en langue d'oïl, son Lancelot ou le Chevalier à la charrette et surtout son Perceval ou le Conte du Graal ouvrent la voie à une multitude de continuateurs, trouvères, troubadours et poètes plus ou moins inspirés.

    Le XIIIe siècle est un tournant : on délaisse le vers au bénéfice de la prose, censée permettre d'approcher plus près de la vérité. C'est la naissance de l'imposant cycle de Lancelot-Graal ou encore de Tristant et Iseut.

    Un héros, un enchanteur et un zeste de magie

    Comme Arthur est un héros, il a droit bien sûr à une origine hors du commun : il est le fils du roi Uter Pendragon qui a pris l'apparence du duc de Cornouailles pour séduire la femme de ce vassal.

    Cela lui a été possible avec un breuvage permettant cette mutation, qui lui a été fourni par son conseiller, un enchanteur et prophète répondant au nom de Merlin.

    Merlin est lui-même le fils d'un démon incube (qui abuse des femmes pendant leur sommeil). Il devient un des piliers de la légende à laquelle il apporte magie et mystère. À ses côtés, les fées Morgane, Mélusine et Viviane, la Dame du Lac, sont autant de signes de l'omniprésence de «L'Autre Monde».

    À la mort du roi Uter Pendragon, la Grande-Bretagne n'a plus de souverain. Comment trouver un seigneur digne de la couronne ? Le signe attendu va venir du ciel : à la sortie de la messe, tous les Grands du royaume découvrent, sur le parvis de la cathédrale, une épée enfoncée dans une enclume. Chacun se précipite pour tenter sa chance, mais seul le jeune Arthur parvient sans peine à retirer l'épée.

    Les barons regardent d'abord d'un œil peu affectueux cet inconnu qui vient de devenir «le roi de cette terre, choisi par Jésus».

    Mais alors que l'envahisseur saxon menace, le jeune homme démontre toute sa sagesse et son courage. Il réussit à s'imposer et à coaliser la région autour de sa personne pour enfin apporter la paix.

    Parmi ses vassaux, Arthur distingue le roi de Carmélide, non pour ses qualités guerrières mais pour la beauté de sa fille, Guenièvre. Questionné sur le bien-fondé d'une alliance, Merlin prévient le jeune amoureux : il sera trahi par son épouse avec le meilleur chevalier de la cour. Qu'importe ! Arthur s'unit à Guenièvre qui a la bonne idée d'apporter en dot une belle table ronde...

    Mais assez vite les prédictions de Merlin se vérifient : enlevée par le fier Méléagant, Guenièvre ne doit son salut qu'à un chevalier inconnu qui va accepter toutes les humiliations pour sauver sa reine.

    Bien sûr, il ne tarde pas à tomber amoureux de la belle, l'entraînant dans une relation interdite qui la mène jusqu'au bûcher. Elle y échappe in extremis grâce à son chevalier servant, le fameux Lancelot.

    La fin'amor ou la courtoisie dans l'amour

    Être chevalier n'empêche pas de goûter aux joies de la vie, mais il faut respecter là aussi certaines règles, en particulier à l'égard des dames. Celles-ci sont placées en position de force face à leurs prétendants dont elles n'hésitent pas à tester la dévotion en les lançant dans des épreuves cruelles, voire humiliantes.

    C'est ainsi que le pauvre Lancelot doit traverser toute une ville assis dans la charrette des criminels sous les huées des habitants, pour pouvoir apercevoir sa bien-aimée Guenièvre.

    Cet amour peut donner lieu à des relations physiques, bien souvent à l'origine de relations adultères d'autant plus attirantes que la dame apparaît inaccessible. Est restée célèbre, par exemple, l'histoire qui unit le roi Marc, son neveu Tristan et Iseut-la-Blonde, femme de l'un et amante de l'autre.

    Lancelot, Gauvain, Galaad et compagnie

    Douze chevaliers assis autour d'une table ronde : cette image d'Épinal montre toute l'importance de la symbolique de cette table. Elle est la représentation de l'harmonie du cosmos, de l'égalité mais aussi de l'appartenance à une élite : la chevalerie.

    Autour d'Arthur, chef de guerre et garant de la cohésion, se regroupent les meilleurs combattants du pays. Lancelot du Lac, qui figure le chevalier parfait, son fils Galaad, Perceval le Gallois ou encore Mordred, le traître.

    Tous se lancent dans des aventures extraordinaires qu'ils doivent surmonter seuls sans hésitation ni marque de faiblesse.

    Et voici Lancelot qui rampe sur une épée transformée en pont, Yvain qui apprivoise un lion en pleine Bretagne, Érec qui affronte des géants... Mais à la table ronde, une place reste vide : il s'agit du Siège périlleux que seul celui qui trouvera le Graal aura le droit d'occuper. Le défi est de taille...

    L'histoire des chevaliers du roi Arthur n'est pas seulement une suite de combats pleins de sang et de fureur. À partir du XIIIe siècle, la religion y devient en effet très présente, notamment à travers le but de toutes ces aventures : le Graal.

    Délaissant les chasses aux monstres fabuleux et les errances dans les forêts, Chrétien de Troyes fait tout d'un coup apparaître dans son récit un étrange cortège de jeunes gens portant une lance qui saigne, un plat à trancher et un graal. Mort avant d'avoir donné la clef du mystère, Chrétien a laissé la voie libre à ses successeurs qui s'empressent d'assimiler ce graal à la coupe qui aurait recueilli la sang du Christ sur la croix.

    Symbole de l'inaccessible, il ne doit être retrouvé que par un chevalier à la moralité parfaite : ce sera Galaad, fils de Lancelot. Au fil des textes, le monde chevaleresque acquiert ainsi une dimension spirituelle de plus en plus importante. Finis les tournois pour la gloire et la beauté du geste.

    Des aventuriers pleins d'idéaux

    Arthur et ses compagnons sont devenus les symboles de la chevalerie, faite de rites initiatiques et de codes d'honneur. À la base de la société féodale, elle s'appuie sur un ensemble de principes destinés à faire de simples guerriers, nobles ou non, des soldats fidèles en toutes circonstances à leur seigneur.

    Le processus d'allégeance débute par la cérémonie d'adoubement qui marque l'entrée des écuyers dans la chevalerie. Ils doivent par la suite prouver leur valeur guerrière lors des combats ou, en temps de paix, des chasses et tournois.

    Ils restent également toute leur vie au service des malheureux et de l'Église. Fidèles à leur engagement, ils se lancent à partir du XIIe siècle dans une autre quête, la croisade.

    «La Mort le roi Artus»

    Un roi hors du commun ne pouvait avoir qu'une mort remarquable.

    Trahi par son neveu Mordred, qui s'est allié aux Saxons, Arthur engage une ultime bataille en vue de reconquérir son royaume. C'est un carnage : tous ses compagnons perdent la vie face aux armées du traître tandis que les deux chefs de guerre finissent par s'entretuer.

    Blessé à mort, Arthur demande à un de ses derniers fidèles de jeter son épée Excalibur dans le lac voisin. Une main sort alors de l'eau pour s'en emparer et la brandir à trois reprises avant de replonger dans les flots : c'est la fin du monde arthurien.

    Le vieux roi monte dans la nef qui s'avance pour rejoindre sa sœur Morgane, avant de disparaître vers l'horizon. Mais est-ce pour y mourir ?

    Pour certains, les aventures d'Arthur ne s'arrêtent nullement là : il se serait fait transporter dans son château d'Avalon pour y être soigné.

    C'est le début de «l'espoir breton», l'espoir de voir un jour revenir le héros pour poursuivre sa lutte contre les Saxons.

    Pour d'autres, aucun doute possible : Arthur repose dans l'abbaye de Glastonbury, au sud de l'Angleterre. Les moines n'y ont-ils pas découvert, en 1191, les restes d'un homme de grande taille et d'une femme aux cheveux blonds, reposant sous une croix où étaient gravés ces mots : «Ici gît l'illustre roi Arthur...» ?

    Malheureusement les ossements ont depuis longtemps disparu, laissant place à un simple carré d'herbe.

    Petite géographie arthurienne

    Les siècles ont passé, mais certains lieux résonnent encore du fracas des armes des chevaliers d'Arthur. Tout amateur nostalgique des légendes celtiques se doit de commencer son pèlerinage par Tintagel, en Cornouailles, où serait né le souverain. On dit d'ailleurs que s'y dressait un «château-fée» qui s'amusait à apparaître et disparaître au gré des solstices. Puis un détour par Camelot, capitale du royaume arthurien, s'impose. Mais où se situe-t-elle ?

    Laissons la question en suspens pour nous rendre à Camboglanna, à l'extrémité ouest du mur d'Hadrien, qui serait le lieu de la bataille ultime de Camlann. Du côté français, il faut se perdre dans la forêt de Brocéliande qui abrite la maison de Viviane et le tombeau de Merlin. Les fées vous y attendent toujours !

    La légende continue

    Arthur est peut-être mort du côté d'Avalon, mais sa légende est toujours bien vivante. Les romantiques ont en effet redécouvert avec Walter Scott cet univers qui correspondait si bien à leur besoin de mystère et d'idéalisme. Plus prosaïque, la reine Victoria fit de l'épopée une fierté nationale sur laquelle elle comptait asseoir son pouvoir.

    L'Âge d'Or celtique devint un thème à la mode, en particulier dans le cercle des peintres préraphaélites, Edward Burne-Jones en tête. La musique n'est pas en reste avec en 1865 l'opéra wagnérien Tristan et Iseut, dont les mésaventures recouvrent les murs de la chambre de Louis II de Bavière, au château de Neuschwanstein.

    En France, si certains grands écrivains comme Julien Gracq et Jean Cocteau ont directement puisé leur inspiration chez Arthur, on citera surtout au cinéma Perceval le Gallois d'Éric Rohmer, film sorti peu après le parodique Sacré Graal ! des Monthy Python et l'esthétique Excalibur de John Boorman.

    En 1963 les écrans avaient déjà été séduits par la gaieté du Merlin l'enchanteur des studios Disney. Notons enfin l'influence des récits de la Table ronde sur le genre de l'heroic fantasy qui a rendu Pendragon ou la Dame du lac familiers aux plus jeunes.

    Mais ce conte est un roman !

    Arrêtons-nous sur Chrétien de Troyes et son Conte du Graal, qui est un des textes fondateurs de notre littérature.

    Ce Conte s'inscrit dans la tradition des chansons de geste : il s'agit de longs poèmes chantés célébrant la «geste» d'un héros (le mot vient du latin gesta qui désigne un exploit).

    Lui-même compte pas moins de 9.000 octosyllabes (vers de huit syllabes) dans la version inachevée qui nous est parvenue !

    Destiné à être chanté devant le public aristocratique de la cour de Marie de Champagne, fille d'Aliénor d'Aquitaine, il a été écrit non en latin, la langue savante de l'époque, mais en langue romane, la langue de tous les jours, qui a donné le nom à nos «romans» et d'où dérive l'actuelle langue française. 

    Voici donc la grande nouveauté : Chrétien de Troyes est le premier à avoir écrit en langue vulgaire des œuvres qui invitaient aussi à la lecture silencieuse. Le Conte du Graal n'est pas un conte, au sens moderne du mot, mais une histoire «contée», et un des premiers romans français !

    Bibliographie

    Je me suis inspirée pour cet article des sources suivantes : Le Roi Arthur, une légende en devenir (Somogy, «Les Champs libres», 2008), Moyen Âge, 1050-1486 (Emmanuèle Baumgartner, Bordas, «Histoire de la littérature française», 1988), Arthur et la Table Ronde. La force d'une légende (Anne Berthelot, Gallimard, «Découvertes», 1996), Mythes et réalités, histoire du roi Arthur (Christine Ferlampin-Acher et Denis Hüe, Ouest-France, collection «Histoire», 2009),
    Le Grand livre du roi Arthur (Claudine Glot, Ouest-France, 2003),
    La Société médiévale. Codes, rituels et symboles (François Icher, La Martinière, 2000).

    Extrait : l'apparition du graal

    Perceval a accepté l'hospitalité du roi Pêcheur...

    Tandis qu'ils parlaient de choses et d'autres, un jeune homme sort d'une chambre, porteur d'une lance à l'éclatante blancheur qu'il tenait par le milieu de la hampe ; il passe entre le feu et ceux qui se tenaient assis sur le lit. Tous ceux qui étaient là pouvaient voir la blancheur éclatante de la lance et de son fer. Une goutte de sang perlait à la pointe de la lance, et jusqu'à la main du jeune homme coulait cette goutte vermeille. Notre jeune homme, arrivé le soir même, vit cet étonnant spectacle mais il se retint de demander comment cela pouvait se produire, car il se souvenait de la recommandation reçue de celui qui l'avait armé chevalier : il lui avait enjoint de se garder de tout excès de parole. Aussi craint-il, s'il pose une question, de se le voir imputer à grossièreté, et pour cette raison, il ne la pose pas.

    Alors parurent deux autres jeunes gens tenant des chandeliers d'or pur, finement niellés. Ces jeunes gens, qui portaient les chandeliers, étaient d'une grande beauté. Sur chaque chandelier brûlaient pour le moins dix chandelles. Tenant un graal de ses deux mains, une demoiselle s'avançait avec les jeunes gens, belle, gracieuse et élégamment parée. Quand elle fut entrée avec le graal qu'elle tenait, il s'en dégagea une si grande clarté que les chandelles en perdirent leur éclat, comme les étoiles et la lune au lever du soleil. Après la demoiselle en venait une autre qui portait un plat à découper en argent. Le graal, qui se présentait en tête du cortège, était de l'or le plus pur et serti de toutes sortes de pierres précieuses, les plus riches et les plus rares qui soient sur terre ou dans les mers. Elles avaient, sans nul doute, plus de valeur qu'aucune autre, ces pierres qui ornaient le graal. Tout comme la lance, le reste du cortège passa devant le jeune homme pour aller d'une chambre à l'autre. Il le vit passer mais il n'osa pas demander, à propos du graal, à qui l'on en faisait le service, car il gardait toujours présente à l'esprit la recommandation du noble et sage seigneur.

    Traduction en français moderne par Jacques Ribard, éd. Honoré Champion, 1983

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    LA LEGENDE DU PERE NOËL

     

    LA LEGENDE DU PERE NOËL

     

    Plusieurs parents, se demandent quoi dire
    Ils ne veulent surtout pas leur mentir
    Le Père Noël dites-moi, est-ce vrai?
    Jusqu’à quel âge, on ne le sait jamais

    Aucun document ne vient les guider
    Les parents ne se sentent pas appuyés
    Il leur faut pourtant dire la vérité
    Le Père Noël fait partie de notre société

    Il nourrit l’imaginaire des enfants
    Puis fait sourire de nombreux parents
    Tous, on aime les histoires de Noël
    C’est un moment, ou on se les rappelle

    Le Père Noël est bon, toujours souriant
    Il fait partie des souvenirs d’un enfant
    Y croire pour l’enfant, c’est croire à la magie
    C’est lui donner de l’espoir en la vie

    C’est lui apprendre qu’il peut rêver aussi
    À toutes ces choses qui sont bonnes pour lui
    Car Noël, c’est un moment de transitions
    Un moment, pour transmettre nos traditions

    Celui de préparer son cœur au plaisir
    Et stimuler la montée de ses désirs
    C’est aussi, le moment de faire un vœu
    On a tous enfin, envie d’être heureux


    Claude Marcel Breault

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    Valentine, allongée sur la moquette, écrit dans son cahier. En tirant la langue, elle forme lentement ses lettres sur la page blanche. « Cher Père Noël. J'espère que tu vas bien... »
    Mais Valentine n'a que six ans, et la suite est bien difficile à rédiger. Elle arrache soudain la page du cahier et la froisse rageusement.
    - Je n'y arriverai jamais toute seule !
    Et Valentine, bras croisés, se met à bouder.
    C'est alors que son œil noir tombe sur le téléphone mural de l'entrée.
    - Si je ne peux pas lui écrire, eh bien, je vais lui téléphoner, dit-elle.
    Valentine grimpe sur une chaise, décroche le combiné et pianote sur les touches
    - D'abord le 0 - 1, pour avoir le ciel...
    Valentine compose ensuite les lettres P/ E / R / E... N/ O/ E / L.
    - Oui, j'écoute, dit une grosse voix à l'autre bout du fil.
    - Allô, Père Noël, crie joyeusement Valentine, c'est moi ! 
    Il y a un long silence, puis la voix demande :
    - Qui est à l'appareil ?
    - Ben, c'est Valentine ! C'est toi, Père Noël ?
    - Qui demandez-vous ? 
    « Mais ce n'est pas possible, se dit Valentine, ce vieux est complètement sourd ! »

     


    Aussi hurle-t-elle à nouveau dans l'appareil :
    - Allô ! Allô ! Je suis bien chez le Père Noël ?
    L'homme semble enfin comprendre.
    - Ah oui, bien sûr, bien sûr ! Ici le Père Noël ! Mais dis-moi, petite, comment as-tu trouvé mon numéro ? 
    - C'te blague, répond Valentine, j'ai composé ton nom sur le cadran du téléphone ! 
    L'homme, à l'autre bout du fil, rit de bon cœur.
    - Père Noël, j'aimerais une grosse peluche que je pourrais serrer contre moi, la nuit, quand j'ai peur, seule dans mon lit...
    - Une peluche? Bien, bien, répond l'homme, amusé. Mais ... tes parents... ?
    - J'ai pas de parents, répond Valentine. Ici, c'est un foyer, Les Primevères, tu connais ? J'habite avec plein d'autres enfants, et mon éducatrice s'appelle Barbara.
    À l'autre bout du fil, le " Père Noël " reste un moment silencieux.
    - T'es toujours là ? demande Valentine, inquiète.
    - Oui, oui, mon petit... Je... je note dans mon grand livre ; « Ne pas oublier, au foyer Les Primevères, une grosse peluche pour Valentine.


    - Et pour mes copines aussi ! l'interrompt Valentine.

    - Pour Valentine... et ses copines, bien sûr ! Au revoir, mon petit.
    Valentine repose lentement le combiné. Elle a le cœur qui bat très fort.

    - J'ai parlé au Père Noël. Et... le Père Noël m'a parlé... Et il m'a dit... 
    Machinalement, elle passe plusieurs fois sa langue sur ses lèvres, comme un chaton qui se pourlèche tes babines.
    - Ce sera mon secret, murmure Valentine. Je n'en parlerai à personne, pas même à Aurélie, qui est pourtant ma meilleure copine.
    Elle compte lentement le nombre de jours qui restent avant Noël :
    - Trois, quatre, cinq... Cinq ? Chouette ! Plus qu'une main à attendre, s'écrie-t-elle, ravie.
    Au matin du 25 décembre, dans le dortoir des Marmottes, Valentine est la première à ouvrir les yeux.
    - Ma peluche ! s'écrie-t-elle, jaillissant comme un diable de sous les couvertures.
    Elle court de lit en lit réveiller ses copines.
    - Aurélie ! Laïla ! Fatoumata ! Levez-vous ! Le Père Noël est passé !
    - Ça va pas la tête ! Il fait encore nuit ! gémit' Aurélie.
    - Laisse-nous dormir ! proteste Fatoumata.
    - Pour ce qu'ils sont beaux, les cadeaux du foyer, grogne Laïla en replongeant sous les couvertures. Valentine les secoue comme des pruniers :
    - Debout ! Debout ! Debout ! J'ai parlé personnellement au Père Noël,
    leur apprend Valentine.
    - Je ne te croîs pas ! dit Aurélie en sautant de son lit.
    - Si, si ! Il a promis une peluche pour nous toutes.
    Les petits pieds nus descendent l'escalier quatre à quatre.
    En pénétrant dans le grand réfectoire, les fillettes restent figées d'émerveillement.


    Au pied du sapin illuminé, un gros chien blanc, ta langue pendante, attend, sagement assis sur son derrière. Accroché à son collier, il a une pancarte sur laquelle est écrit :
    « Je m'appelle Pattemouille... Joyeux Noël, les filles ! »
    - Whouaf, whouaf, whouaf ! aboie joyeusement l'énorme boute de poils blancs en levant une patte pour les saluer.
    - Une peluche pour de vrai !
    Valentine et ses copines se précipitent sur le magnifique
    chien de berger à poils longs, l'embrassent, l'étouffent
    de caresses.
    - Joyeux Noël, Pattemouille !

    Depuis, au foyer Les Primevères, quand un nouveau, pour faire le malin, déclare avec assurance :
    « Eh, vous savez quoi ? Eh ben, le Père Noël, ça n'existe pas ! » 
    Tous les gosses du foyer éclatent de rire :
    - Oh lui, hé ! Sûr qu'il existe ! Même que Valentine, eh ben, elle a son numéro !

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    Conte:  Pas de Noël cette année

     

    J’ai un terrible secret à vous confier :
    Cette année, le Père Noël refuse de faire sa tournée des cadeaux ! Il fallait absolument comprendre ce qui se passait et intervenir rapidement... Alors, voilà, j'ai décidé d'aller voir le Père Noël chez lui. J'ai marché vers le Nord, toujours plus haut... J'avais de plus en plus froid. À chaque pays, je rajoutais une écharpe, un bonnet, des gants, des chaussettes... J'avais mal aux pieds, mais j'ai continué, sans m'arrêter, jusqu'au pays des Esquimaux.


    La, j'ai demandé à des pêcheurs de phoques :
    « S'il vous plaît, où est la maison du Père Noël ? »
    Mais ils ne comprenaient rien et je ne connaissais pas leur langue. J'ai dû leur mimer ma question, le plus dur, c'était « s'il vous plaît » Pour leur faire comprendre " Père Noël . Je le décrivais avec des gestes : sa barbe, son bonnet, son gros ventre et sa hotte pleine de cadeaux, son sourire aussi... J'avais l'air bête. Les pêcheurs riaient, riaient sans pouvoir s'arrêter. A la fin, ils sont partis et je n'en savais pas plus. Alors, je me suis assis sur un gros bloc de glace et pour la première fois depuis que j'étais parti, j'ai désespéré de jamais trouver le Père Noël...


    Je ne savais vraiment plus quoi faire et, machinalement, je tirais les bouloches en laine de mon écharpe rouge. Pendant ce temps, Je ne m'apercevais pas que la glace sur laquelle j'étais assis fondait, fondait à cause, il faut bien le dire, de la chaleur de mon derrière !... Tout à coup, je me suis levé et qu'est-ce que j'ai aperçu à travers la glace transparente ? Coincé dedans, gelé dedans, un œil à moitié ouvert, la barbe hirsute et le bonnet de travers ? Oui, c'était bien lui :
    Le Père Noël tout congelé ! Alors j'ai soufflé sur la glace pour qu'elle fonde complètement et avec l'aide des Esquimaux, nous avons réchauffé le vieux bonhomme. Il m'a expliqué qu'à force de pleurer, ses larmes avaient gelé autour de lui et que c'était pour ça qu'il était resté coincé dans la banquise.


    - J'en ai assez, dit le Père Noël. Je suis fatigué et tellement vieux que je ne connais même plus mon âge. Je ne veux plus faire ma tournée, avec ces milliers de cheminées à descendre et ces enfants capricieux qui, parfois, cassent leur jouet... On m'adore au mois de décembre et le reste de l'année, personne ne pense plus à moi, pfuit, aux oubliettes ! ... J'aimerais qu'ils m'offrent un petit quelque chose, un dessin, un coquillage, je n'ai jamais vu de coquillage, moi... ou qu'ils me donnent des nouvelles au moins! Il s'est mis à pleurer comme un tout petit enfant. J'étais triste et j'ai balbutié :
    - Mais moi, Père Noël, moi je suis venu et je vous donne mon écharpe rouge qui fait des bouloches, regardez Père Noël, c'est amusant les bouloches, ça occupe les mains.
    Alors on a commencé à rigoler tous les deux, à se lancer des bouloches et à se faire des chatouilles... Et puis j'ai dit :


    - Père Noël, il faut que vous apportiez leurs cadeaux aux enfants, II y en a de si petits, de si malheureux, il y en a même à l'hôpital... Je vous promets qu'ils vont vous écrire... en mars ou en juillet... S'il vous plaît, père Noël.
    - Je vais réfléchir, me dit-il. Il faut que tu rentres chez toi maintenant. Il m'a prêté son traîneau super-rapide, je le voyais en bas qui tirait sur les bouloches, il était un petit point rouge, un tout petit point, tellement important.
    Les enfants, j'espère que j'ai réussi à le convaincre et que Noël aura bien lieu cette année, mais je vous en supplie, ne l'oubliez pas après Noël... Il compte sur vous.

     
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