•  

    Le marais de Brière : la lagune

    mystérieuse

     

    Par Hughes Derouard
    source : Hors série - France sauvage
     

    Le marais de Brière est l’un des plus petits parcs naturels régionaux ; il se partage entre un ensemble d’étangs, de tourbières, de roselières et autres zones humides, et des terres plus élevées – des îles – où se sont construits villages et hameaux.

    marais de BrièreAu nord de l’estuaire de la Loire, longeant la façade océanique, la Grande Brière est une immense lagune installée au creux d’un effondrement du sous-sol armoricain. En vertu d’un acte sur le droit de pêche de 1461, le marais de Brière est propriété indivise des habitants des 21 communes riveraines. La commission syndicale gestionnaire de Grande Brière Mottière réglemente également l’activité.

    Le saviez-vous ?

    Couvrant 49 000 hectares, le marais de Brière est l’un des plus petits parcs naturels régionaux, mais c’est aussi l’un des plus densément peuplés. Il est situé aux portes de Saint-Nazaire, Guérande, Herbignac et Pontchâteau.

    Se sentir seul au monde

    Sous la poussée régulière de la perche, le bachot file en silence sur les eaux immobiles. Comment est-il possible que, à quelques kilomètres plus loin seulement, l’autoroute de Saint-Nazaire soit en train de déverser des milliers de baigneurs sur les plages de La Baule et de Pornichet ? Ici, au beau milieu de la Grande Brière, vous êtes comme seul au monde. Peut-être même, si votre guide vous a conduit au centre du marais, ressentez-vous une forme d’inquiétude. Une agoraphobie provoquée par le panorama qui s’offre à votre regard. Devant, derrière, comme de chaque côté de l’embarcation, aux quatre points cardinaux, un canal rectiligne s’enfuit vers des horizons indiscernables, noyé dans la brume de chaleur. Pas une brise ; l’eau est un miroir dans lequel le ciel, les joncs, les libellules et les oiseaux, en s’y reflétant, composent une image aussi nette que l’original.
     

    Le marais est immense. Sur la carte, du nord au sud, on mesure 14 kilomètres entre le point de vue des Fossés Blancs et le lieu-dit Pont-de-Paille ; d’ouest en est, on compte 9 kilomètres entre Bréca et Fédrun, où commence la Petite Brière.

    chalandPrès de Kerhinet, hameau constitué de caractéristiques chaumières briéronnes, le port de Bréca est un bon point d’embarquement pour glisser au coeur du marais. Le moyen de locomotion privilégié pour progresser dans ce monde lacustre est le même depuis que les hommes occupent le marais : le chaland, barque traditionnelle à fond plat.

    Ecoutez les animaux

    Au croisement de ces chemins d’eau, lequel de ces quatre larges canaux suivre ? Qu’importe. Avec leurs berges strictement parallèles, uniformément plantées de roseaux et de joncs, rien ne les différencie. D’après la carte, un repère géodésique est placé à l’intersection des canaux de Bréca du Nord, de Rosé et du Vieux Canal. Mais au rendez-vous, il n’y a rien. Nous nous félicitons tout de même que le ciel soit dégagé, ce qui permet de nous orienter d’après le soleil !

    Le retour s’effectuera par quelques errances à travers l’ensemble de ces canaux, curées, chalandières… pour reprendre la gamme de termes employés pour désigner les chemins d’eau du pays des oiseaux. Sur une grande mare – une piarde, en langage briéron – des dizaines de canards se reposent. Le bachot coupe un discret sillage : il est levé par le museau d’un ragondin. Un mouvement de panique subit est celui d’une poule d’eau. Cet oiseau a un comportement absurde : lorsqu’il repère une apparition potentiellement dangereuse, au lieu de se tenir immobile pour passer inaperçu, il tente bruyamment de fuir ! Soudain, un mugissement laisse supposer qu’une vache erre dans le marais. Sourire du guide : c’est le cri du butor étoilé !

    Kerhinet

     

    chaumière briéronnesCaractéristique chaumière briéronne à Kerhinet.

     

    Pour comprendre la vie d’autrefois en Brière

    Kerhinet

    Si vous souhaitez vous faire une idée de ce qu’était la vie, il y a un siècle, en Grande Brière, deux sites méritent absolument la visite : le hameau de chaumières de Kerhinet et la Maison de la Mariée. Kerhinet se trouve du côté ouest du marais, à 5 kilomètres de Saint-Lyphard. Un ensemble de chaumières restaurées et un circuit balisé permettent d’imaginer le quotidien des populations rurales à l’époque où les habitants du marais vivaient en quasi-autarcie. Sur l’île de Fédrun, la Maison de la Mariée évoque les temps où les femmes de Saint-Joachim fabriquaient à domicile des couronnes de mariées et des fleurs artificielles, commandées par de grandes maisons de couture. À travers une impressionnante collection de globes de mariage, c’est la vie intime des familles briéronnes qui se dévoile.

    Il faut garder le doigt sur la carte pour ne pas perdre le fil de l’itinéraire, qui vaut autant par la poésie des noms des canaux empruntés que par la beauté des lieux. Nous voici entre le Copis Ardent et la curée Denis Vince, cap sur Fédrun où nous trouverons la curée de la Chalandière. Tout un programme. Enfin apparaît une présence humaine : c’est un chasseur, dans un autre bachot. Un vieil habitué du marais, si on en juge d’après la souplesse de son corps qui se ramasse puis se détend le long de la perche, tandis que la barque file régulièrement, sans le moindre à-coup.

    paturage

    Un lieu authentique

    Ces quelques images d’une balade sont révélatrices de l’ambiance et des paysages du marais de Grande Brière. Car ce sont des jours et des jours qu’il faudrait pour en achever l’exploration systématique. Alors on découvrirait de nombreuses nuances, si ce n’est des atmosphères radicalement différentes. L’île de Fédrun, sur la côte est, paraît le village le plus typiquement briéron du marais, avec ses chaumières et ses maisons de pêcheurs. On peut y louer un bachot. Plus au sud, le Pont-de-Paille jouxte Trignac. Ici, dans les faubourgs de Saint-Nazaire, le lieu reste étonnamment authentique, du simple fait des pêcheries au carrelet, ces grands filets rectangulaires qu’on descend à l’eau et remonte à l’aide d’un treuil. Bréca, sur le côté ouest du marais, fait penser à la Camargue ; sans doute parce qu’on y organise des randonnées équestres sur de petits chevaux blancs, jumeaux de Crin-Blanc. Saint-Lyphard, un peu plus au nord, est le pendant de Fédrun.

    Se renseigner

    Office de tourisme de Brière
    Maison du Parc
    Village de Kerhinet
    44410 Saint- Lyphard
    02 40 66 85 01 et parc-naturel-briere.fr

     

    Nature en Images 3:  Le marais de Brière : la lagune mystérieuse

     

    Pin It

  •  

    Saint-Cirq-Lapopie : un village de rêve entre Lot et causse de Limogne

     

    Par Détours en France
    source : Hors Série - Les plus beaux villages de nos régions 2012, p.64
     
     

    Suspendue à près de 100 mètres au-dessus d’un méandre du Lot, la belle quercinoise bruisse d’une intense vie culturelle et artistique.  André Breton, un poète qui y avait notamment trouvé une clé essentielle de son existence.

    Panorama

    Un rêve vertigineux

    Il y a les villages dont on rêve et les villages de rêve. Saint-Cirq-Lapopie appartient aux seconds. Un site, incroyable, en surplomb vertigineux au-dessus du Lot et de ses mystères préhistoriques d’un côté, s’ouvrant sur le causse de Limogne de l’autre.

    Pour ne pas succomber à son charme, il faut avoir perdu l’usage de ses cinq sens !

    Une harmonie de vieilles maisons quercinoises qui se lovent au fil de ruelles fleuries, de carriéroux (ruelles) et d’escaliers. Le poète surréaliste André Breton y eut une révélation : celle d’y avoir trouvé son « paradis terrestre », rien que ça ! Saillant de sa terrasse rocheuse, l’église gothique fortifiée date du début XVIe siècle.

    Panorama

    C’est un spectacle inoubliable lorsque, après avoir emprunté, au départ de Cahors, la route bordée de falaises qui se faufile dans la vallée du Lot, on découvre Saint-Cirq-Lapopie. Perché à près de 100 mètres au-dessus de la rivière, ce village épouse majestueusement le relief rocheux.

    Saint-Cirq offre au soleil levant ses belles façades blondes et ses toitures pentues de tuiles brunes, étagées à flanc de colline. Au sommet se dresse le puissant clocher fortifié de l’église gothique du XVIe siècle, avec sa chapelle romane et sa terrasse offrant une vue inoubliable sur la vallée, dont le chemin de halage est taillé dans le calcaire.

    Eglise

    En contrebas, subsistent les ruines du château des seigneurs Cardaillac, détruit sur ordre de Charles VIII.

    Une touche florale

    Ici, pas une bâtisse ne vient rompre l’harmonie de l’ensemble. De rues en ruelles, de passages en escaliers se dévoilent des maisons où l'influence des seigneurs du Moyen Âge, celle des envahisseurs anglais, celle d’artistes et d’artisans s’entremêlent. 

    Maison fleurie

    Les bâtisses du XIIIe aux XIVe siècles, aux façades souvent hautes et étroites, ont des fenêtres à meneaux ou à arcatures, de fières portes travaillées, des encorbellements, des courettes fleuries. Les arcades des échoppes de chaudronniers, peaussiers ou tourneurs abritent de nos jours boutiques et auberges.

    L'histoire du bourg

    Lorsque l’on évoque Saint-Cirq, impossible de ne pas mentionner André Breton, l’une de ces figures les plus marquantes. Jusqu’à sa mort en 1966, il y occupe une ancienne auberge de mariniers du XIIIe siècle, place du Carol, en bas du village, où il passe tous ses étés.
    Le poète et écrivain a la « révélation » en 1950, lors de l’inauguration de la « Route sans frontières n° 1 » (imaginée par le mouvement pacifiste Citoyens du monde) qui passait par le village. Saint-Cirq lui apparaît telle « une rose impossible dans la nuit ».

    Maisons typiques

    Il écrivit : « Saint-Cirq a disposé sur moi du seul enchantement : celui qui fixe à tout jamais. J’ai cessé de me désirer ailleurs. Je crois que le secret de sa poésie s’apparente à celui de certaines Illuminations de Rimbaud, qu’il est le produit du plus rare équilibre dans la plus parfaite dénivellation des plans. »
    Rien que ça. Ses amis Tsuguharu Fujita, Max Ernst ou Man Ray viennent régulièrement le rejoindre, donnant à ce village si paisible une touche d’excentricité et de poésie. Ils refont le monde le soir dans les cafés, quand, dans la journée, ils partent sur les grèves du Lot en quête d’agates… Breton en trouve tant qu’il a l’impression, dit-il, de « fouler le sol du paradis terrestre ».

    Muraille

    Résident estival lui aussi, le peintre espagnol Pierre Daura, trouvera à Saint-Cirq l’inspiration pour ses toiles abstraites. À sa mort en 1976, il lègue à la région Midi-Pyrénées sa maison (XIIIe-XIVe siècles), métamorphosée en un prestigieux laboratoire accueillant en résidence des artistes du monde entier.

    Le dernier tourneur sur bois

    Au Moyen Âge et jusqu’au XIXe siècle, Saint-Cirq était renommé pour ses artisans, les « roubinetaïres ». Ces tourneurs sur bois étaient appelés ainsi car ils réalisaient surtout des robinets de tonneaux à vins, qui étaient ensuite transportés par gabares sur le Lot.
    Patrick Vinel, dernier d’une dynastie de cinq générations, a repris l’atelier familial il y a neuf ans et est aujourd’hui le seul à perpétuer la tradition. Son échoppe est dans la rue principale et toujours ouverte aux curieux.
    05 65 31 20 54

     

    Photos-Villes du Monde 2:

     

    Pin It

  •  

    Erwin Rommel (1891 - 1944)

     

    Le mythe chevaleresque en question

     

     

    Aspirant en 1910 dans un régiment d'infanterie wurtembourgeois, le jeune Erwin Rommel entre à l'école militaire de Dantzig et devient deux ans plus tard lieutenant. 

    C'est lors de la Première Guerre mondiale que Rommel montre pour la première fois ses talents de meneur d'hommes. Le futur maréchal révèle durant ce conflit son sens du commandement, mais également une certaine égocentricité, reflétée par la correspondance très fournie qu'il entretient avec sa femme.

    Sur le front italien, à la tête de sa compagnie de chasseurs alpins, il remporte de nombreuses batailles par son impétuosité et son courage. Sa bravoure lui vaut la plus haute distinction militaire allemande, l'ordre Pour le Mérite. Il est adulé par ses hommes et certains disent de lui : « Le front se trouve là où est Rommel » !

    Pendant l'entre deux guerres, il devient directeur d'une école militaire. À ce poste, il se montre compétent et pédagogue auprès des futurs jeunes officiers de la Wehrmacht. Engagé très tôt dans les SA, groupes paramilitaires nazis, Rommel se montre particulièrement enthousiaste lorsque la dictature hitlérienne se met en place en 1933. Il accède alors au grade de major, devient colonel d'un régiment puis directeur d'une école militaire.

    Une admiration réciproque entre Rommel et le Führer naît au cours de la campagne de France, en 1940, lorsque Rommel, à la tête de la 7e division de Panzers du 15e corps perce les lignes françaises et contribue à la victoire finale. La rapidité de ses manœuvres et la vitesse de ses blindés amènent les Français à surnommer sa division : « La division fantôme ». Par ces actions d'éclat, il devient l'officier favori de Hitler.

    Goebbels met alors sa machine de propagande en action afin d'en faire une idole populaire et l'incarnation même du soldat idéal du IIIe Reich. Cette notoriété, Rommel l'entretient et y prend goût. Il se montre par ailleurs obsédé par son avancement dans la hiérarchie militaire.

     

    La gloire dans le désert
     

    En février 1941, Hitler confie à Rommel un commandement en Afrique du Nord afin de soutenir les Italiens aux prises avec les Britanniques en Lybie. C'est à la tête de l'Afrikakorps que va se créer sa légende et cette formidable popularité auprès du peuple allemand. D'une mission d'assistance militaire, Rommel va donner à cette campagne peu ordinaire une dimension glorieuse et épique, marquée par la grande victoire de Tobrouk (Libye).

    Les combats se déroulent dans le désert, soldat contre soldat, sans la présence de civils, limitant ainsi les bavures et les exactions habituelles dans les territoires occupés par les armées allemandes. La guerre retrouve sur ce champ de bataille les valeurs chevaleresques où des guerriers se respectent et s'affrontent dans les règles.

    Churchill lui même reconnaît les qualités du chef de l'Afrikakorps : « Nous avons contre nous un adversaire très audacieux et très habile, et, puis-je ajouter en dépit des horreurs de la guerre, un très grand général ». Ses talents militaires ne peuvent pas tout. Le corps expéditionnaire allemand est submergé par la supériorité numérique des Alliés : la victoire britannique d'El-Alamein et le débarquement américain en novembre 1942 au Maroc marquent le début de la fin de la présence germano-italienne en Afrique.

     

     

    Bien qu'inéluctable, la retraite de Rommel et des armées allemandes vers la Tunisie est intolérable pour Hitler qui souhaite contenir en Afrique les armées alliées le plus longtemps possible, afin de retarder tout débarquement en Europe. Le chef de l'Afrikakorps passe alors aux yeux du Führer et de l'état-major général comme un défaitiste.

    Afin de maintenir son aura et sa popularité, bénéfiques au moral des Allemands, Hitler décide de lui retirer son commandement. Rappelé dès mars 1943, Rommel n'aura pas à subir la responsabilité de la défaite allemande en Afrique du Nord et son prestige demeurera intact.

    Le chef du IIIe Reich se détourne néanmoins de son général favori, refusant même pendant un moment de lui attribuer une nouvelle affectation. Après un commandement en Italie du nord, il le désigne finalement en novembre 1943 comme organisateur des défenses du « Mur de l'Atlantique ».

     

    Rommel et Walkyrie

    Le maréchal Rommel inspecte les troupes en Normandie au printemps 1944

    Chargé de défendre le Reich face à un éventuel débarquement allié, Rommel fait preuve dans cette tâche de beaucoup de zèle mais s'oppose sur des questions stratégiques avec son supérieur direct, le maréchal Von Rundstedt, commandant en chef des forces à l'ouest.

    Son commandement à la tête des armées du groupe B, entre la Hollande et la Loire, n'empêche pas les Alliés de réussir le débarquement de Normandie.

    Le 17 juillet 1944, le feld-maréchal est grièvement blessé sur une petite route normande par une attaque aérienne. Il est en convalescence en Allemagne lors de l'attentat manqué contre Hitler, acte déclencheur de l'opération Walkyrie, trois jours plus tard.

    L'enquête menée par son biographe Benoît Lemay sur l'engagement de Rommel aboutit à un jugement sans équivoque : Rommel n'a pas été partie prenante du complot ! Il ne fut jamais, de près ou de loin, membre de cette conjuration. Il garda jusqu'au bout un grand respect pour le Führer, même s'il reconnaissait la nature criminelle du régime et n'adhérait pas à l'ensemble des décisions stratégiques prises par le haut commandement. Mais certains conjurés s'appuyèrent sur cette attitude ambigüe pour l'impliquer et tenter de minimiser leurs actions afin d'éviter la pendaison.

    Convaincu de son implication, Hitler donna alors le choix au feld-maréchal : un procès, la condamnation à mort et la déportation de sa famille, ou un suicide et des obsèques nationales. Rommel choisit de se donner la mort par le poison et de préserver ainsi son honneur.

    Benjamin Fayet

     

     

    Éphéméride du Jour 5:  Le mythe chevaleresque en question - Erwin Rommel (1891 - 1944) + vidéo

     

    Pin It

  •  

    Moissac, ville de foi et de beauté

     

    Par Joël Chaboureau
    source : Détours en France
     

    Située sur la Via Podiensis, l’une des voies qui conduisait les pèlerins à Saint-Jacques de Compostelle au départ du Puy-en-Velay, Moissac fut terre d’accueil après la traversée de l’austère Aubrac et du sud du Limousin.

    Abbatiale

    Une étape bienvenue avant d’entreprendre la dangereuse traversée du Tarn. Quelle émotion devait saisir le marcheur lorsque, au terme d’une rude journée, il apercevait son exceptionnelle abbaye !

    Une œuvre d’art unique

    L’église abbatiale Saint-Pierre fut fondée au VIIè siècle et rattachée en 1047 à Cluny. Elle devint le plus éminent centre monastique du Sud-Ouest. Elle se dresse au cœur d’une plaine au pied des derniers coteaux du Quercy et c’est assurément l’une des plus étincelantes réalisations de l’art roman. Le tympan du portail sud constitue le véritable chef d’œuvre de Moissac.

    Cloître

    S’inspirant de l’apocalypse selon saint Jean, et réalisé entre 1100 et 1130, il présente en son centre un Christ siégeant sur son trône de gloire, les pieds reposant sur la mer de cristal.

    Clocher

    Il est entouré des symboles des quatre évangélistes (Marc, Matthieu, Luc et Jean), tandis que vingt-quatre vieillards de l’Apocalypse, portant sur leur tête des couronnes d’or, prennent place dans le bas et sur les côtés de la scène.

    Le cloître : 76 arcades et 116 colonnes

    Attenant à l’abbaye le cloître est le plus ancien de l’art roman en France et il figure parmi les plus beaux. Quatre galeries d’une incroyable harmonie architecturale reposent sur 76 arcades et 116 colonnes. Ses chapiteaux constituent une véritable banque d’images à décrypter : végétaux et animaux stylisés, scènes bibliques et de l’Evangile, vie du Christ…

    Porte principaleVoici le tympan de l'abbatiale où le christ y est représenté.

    C’est un somptueux écrin de calme, un lieu de source et de spiritualité, une étape idéale pour les pèlerins mais aussi pour les visiteurs, croyants et non-croyants qui ne peuvent rester insensibles à l’harmonie du lieu.

    Cloître

    Nous pouvons dater le cloître au alentour de l'année 1100. Il est organisé en quatre galeries chacunes ayant 116 colonnettes de marbre reliées par des arcades.

     

    Photos-Villes du Monde 2:  Moissac, ville de foi et de beauté

     

    Pin It

  •  

    14 novembre 1888

     

    Inauguration de l'Institut Pasteur

     

     

    L'Institut Pasteur est inauguré à Paris, le 14 novembre 1888, par le président de la République Sadi Carnot. C'est le premier institut de recherche jamais créé au monde. Il se donne pour objectif l'identification des virus.

    Financé par une souscription internationale à hauteur de deux millions de francs, il comble les voeux du plus populaire savant qu'ait connu l'humanité et dont il porte le nom.

     

     

     

    La rage de comprendre

    Louis Pasteur est né dans la petite ville de Dôle, dans le Jura, le 27 décembre 1822, dans le ménage d'un riche négociant en tannerie. Élève doué, sans plus, il manifeste d'excellentes dispositions pour la peinture mais y renonce à 19 ans pour se consacrer tout entier à la science, contre l'avis de son père qui préfèrerait le voir reprendre les affaires familiales.

    En 1842, il est classé 16e au concours d'entrée à la prestigieuse École Normale Supérieure de la rue d'Ulm (Paris). Jugeant son rang insuffisant, il dédaigne d'entrer à l'École et repasse le concours l'année suivante. Il est cette fois classé 5e. Cela le satisfait. Il entre à l'École dans la section physique et chimie.

    Le jeune chercheur se lance dans la cristallographie. Avec des moyens de fortune, il met en oeuvre la méthode expérimentale qui fera son originalité et sa gloire. Il découvre ainsi l'existence de dissymétries dans la manière dont des molécules de même nature polarisent la lumière. C'est un premier succès qui lui vaut la reconnaissance de ses pairs et un poste de professeur à l'Université de Strasbourg puis de Doyen de l'Université de Lille.

    Dans cette ville, il est sollicité par un industriel pour élucider un dysfonctionnement de la fermentation de la bière. Louis Pasteur, à peine âgé de 30 ans, se soucie dès lors de mettre en application ses recherches scientifiques (« Il n'y a pas de sciences pures et de sciences appliquées, il y a la science et les applications de la science », écrit-il).

    Il découvre dans les jus de fermentation alcoolique et lactique des substances dont il soupçonne qu'elles ont été créées par des microorganismes vivants. De fil en aiguille, ces premiers résultats vont le conduire de la chimie à la biologie puis à la médecine.

    Nommé directeur des études à l'École Normale Supérieure, à Paris, il poursuit ses travaux sur la fermentation dans un laboratoire de fortune aménagé dans les combles. Il publie ses premiers résultats dans un Mémoire sur la fermentation dite lactique (1857).

    On peut dater de cette année-là le début de la « révolution pastorienne ». La même année, la France entre de plain-pied dans l'ère industrielle sous l'égide de Napoléon III et en Grande-Bretagne, un savant, Charles Darwin, jette les bases de la théorie de l'évolution dans une lettre mémorable. Aux Indes, une révolte amène les Britanniques à consolider leur domination...

     

    Un entêtement à toute épreuve

    Le succès de Pasteur n'est pas immédiat, loin s'en faut ! Dans les milieux scientifiques, les partisans de la « génération spontanée » dénigrent tant et plus ses assertions. Parmi eux figurent d'illustres savants comme Marcelin Berthelot, Justus von Liebig et Friedrich Wöhler (auquel on doit la synthèse de l'urée). Pour eux, la fermentation se ramène à une réaction chimique en présence d'un catalyseur. Faisant front avec un entêtement exceptionnel, Louis Pasteur va mettre plusieurs années à les convaincre de leur erreur.

    Il démontre que les microorganismes responsables de la fermentation, c'est-à-dire de la transformation du sucre en alcool, viennent de l'environnement et ne sont pas créés ex nihilo. Il démontre aussi que ces microorganismes - des levures (microchampignons) - utilisent la fermentation pour fabriquer l'énergie indispensable à leur survie en l'absence d'oxygène.

    Ces démonstrations passent par d'innombrables expérimentations et la mise au point de procédés innovants et astucieux pour isoler les substances fermentescibles (Pasteur fait par exemple mûrir des raisins en serre, dans sa maison du Jura, à l'abri de l'air ambiant).

    Fort de ce savoir-faire expérimental, le savant met au point une technique de chauffage destinée à protéger les liquides tels que la bière ou le lait contre les ferments. C'est la « pasteurisation ».

    Elle permet aux industriels d'améliorer les procédés empiriques de fermentation utilisés depuis des millénaires pour la fabrication du vin, de la bière ou du fromage ainsi que les procédés de conservation des aliments.

    Ce succès vaut au savant d'être reçu par le couple impérial à Compiègne. La même année, en 1865, il est sollicité par un ancien professeur pour étudier une mystérieuse maladie qui affecte les vers à soie, dans la vallée du Rhône, et ruine la sériciculture ardéchoise.

    Le savant met en évidence l'existence d'un « microbe » responsable de la maladie au prix d'un labeur acharné, doublé de terribles épreuves personnelles : la perte de trois filles sur cinq enfants et une hémorragie cérébrale qui le laisse partiellement paralysé d'un bras et d'une jambe (sans compter sa démission de l'École Normale Supérieure, où on le juge trop autoritaire).

     

    Le physicien face à l'Académie de médecine

    Ses recherches conduisent Pasteur à se rapprocher pas à pas du domaine thérapeutique. Il lui vaudra ses plus grands titres de gloire mais aussi la haine des sommités médicales, jalouses de l'incursion de ce physicien dans leur domaine de compétence.

    Le public découvre qu'il est possible, grâce à l'hygiène, de se protéger contre les maladies transmises par les microbes. Dès 1875, un prestigieux chirurgien écossais du nom de Joseph Lister met en pratique à Edimbourg des procédures antiseptiques d'avant-garde suite à la lecture du mémoire de Pasteur sur la fermentation lactique. Il ne manque pas une occasion de rappeler sa dette à l'égard du savant français.

    Celui-ci, orateur de talent, se fait auprès des chirurgiens le chantre de l'asepsie. Il leur prescrit de se nettoyer soigneusement les mains avant d'entrer en contact avec un patient, geste qui nous paraît aujourd'hui relever de l'évidence... Il s'ensuit une amélioration notable de l'espérance de vie partout dans le monde.

    En 1877, Pasteur est conduit à travailler sur le « charbon », une maladie qui ravage les élevages, en parallèle avec un jeune médecin allemand, Robert Koch. Leurs travaux conjoints démontrent la nature bactérienne de cette maladie.

    Dans la foulée, Louis Pasteur étudie le choléra des poules, autre maladie infectieuse, et fait à cette occasion une découverte d'une grande portée : cette maladie, comme vraisemblablement bien d'autres maladies infectieuses de l'animal et de l'homme, peut être prévenue par la vaccination, autrement dit par le procédé mis au point de façon empirique par le docteur Jenner, 80 ans plus tôt, pour immuniser les sujets contre la variole.

    En étudiant également la rage, maladie qui affecte les chiens et les renards, et peut se transmettre aux humains, Louis Pasteur confirme l'existence de virus porteurs de la maladie. Beaucoup plus petits que les bactéries, les virus (ainsi baptisés par Jenner d'après un mot latin qui signifie poison) sont invisibles au microscope et, heureusement, ne se multiplient pas d'eux-mêmes dans un milieu de culture.

    Fort de ses résultats, le savant développe avec le jeune médecin Émile Roux une méthode en vue d'inventer et de produire des vaccins adaptés à chaque maladie infectieuse, pas seulement la variole.

     

    Le tournant de la rage

    Ses succès en cascade valent la gloire à Pasteur (y compris une élection à l'Académie française le 8 décembre 1881 au fauteuil d'Émile Littré). Mais la fortune n'est pas au rendez-vous. Le savant, en effet, a déposé des brevets sur ses inventions mais en a cédé les droits à l'État afin de leur assurer la plus grande diffusion possible (c'est ainsi par exemple que la « pasteurisation » est très vite mise en oeuvre jusqu'en Californie).

     

    Le meilleur reste à venir. Le 6 juillet 1885, tandis que la France de la IIIe République est à son zénith, Louis Pasteur reçoit dans son cabinet de l'École Normale Supérieure un petit berger alsacien, Joseph Meister (9 ans).

    Celui-ci a été mordu par un chien peut-être enragé. Contre l'avis des médecins qui voulaient le garder à l'hôpital, sa mère a obtenu de le conduire auprès du célèbre savant. Elle supplie celui-ci de le vacciner, quels qu'en soient les risques.

    Louis Pasteur obtient l'assentiment de deux médecins, le pédiatre Grancher et le docteur Vulpian, spécialiste de la rage. Indifférent à notre « principe de précaution », il inocule alors à l'enfant un nouveau vaccin mis au point dans son laboratoire par le docteur Émile Roux.

    Ce dernier a toutefois refusé de s'associer à l'expérience. Il est vrai que, quelques jours plus tôt, le 22 juin 1885, un premier essai sur une fillette de onze ans, Julie-Antoinette Poughon, n'a pas permis de la sauver.

    Après une série de treize longues et douloureuses injections, le petit Joseph sort guéri de l'épreuve au grand soulagement de Pasteur...

     

    Fidèle à en mourir

    Joseph Meister deviendra plus tard le dévoué gardien de l'Institut Pasteur et lorsque, le 16 juin 1940, des officiers allemands demanderont à se recueillir devant la tombe du grand homme, il choisira de se suicider plutôt que de les laisser entrer.

    Louis Pasteur connaît un deuxième succès avec la vaccination d'un berger de 14 ans, Jean-Baptiste Jupille, qui s'est interposé au péril de sa vie entre un chien sauvage et un groupe d'enfants.

    Avec un art consommé des relations publiques, le savant magnifie sa double victoire sur la rage (victoire toute relative sur une maladie marginale, car des chercheurs doutent aujourd'hui que ses jeunes patients aient été mordus par des chiens vraiment enragés et l'équipe pastorienne connaît par la suite plusieurs échecs à l'origine de vives critiques).

     

    Une réputation planétaire

    Au comble de la gloire, Louis Pasteur satisfait son goût pour les honneurs et les décorations. Mais surtout, il arrive à capter une partie de la générosité populaire au profit de la recherche médicale. C'est ainsi qu'il lance une souscription en vue de fonder l'Institut qui portera son nom. « Il n'est pas une pierre qui ne soit le signe d'une généreuse pensée », dit-il de l'édifice élevé au sud de Paris, dans le quartier de Vaugirard. Il le dirigera jusqu'à sa mort, le 28 septembre 1895.

    La France organise des obsèques nationales pour celui que certains désignent avec quelque exagération comme « le plus grand bienfaiteur de l'humanité ». Inhumé dans son Institut, le savant continue d'inspirer ses chercheurs...

    Depuis plus d'un siècle en effet, les « Pastoriens » multiplient les découvertes que sont venus couronner huit prix Nobel, dont les professeurs Jacob, Monod et Lwoff en 1965. En 1891, Émile Roux met au point le sérum antidiphtérique. En 1894, Alexandre Yersin isole à Hong-Kong le bacille de la peste. En 1921, Albert Calmette et Camille Guérin mettent au point le vaccin BCG contre la tuberculose. En 1983, le professeur Luc Montagnier et Françoise Barré-Senoussi découvrent le virus du sida...

     

    Bibliographie

    Je recommande la lecture d'un passionnant livre du savant René Dubos (1901-1982) : La leçon de Pasteur (206 pages, Albin Michel, 1987). Limpide, vivant et chaleureux, il aborde à la fois les aspects humains et professionnels de la vie de Pasteur. Un livre propre à transmettre la passion de la science.

    Joseph Savès
     

    Éphéméride du Jour 4:  Inauguration de l'Institut Pasteur - 14 novembre 1888

     

    Pin It