• Patrimoine français: Ménerbes : la passion Lubéron

     

    Ménerbes : la passion Lubéron

     

    Par Sophie Denis
     
     
    source : Détours en France HS 12 - Les villages préférés de nos régions
     
     
     

    Parmi les villages du Luberon qui rivalisent de charme ensoleillé pour mieux séduire les visiteurs, Ménerbes est peut-être le plus secret. Long vaisseau de pierre enchâssé sur un promontoire rocheux, il a séduit de nombreux artistes et écrivains, dont Picasso et Peter Mayle. Ses ruelles rafraîchissantes et ses demeures nobles, aujourd’hui si accueillantes, ont connu jadis des épisodes mouvementés.

     

     

    Ménerbes, vue d'ensemble du village
     
     

    Parmi les villages du Luberon qui rivalisent de charme ensoleillé pour mieux séduire les visiteurs, Ménerbes est peut-être le plus secret. Long vaisseau de pierre enchâssé sur un promontoire rocheux, il a séduit de nombreux artistes et écrivains, dont Picasso et Peter Mayle. Ses ruelles rafraîchissantes et ses demeures nobles, aujourd’hui si accueillantes, ont connu jadis des épisodes mouvementés.

     

    Ménerbes a décroché la troisième place du podium de l'édition 2020 de l'émission « Le village préféré des Français»

     

    Quel est le point commun entre Nostradamus, Nicolas de Stäel, Pablo Picasso, François Nourissier et Peter Mayle ? Ménerbes. Ils l’ont habité, peint, raconté ou simplement aimé. « Navire dans un océan de vignes » pour Nostradamus, Ménerbes a abrité la dernière maison chère au coeur de l’écrivain François Nourissier, une de ses « maisons mélancolie » comme il les appelait. Il a aussi été le héros bien malgré lui d’Une année en Provence, roman mondialement connu de l’Anglais Peter Mayle, qui par le biais de sa plume trempée dans l’humour british, le transforma en village d’irréductibles Gaulois, à la sauce provençale.

     

    Ménerbes, vue d'ensemble

     

    Le tsunami déclenché par le best-seller est désormais un souvenir, mais Ménerbes reste aux yeux du monde l’archétype du village provençal : vaisseau de pierre chapeauté de tuiles, proue devant la citadelle et poupe à l’opposé, du côté du cimetière, il tutoie la montagne du Luberon depuis l’Antiquité. Ou peut-être même plus tôt, puisqu’on a découvert l’abri Soubeyras, du paléolithique supérieur à moins de 4 kilomètres vers le village de Beaumettes, et le dolmen de la Pitchoune, daté de 2 500 ans avant notre ère, à 2 kilomètres à l’est.

     

    Un siège de cinq ans

     

    Parcours des villages perchés du Lubéron à Ménerbes

     

    Vu d’en bas, le village impressionne toujours, avec ses façades ocre au corps-à-corps avec la pierre, et la silhouette orgueilleuse de la citadelle, plantée sur un rocher à pic. On sent que Ménerbes a eu par le passé l’âme guerrière, loin de l’image charmante des ateliers d’artistes et des pastis pris en terrasse devant les cafés aux volets bleus : la faute à son nom, qui vient de Minerve, déesse romaine des conflits ? Ménerbes a eu l’occasion de mériter son nom pendant les guerres de Religion. À l’époque fidèle au pape, qui avait remercié les habitants en les dispensant de certaines taxes seigneuriales, le village est conquis par 150 huguenots, commandés par un certain Scipion de Valavoire, en 1573. Les catholiques ripostent en mettant le siège avec… 15 000 hommes ! Il leur faudra quand même cinq ans et plus de 900 coups de canon pour récupérer Ménerbes…

     

    Le sacre de Clovis

     

    Une école porte son nom, un monument orné de son buste lui est dédié, rue du Maupas : Clovis Hugues est un enfant de Ménerbes. Si aujourd’hui on a oublié son nom, il eut son heure de gloire. Né en 1851 dans le village, fils d’un meunier, il se lança dans la carrière politique suite à la Commune de Marseille et fut le premier député du P.O.F, parti ouvrier français. Admirateur de Victor Hugo, il était aussi poète et félibre de Frédéric Mistral. Ses prises de position politique lui attirèrent la haine d’une comtesse, qui tenta de le déstabiliser en déshonorant sa femme, la sculptrice Jeanne Royannez, via un homme de paille. Celle-ci finit par abattre le délateur, et fut acquittée. Une histoire mouvementée, racontée en 1962 par Gérard Oury dans Le Crime ne paie pas, avec Michèle Morgan et Philippe Noiret !

     

    C’est à sa situation escarpée que le village doit d’avoir tenu si longtemps ; et aussi aux galeries souterraines dont son sol est truffé, qui ont sans doute permis aux habitants de se ravitailler à la barbe des catholiques. Par bonheur, le siège n’a pas détruit le village, à l’exception d’une tour de défense dite la Cornille. Vous avez donc tout loisir de grimper au gré de ses ruelles pour découvrir son patrimoine riche d’hôtels particuliers des XVIIe siècle et de maisons Renaissance, pomponnées sans ostentation et habillées de pierre patinée par le soleil.

     

    Ruelle de Ménerbes

     

    Pas de tape-à-l’oeil ici, tout respire l’harmonie paisible : le fracas des armes s’est éteint, on écoute le chuchotement d’une fontaine, on remarque un linteau gravé, une fenêtre Renaissance, on savoure la fraîcheur d’une treille, la modestie d’un clocheton. La perspective d’une ruelle offre une échappée sur le beffroi (XVIe siècle) et son campanile de fer forgé surmonté de cinq croix.

     

     

    La dernière demeure d'un comte danois 

     

    Au passage, on admire la chapelle Saint-Blaise, édifiée au XVIIIe siècle par des Pénitents blancs. Sur son tympan abîmé, on peut encore distinguer deux moines agenouillés devant une croix. L’intérieur conserve un plafond sculpté et peint, une rareté dans la région. La citadelle a fière allure mais n’a pas connu le siège de Ménerbes, car construite juste après. Aujourd’hui domaine privé, elle ne se visite pas. À côté, l’hôtel de Tingry, du XVIIIe siècle, fut la maison de campagne d’une puissante famille d’Avignon, les Laurents. La dernière héritière épousa un prince de Tingry et hébergea entre 1781 et 1789 le comte de Rantzau : ce capitaine du roi du Danemark s’exila en Provence après avoir comploté contre la reine de son pays. Il est enterré dans le jardin de la citadelle.

     

    L'ancien hôtel d'Astier de Montfaucon à Ménerbes

     

    L'ancien hôtel d'Astier de Montfaucaon, construit au XVIIe et au XVIIIe siècle, devenu maison de la Truffe et du Vin.

     

    Avant d’arriver à la mairie, voici la maison de Dora Maar : à la fin de la Seconde Guerre mondiale, Picasso acheta l’ancienne demeure du baron d’Empire Louis Benoît Robert pour l’offrir à cette photographe, qui fut aussi sa muse. Elle est aujourd’hui devenue une résidence d’artistes. En face de la mairie, l’hôtel d’Astier de Montfaucon, du XVIIe siècle, fut un hospice puis une école de garçons avant d’abriter la maison de la Truffe et du Vin, deux gloires gourmandes du Luberon. Profitez-en pour visiter le bel hôtel particulier et profiter de sa terrasse pour un déjeuner ou une dégustation avec vue sur les vignes.

     

    Le souvenir d'un passé guerrier 

     

    En poursuivant votre chemin en direction du cimetière, vous allez croiser la porte Saint-Sauveur, du XVIe siècle. Elle est la rescapée des deux qui gardaient autrefois le village et dont on retrouve le souvenir sur les armes de la ville, représentées par deux clés, comme sur le beffroi. À côté, la Carméjane est une des plus belles demeures de Ménerbes, reconstruite au XVIIIe siècle par une vieille famille du village. Sa façade raconte son histoire, avec des emprunts au Moyen Âge, des fenêtres de la Renaissance, un balcon en encorbellement et une échauguette.

     

    L'abbaye Saint-Hilaire à Ménerbes

     

    L'abbaye Saint-Hilaire, bâtiment conventuel carme du XIIIe siècle, en partie troglotytique, abrite des trésors : une remarquable fresque du XVe siècle de la chapelle latérale, l'escalier à cage cylindrique du XVe sicèle dans la tour du clocher du cloître, entre autres merveilles. 

     

    Campée au bout du promontoire, l’austère église Saint-Luc porte sur son campanile la date de 1594 . Elle fut rebâtie après les guerres de Religion, à l’emplacement d’un ancien prieuré Saint-Sauveur. En contrebas du cimetière attenant, le Castelet garde le souvenir de son passé guerrier, quand il servait d’avant-poste à la citadelle ; il devint ensuite demeure de plaisance de la famille de Staël, le peintre Nicolas y a séjourné.

     

    En dessous du village, la chapelle Notre-Dame-des-Grâces offre sur les toits d’où émerge le beffroi une bien jolie vue. Reconstruite en 1720 par les habitants en action de grâce pour avoir épargné la peste au village, elle contient un triptyque et des peintures murales de Georges de Pogédaïeff, un peintre russe qui a entrepris en 1955 sa restauration.

     

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