•     L'ÉTÉ                      

    Un sphinx m'a dit bonjour de ses ailes de velours.
    La libellule s'envole sur les berges de roseaux,
    Tandis que l'alouette égrène son chant d'amour
    Réveillant dame chouette qui bougonne en sursaut.

     
    Maman chevreuil présente son fils tout tacheté
    A la forêt, tandis que le roux martin-pêcheur
    Donne une leçon d'envol à sa dernière couvée,
    Perchée au bord du nid, elle tremble de tout son coeur !

     
    Dans la plaine irradiée, le soleil monte au zénith,
    Obligeant les animaux à chercher de l'ombre
    Dédaignant la mare où les grenouilles vous invitent,
    A venir les rejoindre dans les belles eaux profondes...
     
    Une chaleur étouffante règne au milieu des terres
    Quand une brise soudaine prosterne tous les blés,
    Un éclair précède le grondement du tonnerre.
    Un orage se prépare, il faut tout rassembler.

     
    Soleil qui nourrit et fait grandir toutes choses,
    Complice de nos vacances, tu remplis notre vie,
    D'instants merveilleux qui changent la vie en rose,
    Au lieu du quotidien qui trop vite resurgit.

     
    Les plages sont désertes, c'est la fin de l'été,
    Vacanciers et flâneurs sont retournés en ville :
    L'âme débordant d'espaces, d'air pur, de liberté...
    Premier amour, premiers baisers tendres et subtils ...

       

    (Jean-Claude Brinette)


    votre commentaire
  • La Rose  (Pierre de Ronsard : 1524 - 1585)

          Mignonne, allons voir si la rose
          Qui ce matin avait éclose
          Sa robe de pourpre au soleil
          A point perdu cette vêprée
          Les plis de sa robe pourprée
          Et son teint au vôtre pareil.

     
          Las ! voyez comme en peu d'espace,    
          Mignonne, elle a dessus la place,
          Las, las ! ses beautés laissé choir !
          O vraiment marâtre Nature
          Puisqu'une telle fleur ne dure
          Que du matin jusque au soir !

     
          Donc si vous me croyez, mignonne,
          Tandis que votre âge fleuronne
          En sa plus verte nouveauté,
          Cueillez, cueillez votre jeunesse :
          Comme à cette fleur la vieillesse
          Fera ternir votre beauté.
    Pin It

    votre commentaire
  •  

      Le lac  (Alphonse Lamartine)

    Ainsi toujours poussés vers de nouveaux rivages,
    Dans la nuit éternelle emportés sans retour,
    Ne pourrons-nous jamais sur l'océan des âges
              Jeter l'ancre d'un seul jour ?

     
    O Lac ! l'année à peine a fini sa carrière
    Et près des flots chéris qu'elle devait revoir
    Regarde je viens seul m'asseoir sur cette pierre
              Où tu la vis s'asseoir !

     
    Tu mugissais ainsi sous ces roches profondes,
    Ainsi tu te brisais sur leurs flancs déchirés,
    Ainsi le vent jetait l'écume de tes ondes
              Sur ses pieds adorés.

     
    Un soir t'en souvient-il ? nous voguions en silence ;
    On n'entendait au loin, sur l'onde et sous les cieux,
    Que le bruit des rameurs qui frappaient en cadence
              Tes flots harmonieux.

     
    Tout à coup des accents inconnus à la terre
    Du rivage charmé frappèrent les échos :
    Le flot attentif et la voix qui m'est chère
              Laissa tomber ces mots :

     
    O temps ! suspends ton vol, et vous heures propices !  
              Suspendez votre cours :
    Laissez-nous savourer les rapides délices
              Des plus beaux de nos jours !

     
    Assez de malheureux ici-bas vous implorent,
              Coulez, coulez pour eux ;
    Prenez avec leurs jours les soins qui les dévorent,
              Oubliez les heureux.

     
    Mais je demande en vain quelques moments encore,
              Le temps m'échappe et fuit ;
    Je dis à cette nuit : sois plus lente et l'aurore
              Va dissiper la nuit

     
    " Aimons donc, aimons donc ! de l'heure fugitive,
              Hâtons-nous, jouissons !
    L'homme n'a point de port, le temps n'a point de rive ;
              Il coule, et nous passons ! "

     
    Temps jaloux, se peut' il que ces moments d'ivresse
    Où l'amour à longs flots nous verse le bonheur,
    S'envolent loin de nous de la même vitesse
              Que les jours de malheur ?

     
    Eternité, néant, passé, sombres abîmes,
    Que faites-vous des jours que vous engloutissez ?
    Parlez : nous rendrez-vous ces extases sublimes
              Que vous nous ravissez ?

     
    O lac ! rochers muets ! grottes ! forêts obscures !
    Vous, que le temps épargne ou qu'il peut rajeunir,
    Gardez de cette nuit, gardez belle nature,
              Au moins le souvenir !

     
    Que le vent qui gémit, le roseau qui soupire,
    Que les parfums légers de ton air embaumé,
    Que tout ce qu'on entend, l'on voit ou l'on respire,
              Tout dise : Ils ont aimé !

    Pin It

    votre commentaire
  •  

                                                                La vieille maison abandonnée  (Alphonse Lamartine)                            

    Le mur est gris, la tuile est rousse,
    L'hiver a rongé le ciment ;
    Des pierres disjointes la mousse
    Verdit l'humide fondement

     
    La porte où file l'araignée,
    Qui n'entend plus le doux accueil,
    Reste immobile et dédaignée
    Et ne tourne plus sur son seuil.

     
    Les volets que le moineau souille
    Détachés de leurs gonds de rouille,
    Battent nuit et jour le granit,
    Les vitraux brisés par les grêles
    Livrent aux hirondelles
    Un libre passage à leur nid !

     
    De la solitaire demeure
    Une ombre lourde d'heure en heure
    Se détache sur le gazon :
    Et cette ombre, couchée et morte,
    Est la seule chose qui sorte
    Tout le jour de cette maison !

     
    A l'heure où la rosée s'évapore
    Tous ces volets fermés s'ouvraient à sa chaleur,   
    Pour y laisser entrer, avec la tiède aurore,
    Les nocturnes parfums de nos vignes en fleur.

     
    La mère de sa couche à ces doux bruits levée,
    Sur ces fronts inégaux se penchait tour à tour,
    Comme la poule heureuse assemble sa couvée,
    Leur apprenant les mots qui bénissent le jour.

     
    Moins de balbutiements sortent du nid sonore,
    Quand au rayon d'été qui vient la réveiller,
    L'hirondelle au plafond qui les abrite encore,
    A ses petits sans plume apprend à gazouiller.

     
    Et les bruits du foyer que l'aube fait renaître,
    Montaient avec le jour, et dans les intervalles,
    Des aboiements du chien qui voit sortir son maître
    Les Claviers résonnaient dans le chant des cigales.  
    Pin It

    votre commentaire
  •  

                               

       L'amour caché  (Félix Arvers 1806-1850)                    

     

    Mon âme a son secret, ma vie a son mystère
    Un amour éternel en un moment conçu :
    Le mal est sans espoir, aussi j'ai dû le taire,
    Et celle qui l'a fait n'en a jamais rien su.

     
    Hélas! j'aurai passé près d'elle inaperçu,
    Toujours à ses côtés et pourtant solitaire ;
    Et j'aurai jusqu'au bout fait mon temps sur la terre,
    N'osant rien demander et n'ayant rien reçu.

     
    Pour elle, quoique Dieu l'ait faite douce et tendre,
    Elle suit son chemin, distraite et sans entendre
    Ce murmure d'amour élevé sur ses pas.

     
    A l'austère devoir pieusement fidèle,
    Elle dira, lisant ces vers tout remplis d'elle :
    " Quelle est donc cette femme ? " Et ne comprendra pas
    Pin It

    votre commentaire


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique