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    19 novembre 1703

     

    La légende du Masque de fer

     

     

    À la fin du règne de Louis XIV, le 19 novembre 1703, un mystérieux prisonnier meurt à la Bastille (Paris). Il est enterré quelques jours plus tard sous le nom de Marchiali dans le cimetière Saint-Paul.

    Cet homme d'une cinquantaine d'années aurait vécu en prison pendant deux ou trois décennies, d'abord à Pignerol, une forteresse alpine située entre Briançon et Turin, jusqu'en 1681.

    Là-dessus, il aurait été transféré au fort d'Exiles, dans le Piémont, jusqu'en 1687, puis à Sainte-Marguerite de Lérins jusqu'en 1698, enfin à la Bastille... toujours sous la surveillance du même geôlier, Bénigne Dauvergne, dit Monsieur de Saint-Mars, ancien mousquetaire !

    Huit ans après sa mort, la princesse Palatine, belle-soeur du roi de France, le fait sortir de l'anonymat en le présentant dans sa correspondance comme un milord anglais qui aurait comploté contre la France...

    La légende

    La littérature et la légende vont s'emparer du personnage et le rendre célèbre sous le surnom de «Masque de fer» car nul n'a jamais pu voir son visage caché par un masque de velours noir (et non de fer).

    Son identité ne tarde pas à susciter bien des hypothèses. Est-il le frère jumeau de Louis XIV, comme l'a prétendu Voltaire ? ou le fils adultérin d'Anne d'Autriche et du duc de Buckingham ? Est-il, comme le croient d'autres, le duc de Beaufort ? un bâtard du roi Charles II d'Angleterre ? le comte de Vermandois ? le surintendant Fouquet  ? Est-il... ?

    Avec son talent coutumier, Alexandre Dumas a fait revivre dans Le vicomte de Bragelonne l'hypothèse d'un frère jumeau de Louis XIV né huit heures après ce dernier.

     

    Le masque de fer, vu par Alexandre Dumas

    Enfin la vérité ?

    Dans Le Masque de fer (Tempus), l'historien Jean-Christian Petitfils évoque l'hypothèse d'un certain Eustache Danger, valet de son état, mis au secret pour ne pas dévoiler la conversion secrète du roi Charles II d'Angleterre au catholicisme.

    Monsieur de Saint-Mars, fâché de n'avoir plus qu'un valet à garder après eu sous sa férule le surintendant Fouquet et le duc de Lauzun, aurait lui-même monté la mystification du masque de fer pour se donner de l'importance...

    Cela dit, la plupart des historiens s'accordent aujourd'hui pour reconnaître dans le «Masque de fer» un agent double, le comte Ercole Mattioli (ou Antoine-Hercule Matthioli) en s'appuyant sur une lettre datée de 1770 et signée d'un certain baron Heiss.

    Secrétaire d'État du duc de Mantoue Charles IV de Gonzague, il aurait trahi son maître ainsi que le roi de France en révélant aux Espagnols des négociations secrètes relatives à l'acquisition par la France de la place forte de Casal. Louis XIV l'avait alors fait enlever à Venise et écrouer en 1669, en veillant toutefois à ce qu'il vive toujours dans une confortable aisance.

    Il n'est pas exclu qu'un domestique, tenté par cette vie de coq en pâte, ait bien voulu prendre la place du comte et permettre à celui-ci de reprendre sa liberté à l'insu de tous.

    Camille Vignolle

     

    Éphéméride du Jour 5:  La légende du Masque de fer - 19 novembre 1703

     

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    10 choses à faire absolument à Toulouse

     

    Par Léa Billon
     

    Il y a des incontournables dans ce chef-lieu de la Haute-Garonne. Alors pour ne pas passer à côté de la ville rose, voici notre liste des choses à ne surtout pas manquer !

    1 - Découvrir le Capitole

    Le Capitole de ToulouseSiège du pouvoir municipal depuis le XIIème siècle, ce chef d’œuvre néoclassique déploie sa majestueuse façade de briques et de pierres sur l’incontournable place du Capitole. Il a été agrandi, transformé, embelli au fil des époques. Les décors inscrits sur ses murs racontent les grands moments de l’histoire toulousaine : de l’épisode cathare à la création des Jeux floraux, des comtes de Toulouse au siège de la ville. Célèbre pour ses salles d’apparat ; ne manquez pas la Salle des Illustres : Henri Martin, Jean-Paul Laurens, Paul Gervais et bien d’autres artistes ont peint ou sculpté le décor de ces salles. Amateurs d’art lyrique ? Le Capitole, c’est aussi le célèbre opéra de Toulouse. 

    À faire au Capitole

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    • S’émerveiller des peintures, moulures et fastes des salles de réception du Capitole (1erétage de l’hôtel de Ville). 
    • Se prendre en photo sur la place du Capitole en se positionnant sur son signe astrologique sur la croix occitane de Raymond Moretti au sol au centre de la place.
    • Flâner sous les arcades de la Place du Capitole pour découvrir les 2000 ans d’art et d’Histoire de Toulouse via les peintures au plafond de la Galerue.
    • Boire au verre ou se restaurer dans la brasserie mythique « Le Bibent » classée par les monuments nationaux. 

    2 - Se refraîchir au bord de la Garonne

    Remerciements à Loic Bourniquel pour cette superbe photo !

    Quai de la Daurade à ToulouseDécouvrez le fleuve Garonne (idéal aussi pour faire un pique-nique) ou le Canal du Midi, classé par l’Unesco, à vélo ou en bateau ou le temps d’un jogging ou d'une activité aquatique ludique : bouée, paddle, wake board, ski nautique,...

    3 - Se découvrir une âme d’aviateur

    L’usine Airbus jean-Luc LagardèreMontez à bord d’avions de légende avec les visites du nouveau musée de l’aéronautique Aeroscopia (ouvert mi-janvier 2015) et de l’usine Airbus jean-Luc Lagardère où est produit le géant des airs, l’A380. Pour tout savoir sur les défis permanents rencontrés par Airbus, Let's Visit Airbus propose 3 circuits pour une visite guidée originale et attractive.

    4 - Prendre le temps d’une balade gourmande

    Navarre table d'hôtes à ToulouseDégustez les spécialités locales et régionales dans les marchés de Toulouse (attention, ils ne se tiennent que le matin, et jamais le lundi), notamment les marchés Victor Hugo et Des Carmes. Le 1er étage du marché Victor Hugo offre un panel de petits restaurants à ne pas manquer, ouverts uniquement pour le déjeuner, ils sont tous à des prix abordables et proposent des produits très frais. Le plus connu : Le louchebem (qui a son titre de maître-restaurateur). Ne pas manquer aussi le marché de Saint-Aubin qui se tient uniquement le dimanche matin (bourgeois bohème, ambiance de village, tout type de produits alimentaires, fleurs, prêt-à-porter, accessoires, volailles vendues vivantes, et même musiciens : très couru !)

    Les spécialités culinaires

    • La fameuse Saucisse de Toulouse avec son label « Véritable saucisse de Toulouse » 
    • L’incontournable cassoulet toulousain (à base de Haricots tarbais)
    • Les produits à base de canard et volaille (foie gras, magret, confit…)
    • Charcuterie à base de Porc Noir de Bigorre (du jambon blanc au chorizo) 
    • L’antique gâteau de voyage toulousain : le Fénétra 
    • Les cachous Lajaunie de Toulouse
    • Le gâteau régional le Pastis Gascon 
    • Les glaces de chez Octave 
    • Les fromages affinés de chez Xavier sur la place du marché Victor Hugo
    • Les Vins du Sud-Ouest (Fronton avec son cépage endémique La Négrette au goût de violette !, Gaillac, Cahors, Madiran, Côtes de Gascogne, etc…) sans oublier l’Armagnac.

    L'antique gâteau de voyage toulousain 

    Le Fénétra spécialité de Toulouse

    Composé de pâte d’amandes, de meringue et d’écorces de citron confites, le Fénétra est la spécialité gastronomique de Toulouse. Méconnu, ce gâteau aux origines gallo-romaines était consommé une fois par an, au mois de mars lors de la Férétralia, la fête des morts, où les Toulousains se rendaient en procession à la grande nécropole du sud de la ville. Il deviendra quelques années plus tard le dessert incontournable des repas de famille du dimanche. Une tradition qui va s’éteindre à l’entre-deux-guerres. Aujourd’hui et depuis 1963, la fête du Grand Fénétra a été remise au goût du jour. Chaque dernier week-end de juin, une grande fête, hommage à cette gourmandise, est organisée.

    Seules trois pâtisseries en vendent toute l’année.  À déguster principalement à la boutique Régals, aux pâtisseries la Bonbonnière et le Galonier. 

    Découvrez la recette du Fénétra sur le blog Gourmandise sans frontières.

    5 - Tout savoir sur la Violette

    Une violettePour déguster, sentir et tout savoir de la fleur emblématique la Violette de Toulouse (d’où son surnom de Cité des Violettes), rendez-vous à bord de la péniche Maison de la Violette. 

    6 - Déambuler de la Basilique St Sernin à l'exceptionnel Couvent des Jacobins

    La basilique Saint Sernin à Toulouse

    L'église Saint Sernin illumine le soir
    D'une fleur de corail que le soleil arrose

    Claude Nougaro

    Sur les chemins de Saint-Jacques de Compostelle, la basilique Saint-Sernin, chef d’œuvre d'art roman, est inscrite parmi les joyaux du patrimoine mondial (UNESCO). Élevée en l’honneur de Saint Saturnin (ou Sernin), premier évêque de Toulouse, sa construction s’est étalée du XIème au XIIIème siècle. Déambulez autour de l’édifice et admirez le chevet élégant, échelonné des chapelles jusqu’au clocher octogonal, caractéristique de l’architecture toulousaine. A l’intérieur, 5 amples nefs voûtées convergent vers le chœur et le baldaquin de bois doré et de marbre. Accédez aux cryptes et au tour des corps saints, trésor de reliques qui témoigne du prestigieux passé de cette église de pèlerinage.

    Couvent des Jacobins à ToulouseCouvent dominicain édifié à partir de 1229, les Jacobins constituent un témoignage exceptionnel du gothique méridional. Cette architecture de briques applique les principes élaborés pour les cathédrales du royaume de France. Son église abrite les reliques de Saint-Thomas d’Aquin. Entièrement rénové depuis mai 2015, il offre un superbe cloître, un « palmier » architectural inéditt, des jeux de reflet de vitraux superbes projetés sur les murs,... Le cloître, l’ancien réfectoire et la chapelle Saint-Antonin, escales de fraîcheur et de tranquillité, sont également des lieux dédiés à des concerts et des expositions.

    7 - ​Partir à la conquête de l’Univers à la Cité de l’espace

    La cité de l'espace à ToulouseExplorez l'espace de manière inédite et percez tous les secrets de l'univers. Avec le cinéma sur écran géant IMAX et le planétarium, plongez dans l'image et devenez le passager privilégié d'un voyage aux confins du cosmos : immersion totale garantie ! Le parc de 4 ha permet de découvrir la réplique grandeur nature de la fusée Ariane 5 (53 mètres de haut), du vaisseau Soyouz et du satellite d'observation de la terre ERS2. Vous pouvez pénétrer à bord de la station spatiale Mir avec tous ses équipements et vous imaginer astronaute. L'Astrojump met au défi vos capacités physiques en testant votre sens de l'équilibre, en défiant la gravité. Sauriez-vous marcher sur la Lune et sur la planète Mars ?

    Cet été, vivez des expériences spatiales hors du commun

    Profitez des jardins de la Cité de l’espace lors d’une belle soirée d’été et d’une nocturne, chaque jeudi, du 16 juillet au 27 août. Suivez les missions Rosetta et Curiosity avec l’exposition temporaire Explorations Extrêmes. Vivez des expériences sensorielles inédites : installez-vous dans un vaisseau Soyouz, marchez comme sur la Lune avec le Moon Runner ou observez le ciel au télescope dans la Coupole de l’Astronome. A la Cité de l’espace les expériences étonnantes sont multiples et adaptées à tous les curieux, adultes comme enfants (renseignements : www.cite-espace.com)

    8 - Faire une pause culturelle

    Musée des AugustinsEnvie d'une escapade culturelle ? À Toulouse vous avez rendez-vous avec l'art, l'Histoire, les sciences,... En famille ou entre amis, la culture est à la portée de tous dans les trois principaux musées de la ville (Les Augustins/beaux arts, Les Abattoirs/art moderne et contemporain, le Muséum d’Histoire Naturelle) et la Fondation Bemberg. 

    Les incontournables

    • Le musée des Augustins, notamment pour son installation artistique temporaire avec Jorge Pardo jusqu’à mi 2016.
    • Le musée des Abattoirs  pour son hommage à Picasso, en deux temps : jusqu’au 30 août 2015 – Picasso, les 50 ans d’un don (relatif au don de Picasso à la Ville de Toulouse d’un gigantesque rideau de scène de Théâtre ponctuellement exposé en raison de sa fragilité). Du 18 sept 2015 au 31 janvier 2016 – Picasso, Horizon mythologique.
    • Le Muséum – le musée plus visité de Toulouse fête ses 150 ans en 2015  ! Récemment ré-ouvert en 2008, complètement rénové, il dépoussière le concept de muséum et sert d’exemples aux muséums d’autres pays. Il inclut notamment un étonnant et inédit « mur des squelettes ».
    • La Fondation Bemberg  pour sa superbe collection permanente de tableaux de Bonnard (la plus importante d’Europe) et son exposition estivale sur les Majoliques italiennes ( 25- juin – 27 sept 2015). 

    9 - Marcher dans les pas des marchands de pastel

    L'hôtel d'Assézat à ToulouseChef d’œuvre de la renaissance classique, l’Hôtel d'Assézat fut édifié pour Pierre d’Assézat, marchand pastelier et capitoul de Toulouse. Suivez la visite guidée « Bleu pastel » (tous les mercredis de juillet et août) proposée par l’Office de Tourisme. Vous déambulez dans les ruelles du centre historique à la recherche des hôtels particuliers bâtis à l’âge d’or toulousain par les marchands pasteliers. À l’hôtel Delfau, découvrez l’incroyable alchimie en direct grâce à une démonstration de teinture. La visite s’achève sur les usages actuels de la célèbre plante grâce à une démonstration de teinture et une séance de découverte de ses vertus cosmétiques. La visite inclut l’incontournable Hôtel d’Assézat.

    10 - Supporter le stade Toulousain

    Supporters du stade ToulousainParticiper à un match de rugby du Stade Toulousain ! Jouer les supporters en rouge et noir ou, à défaut, participer à la visite du Stade proposée par l’OT Toulouse .  Suivez le guide et mettez vos pas dans ceux des joueurs mythiques de l'équipe. Après avoir évoqué en images l'histoire du rugby toulousain, parcourez le stade et découvrez les espaces d'entraînements, les tribunes et les loges, le mur et les coupes du palmarès (renseignements et réservation).

     

    Photos-Villes du Monde 2:  10 choses à faire absolument à Toulouse

     

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    16 novembre 1805

     

    Mungo Park disparaît en Afrique

     

     

    Du 16 novembre 1805 sont datées les dernières notes de voyage de Mungo Park.

    Cet Écossais tôt disparu est le premier Européen à visiter l'Afrique en qualité d'explorateur et d'anthropologue. De lui nous tenons l'essentiel de nos connaissances sur les sociétés noires d'avant la colonisation.

    Alban Dignat
     
     
    Précurseurs

    Les rares voyageurs qui ont précédé, comme Anselme d'Isalguier, originaire de Toulouse, et Léon l'Africain, originaire de Grenade, n'ont pas influé sur la perception qu'avaient les Européens de l'Afrique.

    À la fin du XVIIIe siècle, en 1788, un premier aventurier, l'Écossais James Bruce, part en Abyssinie (l'Éthiopie actuelle) à la recherche des mythiques sources du Nil. Mais à son retour, il ne suscite qu'indifférence.

    Du XVe au XVIIIe siècles, les Européens, à commencer par les Portugais, s'en tiennent à des établissements côtiers où ils troquaient leurs marchandises contre de l'ivoire et des esclaves avec les chefs de l'intérieur. La difficulté d'accostage des navires, l'insalubrité des côtes infestées de moustiques et la pauvreté d'ensemble du continent les dissuadent de s'aventurer plus avant.

    Les explorations de l'Afrique (1795-1885)

     

    Éphéméride du Jour 5:  Mungo Park disparaît en Afrique - 16 novembre 1805

     

    Éphéméride du Jour 5:  Mungo Park disparaît en Afrique - 16 novembre 1805

     

     

    L'Afrique noire est le dernier continent à avoir été pénétré par les Européens, ceux-ci ayant été longtemps rebutés par les fièvres.

    Après les pionniers du début du XIXe siècle et la conférence de géographie de Bruxelles (1876) viendront les aventuriers et les conquérants au service des États européens...
     

    Le découvreur de l'Afrique
     

    Mungo Park naît à Foulshiels (Selkirkshire, Écosse) le 20 septembre 1771.

    Jeune chirurgien, il est engagé sur le Worcester pour un premier voyage qui le mène à Sumatra. Il en tire une description qui lui vaut d'être engagé par l'African Association pour reconnaître la région du Niger, en Afrique occidentale. C'est ainsi qu'à 24 ans, en 1795, il part tout seul en mission en Afrique.

    Il remonte le fleuve Gambie, au milieu du Sénégal actuel, jusqu'à l'ultime poste britannique, à 200 miles en amont. De là, il s'engage vers l'intérieur seulement accompagné de deux serviteurs noirs. Les péripéties foisonnent. Ainsi est-il capturé par un chef maure et réussit-il à s'enfuir au bout de quatre mois.

    Le 21 juillet 1796, il atteint le fleuve Niger à Segou. Pour le retour, il suit une route plus au sud. Malade, il doit à la bienveillance d'un chef noir de pouvoir se rétablir pendant sept longs mois. Enfin, le 22 décembre 1797, le voilà de retour en Grande-Bretagne après un crochet par... l'Amérique (dans le commerce triangulaire, aucun navire ne revenait directement d'Afrique en Europe).

    Le récit de son expédition, sous le titre : Voyage à l'intérieur de l'Afrique, lui vaut une immense popularité.

    L'explorateur peut dès lors songer à se marier. Il s'établit avec sa femme dans son village natal. Mais le démon de l'aventure le reprend quand, à l'automne 1803, le gouvernement l'invite à repartir pour le Niger, cette fois à la tête d'une imposante expédition.

    Il a soin cette fois-ci d'apprendre l'arabe.

    L'expédition quitte le port de Portsmouth pour la Gambie le 31 janvier 1805. Mais, trop lourde et encombrée, elle n'atteint le Niger qu'en août de la même année. Plusieurs Européens ont déjà succombé aux fièvres ou à la dysenterie.

    Mungo Park décide alors de descendre le cours du fleuve avec un bateau. Celui-ci, construit tant bien que mal avec les moyens locaux, est baptisé « Joliba », nom indigène du Niger.

    Avant de larguer les amarres, le jeune Écossais confie à Isaac, un guide mandingue (tribu locale), des lettres pour l'Angleterre et au Colonial Office où il précise ses intentions : « J'irai vers l'Est avec la ferme résolution de découvrir l'embouchure du Niger ou de périr... Bien que tous les Européens qui m'accompagnent soient déjà morts ou sur le point de mourir et que je sois moi-même à moitié mort, je persévèrerai et si je ne réussis pas, au moins mourrai-je dans le Niger »...

    L'explorateur écossais disparaît peu après avec les derniers survivants de son équipe dans un naufrage sur le Niger. Ainsi s'achève l'épopée du premier Européen qui ait réussi à pénétrer dans l'intérieur du continent noir.

    Impressions d'Afrique

    De son premier voyage, Mungo Park a rapporté de précieuses indications sur les sociétés d'Afrique occidentale. Ainsi souligne-t-il dans son récit la diffusion rapide d'un islam abâtardi dans toute la région du Sahel (le Mali actuel). Il note aussi la haine des Noirs pour les Maures (lui-même ne porte pas ces derniers dans son coeur et leur reproche leur cruauté et leurs menteries). Elle perdure dans l'actuel conflit entre Touareg nomades et Noirs du Mali.

    Il souligne la fréquence des guerres. Celles-ci sont de deux types. D'une part des guerres formelles à l'européenne, d'autre part des rezzou ou coups de main ayant pour objectif principal la vengeance et la quête d'esclaves.

    Résultat des guerres, les famines et les disettes sont fréquentes et parfois si dramatiques que des hommes libres n'hésitent pas à se vendre eux-mêmes comme esclaves ou à vendre leurs propres enfants. Il arrive, raconte Mungo Park, que des négriers européens intallés sur la côte reçoivent de telles propositions !

    L'explorateur souligne l'importance de l'esclavage, profondément enraciné dans les structures sociales africaines. Parmi les esclaves, il y a ceux qui le sont par naissance. Ceux-là, les plus dociles, sont plus volontiers revendus aux Européens. Il y a aussi ceux qui le sont devenus par le fait d'une guerre ou de leur insolvabilité.

    Mungo Park apporte aussi des informations de première main sur les sociétés rurales. Il décrit des savanes arborées et des paysages aux collines verdoyantes. Mais partout sévit la menace des bêtes fauves et des lions, dont les villageois se protègent par des clôtures.

    L'Écossais déplore les cases enfumées, les Africains ignorant les cheminées qui permettent d'économiser du combustible et d'évacuer la fumée. Il note qu'une contrée, à l'ouest de la Gambie, pratique la fumure et utilise le fumier des bêtes pour fertiliser les sols ; elle dispose aussi d'une petite sidérurgie.

    En sus des esclaves, l'Afrique occidentale exporte pour l'essentiel de la poudre d'or et de l'ivoire. Les Noirs achètent aux Européens de leur côté du rhum, des fusils, de la poudre... Ils achètent par ailleurs aux Maures du sel gemme.

    « Colonialiste » avant l'heure, Mungo Park regrette que les Européens de la côte ne se soucient pas de répondre à la curiosité des Africains ni de leur enseigner leur langue et leur foi.

    « Honteux commerce »

    Notons que sur les rives de Gambie, il s'écoule plusieurs mois sans que passe un seul navire négrier. Quand, au terme de son premier voyage, Mungo Park en trouve enfin un, celui-ci l'amène aux Antilles en 25 jours. Sur le navire sont embarqués 130 esclaves, dont 25 qui furent naguère libres, les autres étant des esclaves de naissance. Le voyage, périlleux, se solde par 20 à 30 décès (esclaves et marins).

    Toutes ces indications figurent dans les traductions du Voyage à l'intérieur de l'Afrique (nombreuses éditions de poche).

     

    Éphéméride du Jour 5:  Mungo Park disparaît en Afrique - 16 novembre 1805

     

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    S’unir pour vaincre la culture du viol

     


    Terme rébarbatif et concept dur à cerner : la culture du viol fait l’objet de l’ouvrage collectif Sous la ceinture qu’a lu notre chroniqueuse Marianne Prairie.

    Une lecture importante en cette période trouble.


    de Marianne Prairie du magazine Châtelaine

     

    Le recueil Sous la ceinture : unis pour vaincre la culture du viol n’aurait pas pu paraître à un « meilleur » pire moment. Dirigé par l’enseignante Nancy B.-Pilon, il est arrivé en librairie le 19 octobre dernier, soit quelques jours après une vague d’intrusions et d’agressions sexuelles dans une résidence de l’Université Laval. Un drame accueilli par trois jours de silence de la part du recteur, Denis Brière. Dans la foulée, une jeune femme accusait un député de l’avoir agressé sexuellement – le nom de Gerry Sklavounos circule depuis. Au même moment, on apprenait selon une étude que 30 % des hommes commettraient un viol s’ils étaient assurés de ne jamais se faire poursuivre.


    Ces exemples auraient tous pu figurer à la table des matières de Sous la ceinture. L’ouvrage qui compte 18 contributions aussi percutantes que variées expose la culture du viol dans toute sa triste splendeur. La nouvelle, le poème, l’essai et le théâtre, mais aussi l’illustration et la photographie s’entremêlent pour dresser un portrait cru et nécessaire d’un mal qui se nourrit de silence, d’indifférence et de pouvoir. J’ai dû prendre plusieurs pauses pendant ma lecture tant j’étais bouleversée.

     

     

    Société 2:  S’unir pour vaincre la culture du viol

    Photo: Québec Amérique


    À l’été 2015, c’est dans un contexte semblable à celui des derniers jours que Nancy B.-Pilon a eu envie de crier « Ça suffit! » Un commentaire à la suite de la publication d’une blague controversée de Jean-François Mercier a été le déclencheur de ce projet : « Une femme avait écrit : “C’est sûr que si tu t’habilles pour te faire violer, étonne-toi pas que ça t’arrive.” Penser et dire des choses aussi violentes, venant d’une femme de surcroit… Personne ne mérite de se faire violer, c’est impossible! »


    Nancy a donc réuni autour d’elle des voix qui ne se prononcent pas habituellement sur la culture du viol. « Je voulais offrir l’opportunité à des gens de s’exprimer sur cet enjeu, pour explorer des angles variés et que les textes nous touchent de différentes manières », explique-t-elle. Elle avoue ne pas avoir eu envie de faire une étude sociologique. Elle croit plutôt que les histoires et les témoignages peuvent permettre aux lecteurs de se reconnaître davantage dans les récits et susciter ainsi une plus grande prise de conscience.


    Car le terme « culture du viol » peut être rébarbatif pour certains et le concept dur à cerner, tant il s’infiltre dans toutes les craques de notre société. Après une préface assez dense, cosignée par le rappeur Koriass et l’auteure Aurélie Lanctôt, la chroniqueuse Judith Lussier prend soin de mettre au clair certains malentendus qui circulent sur le sujet. L’exercice est éclairant et permet de comprendre qu’il s’agit « d’un ensemble de comportements, de discours et d’attitudes qui font en sorte que les agressions sexuelles sont banalisées, voire érotisées. » La logique derrière la culture du viol est la suivante : « les victimes sont culpabilisées, et les coupables, victimisés. »


    C’est exactement cela qui s’opère dans le cas de Gerry Sklavounos. Sur les médias sociaux ce que le quidam moyen dit d’Alice Paquet, celle qui a porté plainte contre lui: « Elle veut de l’attention! Elle va détruire sa carrière! Elle l’a cherché! » En même temps, on apprend que le politicien a la réputation d’avoir des comportements déplacés et insistants envers les femmes depuis des années, sans trop de conséquences.


    Dans Sous la ceinture, il n’y a pas de politicien aux mains baladeuses, mais un prof de dessin (et ami cher de la famille) qui donne des cours « de niveau avancé » à des adolescentes (Miléna Babin). Il y a un boyfriend, un garçon adulé par une fille plus jeune que lui, qui s’avère être un abuseur en puissance, une fois le premier « je t’aime » échangé (Florence Longpré). Il y a le capitaine d’une équipe masculine de football universitaire qui humilie des recrues lors des initiations (Samuel Larochelle). Il y a une fréquentation qui fait ça ben trop vite et ben trop fort, en demandant si c’est correct… le lendemain, par texto (Julie Artacho).


    C’est d’ailleurs une des choses qui frappe à la lecture de Sous la ceinture, tous les textes présentent cet incontournable rapport de pouvoir qui permet d’autoriser le pire. Aussi, dans la très grande majorité des histoires (qu’elles soient fictives ou pas), l’abuseur est connu, voire aimé par la victime. C’est à l’image de la réalité québécoise, où 8 personnes sur 10 connaissent leur agresseur.


    Autre aspect intéressant, beaucoup d’auteur.e.s mettent en scène des personnages adolescents ou jeunes adultes. Une drôle de coïncidence lorsqu’on sait que chacun des auteurs a eu carte blanche. On sent que vaincre la culture du viol passe par la nouvelle génération et son éducation. L’auteure et professeure de philosophie Véronique Grenier abonde en ce sens dans son essai « Polaroïd » qui propose des solutions concrètes. « On doit notamment avoir un discours sain sur la sexualité. Les mots ne sont jamais que des mots », commente-t-elle. Véronique a mis Sous la ceinture au programme de son cours cette session : « Il n’existe pas grand-chose sur la culture du viol en français. Cet ouvrage permet de savoir ce dont il est question, mais la multiplicité des approches permet aussi la réflexion et l’empathie. »


    Justement, le témoignage de la rédactrice et traductrice Gabrielle Lisa Collard suscite autant l’empathie que l’admiration et la colère. Elle a choisi de raconter son viol avec aplomb, lucidité et rage: « Si je peux aider UNE personne à réaliser que c’était pas sa faute et lui éviter de porter la honte et la culpabilité pendant des années comme je l’ai fait, ma job est faite. » Gabrielle souhaite que cette prise de parole collective fasse écho dans l’espace public : « Parce que le silence, des individus comme des médias, des gouvernements et des institutions, il a un prix. On sous-estime collectivement l’importance du problème de l’agression sexuelle, de l’incompréhension de ce qu’est le consentement. »


    Véronique Grenier considère aussi que nous nous trouvons devant des enjeux de santé et de sécurité publiques : « Il faut cesser de voir des cas isolés, alors que c’est partout. Ça prend combien d’anecdotes pour qu’on reconnaisse que c’est une épidémie? » Quant à elle, Nancy B. Pilon souhaite que son ouvrage provoque des discussions : « Mon but, c’est d’ouvrir le dialogue. Le silence permet à cette culture d’être aussi forte. Faut arrêter de se mettre la tête dans le sable! »


    Je crois sincèrement que ce livre a ce potentiel transformateur, d’autant plus qu’il est bien écrit et accessible. Il démontre bien que tout est lié dans cette culture de masculinité toxique et de femmes-objets. Une lecture utile dans ces moments troubles.


    Sous la ceinture: Unis pour vaincre la culture du viol, Québec Amérique, 2016

     

     

    Société 2:  S’unir pour vaincre la culture du viol

     

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