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    Les projets fous des chefs d'Etat

     

    LES COUPS DE FOLIE DES CHEFS D'ETAT

    projets fous des chefs d'etat.
    Projets fous des chefs d'Etat. © Montage L'Internaute Magazine 
     
     
    Chantiers pharaoniques, mesures loufoques, discours délirants ou célébrations extravagantes... Certains chefs d'Etat ont parfois été, avec le plus grand sérieux, à l'origine de projets complètement fous. De Kadhafi à Niyazov en passant par Kim Jong Il, Poutine, Castro, Chavez ou encore Ahmadinejad : tour d'horizon des plus grandes folies des grands de ce monde.
     
     

    UN PRÉSIDENT EN GRÈVE DE LA FAIM

    evo morales
    Evo Morales © UN photo Rick Bajornas
     
     
    Evo Morales a été en 2009 l'auteur d'une première historique. Le 9 avril, le président bolivien s'est mis en grève de la faim. Le but : protester contre les députés qui l'empêchaient d'organiser des élections en décembre. Au Parlement, des débats houleux entre majorité et opposition de droite bloquaient en effet l'approbation d'une nouvelle loi électorale visant à organiser des élections législatives. Un scrutin qui devrait permettre à Evo Morales d'obtenir un second mandat, offrant au premier président d'origine indienne l'opportunité de rester au pouvoir jusqu'en 2015. Pendant cinq jours, les médias boliviens et internationaux montreront les images insolites de ce président, allongé sur une couchette, avalant quelques liquides et mâchant des feuilles de coca pour combattre la faim, accompagné de dirigeants syndicaux. Cette grève de la faim sera interrompue le 14 avril après que la loi fut adoptée et les élections fixées au 6 décembre.
     
     

    L'HÔTEL FANTÔME DE PYONGYANG

    le ryugyong hôtel
    Le Ryugyong hôtel © Kremlin.ru / Elkweaver
     
     
    A la fin des années 1980, Kim Il Sung, le père de Kim Jong Il, multiplie les projets de monuments somptueux (tous voués à son culte de la personnalité). En 1987, le régime décide de la construction d'un hôtel censé battre des records mondiaux. Le Ryugyong hôtel qui doit s'élever au cœur de Pyongyang sera le plus grand et le plus haut de tous. Aujourd'hui, une montagne de béton s'est bel et bien élevée au cœur la capitale nord-coréenne. Mais malgré ses 330 m de haut et ses 360 000 m², cette pyramide grisâtre est devenue la risée des pays occidentaux. Inachevé, l'hôtel n'a jamais ouvert ses portes. Débutée avec des capitaux français, sa construction a dû être stoppée en 1992 à la suite de problèmes de conception et du manque de moyens de la Ryugyong Hotel Investment and Management Co. L'hôtel devait proposer 3000 chambres et 7 restaurants. En janvier 2008, plusieurs sources annonçaient la reprise des travaux. Sans suite apparente.
     
     

    LA RÉVOLUTION "TURKMENBASHI"

    saparmurat niyazov
    Saparmurat Niyazov © UN Photo Sergey Bermeniev
     
    Saparmurat Niyazov aura été, jusqu'à sa mort en 2006, une caricature vivante de dictateur. Convaincu qu'il manquait à son peuple une identité forte, le président du Turkménistan a développé un culte de la personnalité inédit. Deux ans après la chute de l'URSS, il se rebaptise "Turkmenbashi", "Chef des Turkmènes". Devenu "président à vie" en 1999, il changera aussi le nom de la capitale, Poltoratsk, pour le turkmène Achgabat et donnera son nom à de nombreux bâtiments publics. Niyazov se chargera lui-même de la rédaction des livres scolaires, changera l'alphabet et le calendrier turkmène. Mais ses excentricités iront plus loin. Après avoir conçu un mémorial pour sa propre mère et fait fermer la quasi-totalité des bibliothèques, il instaurera une série d'interdiction : des cheveux longs, des dents en or, du playback, des ballets et opéras jugés "superflus" jusqu'au maquillage des animateurs de télévision pour ne plus "confondre les présentateurs des présentatrices".
     
     

    QUAND AHMADINEJAD INVITE BUSH À LA TÉLÉ

    george w. bush et mahmoud ahmadinejad
    George W. Bush et Mahmoud Ahmadinejad © UN Photo Paulo Filgueiras, Mark Garten
     
     
    Depuis son élection, Mahmoud Ahmadinejad a eu maintes fois l'occasion de se faire remarquer pour ses frasques. Mais c'est à partir de 2006 que le dirigeant iranien aura fait preuve de la plus grande audace. Le 8 mai, il envoie une lettre à la Maison Blanche et demande un dialogue avec son pire ennemi, George W. Bush. Une lettre restée sans réponse. Dès lors, une confrontation publique entre les deux chefs d'Etat devient une obsession. Le 29 août 2006, lors d'une conférence de presse, il va même jusqu'à inviter Bush à un débat télévisé ouvert à Téhéran. Y seraient abordés le programme nucléaire iranien, Israël, l'Afghanistan et toutes les "affaires du monde". Cette invitation, de nouveau déclinée par Washington, sera suivie d'une autre du même ordre quelques semaines plus tard. La dernière date de septembre 2007, à l'occasion de la 62e session de l'Assemblée générale de l'ONU.
     

    LA FUSION LIBYE-TUNISIE

    mouammar kadhafi et habib bourguiba.
    Mouammar Kadhafi et Habib Bourguiba.© Roger Viollet / Présidence de la République tunisienne

     

    Mouammar Kadhafi a toujours rêvé de réaliser le vieux rêve de Nasser d'une "République arabe unie". Il ne faudra pas plus de quelques déclarations, timides mais encourageantes, de son voisin Habib Bourguiba pour qu'il prenne l'initiative. Le 11 janvier 1974, il traverse à l'improviste la frontière et convoque le président tunisien dans un hôtel de Djerba. L'accord est signé en moins d'une heure : les deux dirigeants s'engagent à fusionner leurs pays en un État unique baptisé "République arabe islamique". Bourguiba en sera le président et Kadhafi le vice président. Des ministres sont nommés, un référendum est annoncé. On parle d'une nouvelle constitution, d'un nouveau drapeau et d'une armée commune... Avant de déchanter. Désaccords ou colère des pays voisins ? Lors d'une rencontre à Genève le 25 janvier, une violente dispute entre les deux chefs d'Etat met brutalement un terme au projet. Moins de 15 jours après sa naissance...

     

    UNE NOUVELLE BABYLONE EN IRAK

    des statues de saddam hussein érigées devant le palais présidentiel
    Des statues de Saddam Hussein érigées devant le palais présidentiel © Jim Gordon, CIV
     
     
    Après son arrivée au pouvoir en Irak en 1979, Saddam Hussein, veut redonner sa splendeur à l'ancienne Babylone, dont les ruines ont été recouvertes par la ville de Tikrit. D'historique, sa démarche deviendra très vite personnelle, des dizaines de palais étant érigés à la gloire du raïs dès 1982. Gigantesques et majestueux à l'extérieur, les édifices reflètent aussi tous les excès du régime à l'intérieur, avec toujours marbres, dorures, pierres précieuses et de riches décorations symbolisant les guerres triomphales de Saddam. Le "Palais de la Garde républicaine", utilisé comme palais présidentiel et agrandi en 1995, porte depuis l'inscription : "Monsieur le président chef suprême Saddam Hussein, que Dieu le protège, a procédé à l'élargissement du palais du peuple". A quelques kilomètres, le "Palais des croyants" réserve d'autres surprises. Sous son faste, il cache en réalité un bunker qui sauvera plusieurs fois la vie du dirigeant irakien.
     

    UN TRÈS GRAND PRÉSENTATEUR TÉLÉ

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    Hugo Chavez © UN Photo Paulo Filgueiras
     
    Depuis son arrivée au pouvoir au Venezuela en 1999, Hugo Chavez contrôle le paysage médiatique. Sept télévisions, une vingtaine de radios et une soixantaine de journaux sont directement liés au pouvoir. Une loi l'autorise à réquisitionner les chaînes de télévision pour ses discours. Mais le chef d'Etat sud américain est aussi le seul à avoir sa propre émission de télévision. Intitulée "Aló Presidente" et diffusée tous les dimanches sur les principales chaînes du pays, elle lui permet de répondre aux questions des Vénézuéliens en direct. Véritable animateur de talk-show, installé derrière son pupitre, il peut faire durer cette émission jusqu'à sept heures (record du 9 septembre 2007). Parmi ses thèmes de prédilection : la religion, l'amour et la révolution. Plusieurs personnages sont régulièrement cités dans l'émission comme le Che, Bolivar, mais aussi George W. Bush, baptisé  "el diablo" jusqu'à son départ début 2009.
     
     

    JOYEUX ANNIVERSAIRE M. LE PRÉSIDENT

    robert mugabe
    Robert Mugabe © UN Photo Mark Garten
     
    En 1982, pour fêter les deux ans de l'indépendance du Zimbabwe, Robert Mugabe faisait rebaptiser toutes les villes du pays à commencer par la capitale, Salisbury, devenue Harare. Le 21 février 2009 c'est un tout autre anniversaire que le président controversé à fêté : celui de ses 85 ans. Entre-temps, le régime s'est endurci et la population zimbabwéenne a sombré dans la famine et le cholera. Mais cela n'a pas empêché les fidèles de son parti, le Zanu-PF, de veiller à la grandeur de l'événement. Par dizaines, ils ont récolté des "dons" auprès des entreprises. Et la "liste de commissions" dévoilée par la presse internationale a de quoi faire frémir : l'objectif était en effet de récolter entre autres 2000 bouteilles de champagne, 4000 portions de caviar, 8000 boîtes de Ferrero Rocher et 3000 canards. 80 vaches, 70 chèvres et 12 porcs ont aussi été abattus pour le banquet. Le gâteau d'anniversaire, lui, pesait 85 kg.
     
     

    LE MOLLAH OMAR BOMBARDE LES STATUES

    les restes de l'une des deux statues de bouddha détruites
    Les restes de l'une des deux statues de Bouddha détruites © UN Photo Fardin Waezi
     
     
    Le régime taliban, chassé d'Afghanistan en 2001, aura fait preuve d'une rare constance dans les projets fous. L'un des plus connus est la quasi destruction de deux statues géantes de Bouddha à Bâmiyân, au centre du pays. Datant du Ve siècle, ces deux monuments, classés au patrimoine de l'Unesco, étaient taillés directement dans les falaises de grès. Témoignages de la fusion des arts grecs et bouddhistes au début du millénaire, elles avaient survécu à 15 siècles turbulents, ponctués par la destruction de la ville par Genghis Khan en 1222 ou encore par la guerre entre l'URSS et les moudjahidines dans les années 1980.Début 2001, elles deviennent officiellement "idolâtres" après un décret du mollah Omar, présenté comme le fidèle lieutenant de Ben Laden. Les Talibans devront user de puissants explosifs et de tirs d'artillerie pour les faire (difficilement) disparaitre déclenchant une vive émotion dans le monde.
     
     

    LE ROI QUI AIMAIT TROP LES FEMMES

    le roi mswati iii
    Le Roi Mswati III © UN Photo Marco Castro
     
    Dernier monarque absolu de la planète, le roi Mswati III du Swaziland est un grand séducteur. Selon un décompte effectué en 2005, il avait 12 épouses, 2 fiancées officielles et 24 enfants. Un faible qui lui a valu quelques ennuis judiciaires. Le 11 novembre 2001, il a plaidé coupable pour avoir enfreint une règle qu'il avait lui-même défendue quelques semaines plus tôt : "l'umchwasho". Un vieux rite de chasteté qui veut que les jeunes femmes, avant de pouvoir se marier, aient observé l'abstinence pendant 5 ans. Pendant cette période, celles-ci portent un pompon coloré indiquant aux hommes l'interdit. L'amende pour un courtisan est de 1 300 emalangeni (130 euros) ou d'une tête de bétail. Tombée en désuétude, la règle avait été réintroduite par Mswati pour "endiguer l'épidémie de Sida". Dénoncé par de  jeunes traditionnalistes, le roi, qui avait choisi une nouvelle fiancée de 17 ans, aura dû s'acquitter d'un boeuf en guise d'amende.
     

    LA SUPERSTITION BIRMANE

    than shwe
    Than Shwe © UN Photo Evan Schneider
     
    Le général Than Shwe, à la tête de la junte birmane depuis 1992, est sans doute le dirigeant le plus superstitieux. Doté d'une véritable "cour d'astrologues", le vieux soldat, dans le collimateur des Etats-Unis, aurait une peur bleue de finir comme Saddam Hussein. Une paranoïa qui l'a poussé, en 2005, à déplacer la capitale birmane, Rangoon, à Naypyidaw, la "demeure des rois", à 400 km. Centrale mais perdue au milieu de la jungle et difficilement accessible, Naypyidaw est dotée de bunkers et de souterrains qui la rendent quasi imprenable. Ses grandes artères sont censées faciliter la répression en cas de soulèvement. Enfin, elle est protégée par des missiles pointés sur plusieurs étoiles que Than Shwe prendrait pour des satellites espions. Et rien n'a été laissé au hasard pour le "grand déménagement" des 11 ministères birmans qui a eu lieu le 11 novembre, à 11 heures, à l'aide de 11 000 camions.
     

    LE DERNIER "ROI D'ECOSSE"

    idi amin dada a inspiré un roman 'le dernier roi d'ecosse', adapté au cinéma.
    Idi Amin Dada a inspiré un roman "Le dernier roi d'Ecosse", adapté au cinéma.© 20th Century Fox
     
    A la tête de l'Ouganda de 1971 à 1979, Idi Amin Dada a laissé l'image d'un dictateur sanguinaire, sombrant progressivement dans la folie. Sa passion pour les voitures, et les films de Walt Disney, ses délires paranoïaques et ses visions sont connues de tous. Tout comme l'un des nombreux titres qu'il s'était lui-même décerné : celui, improbable, de "roi d'Ecosse". Passionné par ce pays qui a longtemps résisté à l'envahisseur, Amin Dada décide, au milieu des années 1970, de créer un régiment entièrement équipé de kilts et de cornemuses. Bardé de fausses décorations de la seconde Guerre mondiale, il proclame alors vouloir aider les Ecossais à se libérer du joug anglais. Quand les relations avec Londres sont rompues en 1977, Amin Dada déclare la victoire à la radio et opte cette fois pour le titre de "Conquérant de l'Empire britannique" qu'il conservera jusqu'à la fin de son triste règne (jusqu'à 300 000 victimes).
     
     

    LE PRÉSIDENT QUI VOULAIT REBÂTIR L'URSS

     

    alexandre grigorievitch loukachenko
    Alexandre Grigorievitch Loukachenko© Kremlin.ru
     
    La Biélorussie d'Alexandre Loukachenko a une drôle de particularité. Depuis la chute de l'URSS, elle se veut une authentique réplique de l'ancienne Union soviétique. Outre la théorie du complot ambiante et l'instauration d'une police politique, Loukachenko s'applique à restaurer tous les emblèmes de l'ex-Union soviétique. Dans la capitale, Minsk, une statue de Lénine domine la place de l'Indépendance. La faucille et le marteau apparaissent sur tous les bâtiments officiels. Le président s'invite régulièrement à la télévision quand ce n'est pas la presse qui vante le courage d'ouvriers méritants. Loukachenko a d'ailleurs rétabli un "subbotnik", une journée de travail "bénévole" le 22 avril, jour de la naissance de Lénine. Et difficile de protester. Elu en 1994, cet ancien dirigeant de sovkhoze a prévenu ses concitoyens qu'il les espionnerait sans relâche : "Mon hélicoptère volera au-dessus de vos têtes presque chaque jour".
     

    UNE RIVIÈRE DANS LE SAHARA

    mouammar kadhafi
    Mouammar Kadhafi © Communauté européenne

     

    Mouammar Kadhafi a été l'auteur de plusieurs projets fous depuis son coup d'Etat en 1969. Après la fusion avortée avec la Tunisie, le Guide de la révolution s'entiche d'une autre idée folle : la création d'une "rivière dans le désert". Un chantier pharaonique pour extraire de l'eau sous le sable du Sahara et l'acheminer vers les cultures de blé du nord et vers les villes de la côte. Lancé au début des années 1980, le projet aura coûté 33 milliards de dollars et nécessité l'installation de 4 000 km de tuyaux. En mars 2009, à l'occasion du 5e forum mondial de l'eau en Turquie, des officiels libyens ont présenté les derniers détails de l'installation. De nombreux experts s'inquiètent depuis de l'impact écologique de la manœuvre. Le blé cultivé avec l'eau du Sahara devrait devenir l'un des plus chers au monde. Mouammar Kadhafi, lui, parle de la "huitième merveille du monde".

     

    UNE CAPITALE DANS LA STEPPE

    le palais présidentiel à astana
    Le palais présidentiel à Astana © Ernie Reumiller / UN photo-Milton-Grant
     
    Depuis quelques années, une cité monumentale et bigarrée s'est comme posée au milieu de la steppe kazakhe. Décrétée capitale en 1997 à la place d'Almaty par le président Noursoultan Nazarbaïev, la ville d'Astana est passée de 300 000 habitants à plus de 600 000 aujourd'hui. Une gageure quand on sait que l'hiver, les températures peuvent y atteindre -40 degrés. Le chantier du président, un ancien cadre communiste surnommé "Papa" par les Kazakhs, démontre aussi sa folie par son architecture. Grâce à des centaines de milliers d'ouvriers tadjiks, kirghizes ou ouzbeks, la steppe a vu jaillir coupoles eurasiennes, colonnes gréco-romaines, blocs soviétiques, palais staliniens, pyramides et autres gratte-ciels ultramodernes. Cette extravagance fait plutôt rire la population qui a déjà rebaptisé certains édifices avec des noms aussi délirants que "la grande sucette", "le briquet" ou des "les six barriques".
     

    UN AUTEUR D'OPÉRA NOMMÉ KIM

    kim jong il
    Kim Jong Il © Kremlin.ru

     

    Dirigeant de la Corée du Nord depuis 1994, Kim Jong Il, autoproclamé "le soleil du XXIème siècle", se distingue par des goûts culinaires et culturels exacerbés. Amateur de cuisine française, de Cognac et de Mercedes, le leader coréen serait aussi un fan de cinéma. Dans les années 1940, son père avait fait construire une "cité du cinéma" pour cet amoureux d'Elizabeth Taylor. Mais Kim Jong Il a une autre passion dont il fait régulièrement profiter son peuple. Tout en contrôlant toute forme de création artistique, il est lui-même l'auteur d'opéras, généralement écrits à la gloire de la réunification coréenne, des bienfaits du socialisme ou encore de la loyauté au chef. Le "Cher dirigeant" a pour habitude de les programmer dans différents théâtre de Pyongyang. Le plus renommé, intitulé "Mer de Sang", lui a valu le titre de "Cher artiste bien aimé".

     

    1 MILLION DE DÉMÉNAGEMENTS

    le barrage des trois gorges
    Le barrage des Trois gorges © Jonathan Abrams / UN photo Evan Schneider
     
    Initié dans les années 1980, le barrage des Trois Gorges a été en grande partie construit sous la présidence de Hu Jintao et a été achevé en 2009. Unique par sa taille (2 335 m), il peut retenir jusqu'à 40 milliards de m3 d'eau et produira 18 200 mégawatts en 2009. Surtout, sa création a englouti des centaines de villes et villages sous ses eaux et nécessité le déplacement de 1,2 million d'habitants sans aucune aide publique. Selon les associations de défense des Droits de l'Homme, la moitié aurait été relogée dans des immeubles vétustes et fragiles. Les paysans expropriés n'ont pas retrouvé de terres aussi riches empêchant, de fait, l'agrumiculture traditionnelle de se poursuivre. Le barrage aurait également noyé 1 300 sites historiques et archéologiques. Enfin, le séisme du Sichuan en 2008 a révélé un autre risque potentiel : 75 millions de personnes vivant en aval seraient menacées en cas de rupture du barrage
     

    DE LONGS FLEUVES TRANQUILLES

    leonid brejnev
    Leonid Brejnev © G. Ford Library
     
    Il était une fois quatre fleuves sibériens capables de transporter suffisamment d'eau pour irriguer 4 ou 5 millions d'hectares de cultures. Mais la nature, dans sa folie, emmenait leurs eaux précieuses vers les terres glaciales du nord avant de les jeter dans l'océan Arctique. Une folie que l'URSS a tout simplement voulu corriger. En 1968, le comité central du Parti communiste, dirigé par Leonid Brejnev, ordonne à plusieurs instituts de renverser le cours de Itych et de l'Ob. Des canaux de 2500 km et de gigantesques centrales seront chargés d'impulser l'eau vers le sud et les steppes d'Asie centrale. L'URSS envisageait d'y parvenir en moins de dix ans avec un budget de 20 milliards de dollars. Des dizaines de milliers d'ingénieurs seront mobilisés pendant des années. Mais en 1985, Mickaël Gorbatchev, l'un des fervents soutiens du projet à l'origine, lance la Perestroïka qui aura définitivement raison du projet.
     

    SIMPLE REPORT D'ÉLECTIONS

    issayas afeworki
    Issayas Afeworki © UN Photo-Eskinder Debebe

     

    Si la démocratie n'était pas un sujet aussi sérieux, on pourrait sans doute s'amuser des manœuvre des dictateurs pour éviter la sanction des urnes. La stratégie d'Issayas Afeworki, le président de l'Erythrée, a par exemple de quoi étonner. Leader indépendantiste, il obtient la fin de la tutelle éthiopienne en 1993 après un référendum victorieux. Une constitution sera adoptée quatre ans plus tard qui prévoit l'instauration de la démocratie. Mais aucune élection n'est organisée et le Parti unique devient bientôt la règle. Devant les protestations, Afeworki, décrit par RSF comme un "dictateur impitoyable", n'hésite pas à utiliser la force. En mai 2008, il tente pourtant de légaliser cette dictature de fait. Il annonce alors que les élections seront reportées de "trois ou quatre décennies ou plus". La raison invoquée est simple : les scrutins démocratiques "polarisent la société" selon le dirigeant. Elémentaire.

     

    LE TRÈS LONG DISCOURS DE FIDEL

    fidel castro
    Fidel Castro © Françoise de Mulder, Roger-Viollet
     
    En 1998 à Cuba, Fidel Castro a battu un record des plus originaux : un discours de politique générale sur l'avenir de l'île a duré pas moins de 7 heures et 15 minutes sans une seule interruption du "Leader Maximo". Castro, au pouvoir depuis le coup d'Etat de 1959, est alors tenté par un bilan de sa longue présidence. Devant les 595 députés qui venaient de le réélire pour les cinq prochaines années, il a ainsi vanté les mérites du socialisme. Le flamboyant dictateur cubain n'en est d'ailleurs pas à son premier discours fleuve. Avec des prestations de trois ou quatre heures, parfois suivies (ou subies) par toute la population de l'île, il en est même un des spécialistes au monde. Aux Nations unies, en 1960, il avait inscrit son nom au Guinness des records pour un discours de 4 heures et 29 minutes. En 1986, lors du Congrès du Parti communiste à la Havane, son discours avait duré 7 heures et 10 minutes.
     

    LES FÊTES ROYALES DE MSWATI III

    le roir mswati iii
    Le Roir Mswati III © UN Photo Marco Castro
     
    Le roi Mswati III a gardé de l'ancien régime de nombreux travers, et en particulier le goût des réceptions ostentatoires. Une réunion du Commonwealth en 2003 a donné l'occasion de mesurer ses extravagances.Pour donner une bonne image de son petit pays, le Swaziland, l'un des plus pauvres d'Afrique, le souverain, passionné d'automobile, s'était offert une Mercedes de luxe ainsi qu'une quinzaine de BMW pour les épouses de son père. Près de 100 millions d'emalangenis (près de 10 millions d'euros) avaient alors été dépensés pour ce sommet. Plus récemment, en septembre 2008, il a provoqué le scandale en dépensant près de 10 millions d'emalangenis pour fêter son 40e anniversaire ainsi que celui de l'indépendance. Pour l'occasion, plusieurs dizaines de milliers de vierges ont également dansé seins nus devant le roi, pour l'annuelle "Danse du Roseau".
     
     

    UNE MER ARTIFICIELLE DANS LE DÉSERT

    gourbangouly berdymoukhammedov
    Gourbangouly Berdymoukhammedov© Kremlin.ru
     
    Au Turkménistan, Gourbangouly Berdymoukhammedov n'est pas encore aussi connu que son prédécesseur, Saparmurat Niyazov. Mais en 2009, l'inauguration de l'Altyn Asyr ("l'âge d'or"), lui aura donné l'occasion de soigner son image. Berdymoukhammedov a en effet poursuivi et accéléré le projet d'un lac géant, construit de toutes pièces en plein désert du Karakoum. Long de plus de 100 km sur 20 km, il est censé recevoir les eaux de drainage de tout le pays grâce à des tuyaux de plus de 2 600 km... mais aussi de fournir à la population 30 000 tonnes de poisson par an ! Alimentée par le fleuve Amou-Daria, il menace les équilibres écologiques et pourrait assécher la mer d'Aral déjà en voie de disparition. Mais le projet de 4,5 milliards de dollars dépasse ces considérations bassement écologiques pour le président : il prévoit, à termes, de transférer la capitale sur les abords de cette nouvelle "mer turkmène".
     

    PLUS GRAND QUE LE VATICAN

    la basilique notre-dame de la paix
    La basilique Notre-Dame de la Paix© Anna Fudge / JFKLibrary
     
    En 1983, le président de la Côte-d'Ivoire, Félix Houphouët-Boigny, veut bâtir une église digne des plus grandes cathédrales d'Europe pour son pays. Fervent catholique, c'est lui qui choisit lui-même son emplacement, près de Yamoussoukro. La basilique Notre-Dame de la Paix deviendra vite un sujet de vives polémiques. Lancée sans concertation, sa construction prendra plus de quatre années, de 1985 à 1989, et coûtera au pays 100 milliards de francs CFA, soit 1 milliard de francs de l'époque (150 millions d'euros). Il faut dire qu'Houphouët-Boigny n'a pas lésiné sur son aspect puisqu'il s'agit d'une authentique copie, "en un peu plus grand", de la basilique Saint-Pierre de Rome. Son dôme gigantesque est haut de 160 m et fait 135 000 m². La première pierre a été posée par le pape Jean-Paul II lui-même et le livre Guinness des records l'a reconnu comme le plus grand édifice chrétien au monde.
     
     

    UNE GRANDE "MAISON DU PEUPLE"

    la maison du peuple de bucarest
    La Maison du peuple de Bucarest © Tomi Eronen
     
    Le Parlement roumain est une oeuvre unique. Siège des députés et sénateurs, il est second au classement des bâtiments les plus grands du monde après le Pentagone. Mais les Roumains n'ont toujours pas cessé de l'appeler par son premier nom : la "maison du Peuple" (Casa Poporului). Quand sa construction débute en 1984, il est le fruit de l'imagination de Nicolae Ceaucescu. Le président de la République socialiste de Roumanie veut alors y installer les principaux organes du régime : la présidence, la "Grande assemblée nationale", le Conseil des ministres et le Tribunal suprême. Il fait alors raser 520 hectares, soit 1/5e de la capitale, expulser 40 000 personnes et mobiliser 40 % du PIB roumain, pour cette construction de 270 m sur 240. En 1989, à la chute du dictateur, celle-ci était à peine achevée. Aujourd'hui, le bâtiment accueille un espace dédié au totalitarisme.
     

    DE LA DANSE AUX DISCOURS

    omar el-béchir
    Omar el-Béchir © UN Photo Tim McKulka

     

    Les crimes commis au Darfour par le régime lui ont valu un mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale le 4 mars 2009. Mais Omar el-Béchir, chef de l'Etat soudanais depuis 20 ans, continue à parader. Discret lors de son arrivée au pouvoir, le dirigeant du plus grand pays d'Afrique a changé d'image ces dernières années. Si sa calvitie, son embonpoint, sa moustache et ses lunettes pourraient faire de lui le prototype du parfait technocrate, el-Béchir a choisi d'imposer un style radicalement opposé. En habit militaire ou en tunique blanche, coiffé d'un turban ou d'un chapeau à plume traditionnel : à chacune de ses apparitions et avant chacun des ses discours il a l'habitude de danser pour chauffer son public. Empruntés aux traditions des tribales et arabophones du pays, ces pas de danse indéfinissables ont finit par imprimer sa marque au même titre que sa canne que le chef agite régulièrement devant les caméras.

     

    DES CENTRALES NUCLÉAIRES FLOTTANTES

    la ville de severodvinsk sur la côte russe
    La ville de Severodvinsk sur la côte russe© Kremlin.ru / Dmitry Marochko

     

    Après le drame de Tchernobyl, toute inovation nucléaire en Russie provoque son flot de commentaires inquiets de la communauté internationale. Et cela a été d'autant plus vrai en 2007, quand Vladimir Poutine a annoncé la création de plusieurs mini-centrales nucléaires "flottantes". Ce projet de 9 milliards de roubles (257 millions d'euros) vise à assurer l'alimentation en énergie de zones isolées de la fédération de Russie. Sur les six centrales prévues, la première, construite au large de Severodvinsk, devrait produire, grâce à deux réacteurs, 70 mégawatts (contre 900 pour une centrale française). Suffisamment pour alimenter un chantier militaire de sous-marins nucléaires. Cette usine, ressemblant à un brise glace devrait être à la fois moins chère, plus écologique et plus sure que les centrales classiques. Une affirmation dont doutent les associations comme Greenpeace qui estime qu'il s'agit déjà d'un "Tchernobyl sur le Titanic".

     

    UNE TOUR KADHAFI À DAKAR

    abdoulaye wade et mouammar kadhafi
    Abdoulaye Wade et Mouammar Kadhafi© US Navy / UN photo Marc Garten
     
    Samedi 21 février 2009. Mouammar Kadhafi est l'invité du président sénégalais Abdoulaye Wade. Devant le port de Dakar, les deux chefs d'Etat posent la première pierre d'un édifice peu commun. À travers sa fondation, le Guide libyen a décidé d'offrir à l'Afrique la "Tour Kadhafi", la première tour solaire du monde. Gigantesque pyramide noire surplombant Dakar, elle a été conçue par l'architecte du président sénégalais Pierre Goudiaby "Atepa". Au terme de ses trois années de construction au Cap Manuel, elle mesurera 200 m de haut, soit 60 niveaux et 100 000 m2. Les travaux créeront 2 000 emplois pendant 3 ans. Une fois terminé, l'ouvrage générera 80 % de son énergie électrique grâce à de grands panneaux solaires fixés sur sa façade. Coût global de ce chantier pharaonique : "plus de 120 milliards de francs CFA (180 millions d'euros)".
     
     

    Histoire:  Les projets fous des chefs d'Etat

     
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    PRÉSIDENTS, ROIS, EMPEREURS... ILS ONT PERDU LA BOULE !

    paranoïa, folie des grandeurs, dépression...  
    Paranoïa, folie des grandeurs, dépression... © BNF / Bayerische Staatsgemaldesammlungen, Munich / Wikimedia - Diagram Lajard / Montage Linternaute.com

     

    Louis II de Bavière, Charles VI, Caligula, Paul Deschanel, ou plus récemment Saparmourat Niazov... Au cours de leur règne ou de leur mandat, ils se sont pris pour Jupiter, sont tombés du train en marche ou ont tué gratuitement des membres de leur suite. Découvrez leurs étranges histoires.

     

    LOUIS II DE BAVIÈRE : BÂTISSEUR EXCENTRIQUE

    louis ii à vingt ans
    Louis II à vingt ans © Ferdinand von Piloty / De 20 jarige Ludwig II in kroningsmantel / Bayerische Staatsgemaldesammlungen, Munich

     

    Sa fin mystérieuse et ses châteaux fantasmagoriques ont façonné sa légende. Louis II de Bavière (1845-1886), assiste impuissant à l'unification progressive de l'Allemagne au détriment de son royaume. Il se réfugie dans ses rêveries. Sur un éperon rocheux des Alpes, il fait bâtir l'incroyable château de Neuschwanstein, avec ses tapisseries rappelant les légendes médiévales ou celui de Linderhof avec sa grotte factice. Le roi erre la nuit, pendant que les politiques bavarois voient les caisses de l'Etat se vider. En 1886, il est déclaré fou. Interné au château de Berg, près de Munich, il part se promener après dîner avec son psychiatre. Le corps des deux hommes est retrouvé au bord de l'eau. Aujourd'hui encore, les théories expliquant leur mort abondent. 

     

    CHARLES VI : PERSUADÉ D'ÊTRE EN VERRE

    dans la forêt du mans, charles vi bascule dans la folie.
    Dans la forêt du Mans, Charles VI bascule dans la folie. © Jean Froissart — Banque Nationale de France

     

     Au début, il était "Charles le Bien-Aimé". Plus tard, il fut pour ses sujets "Charles le fou". Le roi Charles VI de France (1368-1422) avait vaincu les Flamands et écrasé les révoltes fiscales. Mais en 1392, alors qu'il traverse à cheval la forêt du Mans, il est soudain persuadé d'être trahi. Il tue quatre membres de sa suite puis perd connaissance. Quelques mois plus tard se produit le tragique Bal des ardents : lors d'une fête déguisée, le duc d'Orléans met malencontreusement le feu à la tenue d'un des personnages. Quatre invités meurent et Charles VI en réchappe de justesse : dès lors, le roi oscille entre lucidité et démence, parfois persuadé d'être constitué de verre ou de se transformer en loup. Ses oncles prennent la régence et la Guerre de Cent-Ans repend. II meurt en 1422.

     

     

    BOKASSA IER : EMPEREUR MÉGALO

    l'empereur bokassa ier perdra le soutien de la france en s'alliant avec le
    L'empereur Bokassa Ier perdra le soutien de la France en s'alliant avec le colonel Kadhafi. © BOCCON-GIBOD/SIPA

     

    Président de la République Centrafricaine depuis un coup d'Etat militaire en 1966, Jean-Bedel Bokassa (1921-1996) devient un dictateur mégalo. Il emprisonne son fils qui a raté son bac, achète des voitures de course et se marie à 14 femmes. En 1977, il organise au Palais des sports de Bangui un couronnement télévisé inspiré par le sacre de Napoléon Ier. Justification : créer un empire fera mieux connaître la Centrafrique aux investisseurs étrangers. Au menu : défilés, dorures, couronne, sceptre et cape écarlate doublée d'hermine. Comme Napoléon, l'empereur pose lui-même sa couronne sur sa tête. Le président de la République Valéry Giscard d'Estaing dépêche une équipe de tournage de l'armée française pour filmer la cérémonie. Moins de deux ans plus tard, Bokassa Ier est renversé par les services secrets et des parachutistes français.

     

    JEANNE LA FOLLE : JALOUSIE MALADIVE

    elle était la mère de charles quint
    Elle était la mère de Charles Quint © Jean de Flandres / Kunsthistorische Museum

     

    Reine de Castille et d'Aragon (Espagne), Jeanne (1479-1555) avait épousé Philippe le Beau, fils de l'Empereur Maximilien Ier de Habsbourg. Eperdument amoureuse, elle empêche toutes les femmes de la cour d'approcher son mari - qui est réellement infidèle - et ne s'entoure que de personnes considérées comme laides. Elle se laisse aller à la mélancolie et délaisse la politique. Les princes complotent contre elle. Lorsque Philippe meurt, elle refuse qu'on l'enterre et demande plusieurs fois que l'on ouvre le cercueil pour qu'elle puisse embrasser le cadavre. Destituée par son fils, Charles Quint, elle est internée dans un couvent de Tordesillas, où sa santé mentale se détériore encore plus. Elle meurt en 1555.

     

    CALIGULA : IL SE PRENAIT POUR JUPITER

    caligula régna pendant quatre ans
    Caligula régna pendant quatre ans© Wikimédia - Diagram Lajard

     

    Etait-ce de la folie ou de l'ironie à son paroxysme ? Caligula (12-41 de notre ère) était le troisième empereur romain après Auguste et Tibère. Selon les chroniqueurs de l'époque, il est saisi d'une obscure maladie. Il guérit mais son comportement devient étrange et plein de morgue : il se plaint d'être hanté par des fantômes de la mer, ne dort plus, pratique l'inceste avec ses sœurs, assure être Jupiter et coucher avec la Lune. Selon Suétone, il nomme son cheval Incitatus consul et lui offre un palais et des domestiques. Il aurait également ordonné aux soldats de ramasser les coquillages sur les plages et aux sénateurs de prostituer leurs femmes. Pourtant, les dernières études remettent en cause la véracité de ce témoignage. En 41, des soldats de sa garde l'assassinent.

     

    PAUL DESCHANEL : ANGOISSÉ PLUS QUE FOU

    paul deschanel retrouva vite ses facultés
    Paul Deschanel retrouva vite ses facultés© Bain news Service / Library of Congress

     

    Ancien président du Conseil – notre actuel Premier ministre - Paul Deschanel arrive à l'Elysée en 1920. Le 23 mai, il tente d'ouvrir la fenêtre du train de nuit qui l'emmène en visite à Montbrison. Il tombe. Heureusement, le train roulait à faible allure. Ensanglanté, en pyjama, il se présente en pleine nuit auprès d'un garde-barrière. Le lendemain, on s'étonne de ne pas le retrouver dans son compartiment. L'affaire fait grand bruit : la presse et les chansonniers rapportent (de manière inexacte) que le président de la République se serait baigné avec les canards de l'Elysée et signerait Vercingétorix sur les décrets. En réalité, il était dépressif et sujet à des crises d'angoisse. Il démissionne le 21 septembre 1920, arguant que "son état de santé ne (lui) permet plus d'assumer les hautes fonctions". Il se rétablit, revient en politique, puis meurt en 1922.

     

    GEORGE III : ENFERMÉ DANS SON PALAIS

    la première partie de son règne avait été heureuse...
    La première partie de son règne avait été heureuse... © Portrait de George III par Benjamin West, Cleveland Museum of Art

     

    Pour les enfants britanniques, il est le "roi fou qui a perdu l'Amérique". Le règne de George III (1760-1820) a été marqué par les guerres en Europe et en Amérique du Nord, mais aussi sa descente progressive dans l'aliénation. En 1811, le prince de Galles devient régent et le roi est enfermé dans le château de Windsor. Là, il pleure des journées entières, prononce des phrases longues de 400 mots avant que sa bouche ne dégage de la bave et qu'il soit pris de violentes convulsions. Ses bouffées délirantes sont immortalisées dans le film "La folie du roi George", sorti en 1994. Les causes de son trouble meurent disputées. Si certains chercheurs évoquent une porphyrie (maladie touchant la peau et le système nerveux), d'autres analyses y voient un trouble maniaco-dépressif.

     

    IBRAHIM IER : SULTAN INSTABLE

    ibrahim ier fut l'objet d'un régicide
    Ibrahim Ier fut l'objet d'un régicide© Wikimedia - Osmanl?98

     

    Dès son enfance, la vie du sultan de l'Empire Ottoman Ibrahim Ier (1615-1648) fut des plus étranges. Son grand frère, Mourad IV l'avait fait enfermer dans une sombre partie d'un palais d'Istanbul. Mourad fit exécuter quatre de ses frères, conduisant le jeune Ibrahim à la paranoïa. Après la mort de son grand frère, il devient sultan. Il se promène déguisé dans les marchés de la ville pour inspecter les marchandises, mais fréquente surtout son harem et ses concubines (il se marie avec l'une d'elle et fait couvrir le palais de fourrure). Atteint par des maux de tête infernaux, il rejette sa mère et place ses favoris à toutes les fonctions stratégiques de l'empire. La foule le critique et le Grand Vizir passe à l'action : Ibrahim est étranglé le 18 août 1648.

     

    NABUCHODONOSOR II : SE PRENAIT POUR UN ANIMAL

    nabuchodonosor commande une exécution
    Nabuchodonosor commande une exécution © Wikimedia Commons - Tableau de François Xavier Fabre

     

    Roi de l'empire néo-babylonien (605 à 562 avant notre ère), Nabuchodonosor II était l'un des hommes les plus puissants de l'Antiquité. Sa vie est décrite dans la Bible, sans doute de façon romancée. Selon cette source, il aurait fait ériger des statues en or grandioses et remporté des batailles mais aussi basculé pendant sept ans dans la folie. Pendant cette période, il erre parmi les animaux en étant persuadé d'être l'un d'entre eux. Les observateurs de l'époque y voient une punition de Dieu ou un échange d'âme avec un boeuf. Des médecins d'aujourd'hui traduisent les symptômes évoqués comme un cas de porphyrie, voire de syphillis qui aurait dégénéré.

     

     

    SAPARMOURAT NIAZOV : LE CULTE DE LA PERSONNALITÉ À SON PAROXYSME

    le président niazox est mort en 2006
    Le président Niazox est mort en 2006© SICHOV/SIPA

     

    Chef du parti communiste turkmène, Saparmourat Niazov (1940-2006) a gardé le contrôle du pays lorsque celui-ci est devenu indépendant de l'URSS, en 1991. Président à vie, "Turkmenbachi" (père des Turkmènes), il interdit le théâtre et l'opéra. Il impose aux citoyens la lecture du Ruhnama, équivalent autoproclamé de la Bible et du Coran et "guide spirituel de la nation" : il est par exemple nécessaire d'en connaître des passages pour obtenir son permis de conduire. Il apparaît sur tous les billets et rebaptise les différents mois de l'année. Dans la capitale, Ashgabat, il fait ériger des monuments spectaculaires et une statue en or le représentant. Il meurt en 2006 d'une crise cardiaque.

     

    Histoire:  Présidents, rois, empereurs... Ils ont perdu la boule !

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  • La véritable histoire de Barbe-Bleue

      
    © Linternaute.com

    Charles Perrault n'a pas inventé Barbe-Bleue à partir de sa seule imagination, il s'est largement inspiré d'une personnalité ayant existé, le roi d'Angleterre Henri VIII (1491-1547). Ce monarque eut pas moins de 6 épouses : certaines moururent naturellement, d'autres divorcèrent et les dernières eurent la tête coupée. Toute ressemblance avec un personnage imaginaire est loin d'être fortuite...

    Henri VIII, un prince (pas vraiment) charmant

    Dates : 1491-1547

    Titre : Roi d'Angleterre (1509-1547)

    henri viii
    Henri VIII © Visipix

    Prince charmant et fils cadet

    Né en 1491, Henri VIII est le deuxième fils du roi Henri VII Tudor. Par son rang, il n'est pas destiné à régner : c'est son frère aîné, Arthur, qui est l'héritier direct du trône. En 1501, Arthur épouse la fille du roi d'Espagne, Catherine d'Aragon. Celle-ci, en plus d'être belle et intelligente, est pourvue d'une dot fort importante. Mais le prince héritier a une mauvaise constitution et meurt quelques mois après l'union. En 1502, Henri devient l'héritier du trône d'Angleterre et un parti très convoité : grand, athlétique, il a la réputation d'être "le plus beau prince de l'Europe".

    Marié à sa belle-soeur

    Mais la veuve reste un parti intéressant. Le roi d'Angleterre n'entend pas rendre Catherine à son père... et encore moins sa dot. Il propose donc de donner la jeune veuve à Henri. Pour que le mariage soit possible, il faut vérifier que la première union n'a pas été consommée, sauf dispense papale. Ni une ni deux, le pontife Jules II accorde la dispense de constatation de virginité. A 19 ans, Henri, très amoureux, épouse Catherine, de 6 ans son aînée. La première de ses six femmes...

    Catherine d'Aragon, la femme répudiée

    Dates : 1485-1536

    Titres : Première femme de Henri VIII (1509-1532)

    catherine d'aragon
    Catherine d'Aragon © Kunsthistorisches Museum, Vienne

    Un mariage fastueux et heureux

    Le nouveau roi aime le faste, le luxe, la fête et est très amoureux de son épouse. Comme le veut la tradition, il commence son règne en faisant décapiter deux des anciens conseillers de son père. Côté vie privée, le roi et la reine, bien que de cultures fort différentes, s'estiment. Seule ombre au tableau : l'héritier mâle tarde à arriver.

    Le divorce à l'anglaise
    Vers 1523, Henri s'interroge : en 20 ans de mariage, Catherine n'est parvenue à lui donner qu'une fille, Marie. La différence d'âge se fait sentir et la vieille reine ne peut plus porter d'enfant. Par ailleurs, il s'est entiché de la jeune Anne Boleyn, qui se refuse à lui tant qu'ils ne sont pas mariés. Mais comment se débarrasser de l'infante d'Espagne, tante du très puissant Charles Quint ? Comment faire annuler le mariage alors que le pape s'y refuse ? Henri invoque l'inceste (n'a-t-il pas épousé la femme de son frère ?), mais rien n'y fait. Finalement, l'ecclésiaste Thomas Cranmer trouve une solution : il suffit de décider que le roi d'Angleterre va également être le chef de l'Eglise. Henri est libéré et crée l'Eglise anglicane...

    Anne Boleyn, une intrigante exigeante

    Dates : 1507-1536

    Titres : Deuxième femme de Henri VIII (1533-1536)

    anne boylen

    Anne Boylen © National Portrait Gallery

    Une intrigante en Cour d'Angleterre
    Fille de gentilhomme, Anne Boleyn a été élevée à la Cour de François Ier, où elle a accompagné Marie d'Angleterre (l'épouse de Louis XII). En France, la jeune femme a collectionné les soupirants et peut-être même les amants. En 1525, à son retour en Angleterre, elle est attachée à la reine Catherine d'Aragon. Henri VIII s'éprend rapidement d'elle et la couvre de titres et de bijoux. Mais cela ne suffit pas à la jeune femme, qui ne cède pas aux avances du roi : pour l'avoir, il devra lui passer la bague au doigt...

    Du trône à l'échafaud
    Le mariage a lieu en 1533. Le roi est fou amoureux et gâte son épouse, mais il est vite déçu. Très jalouse, colérique, la jeune femme ne lui donne par ailleurs qu'un enfant vivant, et ce n'est qu'une fille (la future Elizabeth Ière) ! Henri décide de se défaire de sa femme et l'accuse de trahison, d'adultère et même d'inceste avec son frère, George Boleyn. Le procès est expéditif. Le 19 mai 1536, deux jours après son frère, elle est décapitée par un bourreau spécialement venu de France, qui lui tranche la gorge d'un coup d'épée.


     

    Jane Seymour, la femme aimante

    Dates : 1507-1536

    Titre : Troisième femme de Henri VIII (1536-1537)

    jane seymour

    Jane Seymour © Kunsthistorisches Museum, Vienne

    Une union paisible
    Une semaine après l'exécution d'Anne, Henri prend Jane Seymour pour épouse. Cela fait plusieurs mois déjà qu'il fréquente la jeune femme. Douce, modeste, calme et de sang royal, cette jeune demoiselle d'honneur est tout le contraire d'Anne. Très aimée de la Cour, elle apporte la paix au roi Henri, notamment en pacifiant ses rapports avec Marie, la fille qu'il a eue avec Catherine d'Aragon. Le roi, quant à lui, a bien changé : le prince dont toutes les princesses d'Europe étaient éprises s'est transformé en colosse obèse et aux traits boursouflés.

    Un fils, enfin !
    En 1537, Henri VIII éprouve enfin la joie qu'il attendait depuis des années : Jane Seymour lui donne le fils tant espéré, Edouard. Mais cette joie va de pair avec une nouvelle moins heureuse : 12 jours après la naissance de l'enfant, Jane meurt d'une fièvre puerpérale (maladie infectieuse qui peut suivre un accouchement). Henri fait construire un monastère bénédictin en son honneur et la fait enterrer à la chapelle Saint-Georges de Windsor. Le mariage aura duré à peine un an et demi.

    Anne de Clèves, reine grâce à son portrait

    Dates : 1515-1557

    Titre : Quatrième femme de Henri VIII (1540)

    anne de clèves

    Anne de Clèves © Musée du Louvre, France

    Séduit par un portrait
    Après la disparition de Jeanne Seymour, le roi, décidé à épouser une princesse, envoie ses émissaires dans toute l'Europe pour lui chercher une nouvelle femme. Parmi ses ambassadeurs envoyés sur le continent se trouve notamment le peintre allemand Hans Holbein. Il est chargé de faire les portraits des jeunes filles pour que le roi prenne sa décision : sont ainsi envoyés à Londres les tableaux de Christine de Danemark, de Louise de Guise, Anne de Lorraine, mais c'est finalement celui d'une princesse allemande, Anne de Clèves (que l'on peut voir ici), qui séduit le roi. Henri VIII voit par ailleurs d'un bon œil une alliance avec une maison protestante allemande.

    A peine arrivée, déjà repartie
    Mais la princesse allemande ne correspond guère aux attente de Henri : grande, maigre, fade, elle porte des toilettes peu seyantes, ne parle qu'allemand et ne sait pas apprécier la musique. Le roi la surnomme la "jument des Flandres" et s'ennuie tant à ses côtés qu'au bout de 6 mois, il l'envoie vivre à Richmond. Pour ne pas blesser les princes allemands, il lui alloue une rente princière. Anne vivra tout le reste de sa vie en Angleterre, discrètement et paisiblement.

     

    Catherine Howard, la femme-enfant

    Dates : 1522-1543

    Titre : Cinquième femme de Henri VIII (1540-1542)

    catherine howard

    Catherine Howard © Toledo Museum of Art, Toledo

    Une jeune femme vive et fraîche...
    Après avoir fait annuler son mariage avec la fade Allemande, le roi vieillissant s'éprend de Catherine Howard. La jeune Anglaise, âgée de 18 ans, est vive, piquante, insouciante. Issue d'une grande famille aristocratique, celle des Norfolk, d'une très grande beauté et fort courtisée avant son mariage, elle fait tourner la tête du roi, qui apprécie son côté "femme-enfant" et la surnomme bientôt sa "rose sans épine".

    ... Mais délurée
    Mais la jeune écervelée conserve ses habitudes prises avant le mariage, en continuant à avoir des aventures, désormais adultérines. Au cours d'une absence prolongée du roi, pendant l'été 1541, elle noue une relation avec Francis Derham, bel esprit des soirées mondaines. Mais on ne trompe pas un roi impunément ! On vient bientôt lui demander des comptes et la jeune femme, après s'être fait promettre la clémence du roi, passe aux aveux. Mal lui en prend : fou de rage, Henri VIII la fait décapiter en février 1542. Et édicte une loi : désormais, seront condamnées à mort toutes les femmes n'étant pas vierge et ne l'ayant pas avoué au roi avant leur union et toutes les femmes de prince ou les reines convaincues d'adultère.

    Catherine Parr, l'ultime survivante

    Dates : 1508-1548

    Titre : Sixième femme de Henri VIII (1543-1547)

    catherine parr

    Catherine Parr © Toledo Museum of Art, Toledo

    Une femme de bonne compagnie
    Un an après l'exécution de Catherine Howard, Henri VIII décide d'épouser une dernière Catherine : celle-ci a 31 ans, est veuve et s'appelle Catherine Parr. Le roi cherche avant tout une garde-malade attentive : devenu impotent, il doit se faire porter pour monter l'escalier. Catherine répond à tous ses désirs : prudente et sage, cette femme "sans grand charme" est également très cultivée et intelligente, et prend grand soin des enfants du roi. Attentionnée, elle s'occupe également très bien de son mari de plus en plus malade et... tyrannique.

    Une fin de règne dans la terreur
    Il faut dire qu'il suffit de peu pour s'attirer les foudres du vieux monarque. Henri VIII, à la fin de sa vie, a pour principal loisir de couper les têtes de ses anciens proches et conseillers : tous les cousins et petits cousins du roi montent sur l'échafaud les uns après les autres, tout comme l'ancien conseiller Thomas Cromwell. Le règne, commencé dans la joie, se termine dans la terreur.

    En savoir plus

    Des intérêts personnels qui ont marqué l'Angleterre

    Si la vie privée de Henri VIII le fait apparaître comme le "Barbe-Bleue du XVIe siècle", son règne a aussi été marqué par des événements majeurs en termes politiques. Henri VIII est avant tout le créateur de l'Anglicanisme. Certes, sa décision de créer une Eglise d'Angleterre a été surtout motivée par des intérêts personnels et par l'envie de répudier Catherine d'Aragon mais elle a durablement transformé la religion en Angleterre.

    Les spécificités de l'Eglise anglicane

    En 1534, Henri VIII fait rédiger l'acte de suprématie qui fait du roi et de ses successeurs "le chef unique et suprême de l'Église d'Angleterre", une première dans ce pays, où le roi a désormais entre ses mains les pouvoirs politique et religieux. Se considérant comme une Eglise catholique non-romaine, l'Eglise anglicane permet cependant aux clercs (prêtres et évêques) de se marier et d'avoir des enfants. Dans la plupart des églises anglicanes, il est également possible pour les femmes d'être ordonnées prêtres. henri viii, roi d'angleterre  

    Henri VIII, roi d'Angleterre © Hans Holbein le jeune
      
      
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  • En images : revivez le Jour-J, heure par heure

    Au large de l'Angleterre

    Début juin 1944 - Au large de Weymouth, ces rangers britanniques s'entrainent pour l'opération Neptune. C'est la phase d'assaut de l'opération Overlord. Les Alliés veulent créer une tête de pont en Normandie, s'emparer au plus vite de ports en eaux profondes comme Cherbourg (pour assurer l'approvisionnement), puis s'emparer de l'ouest de la France. Après plusieurs reports, le 6 juin devient le D-Day (ou Jour-J) du début du débarquement.
    ©  Conseil Régional de Basse-Normandie / National Archives USA

    Le grand départ

    Début juin 1944 - Au sud de l'Angleterre, les Alliés se préparent pour la plus grande opération logistique jamais vue. A Southampton, Newhaven ou Weymouth (on reconnaît ici le pavillon de cette station balnéaire), camions, armes, munitions et hommes sont chargés à bord de milliers d'embarcations, du destroyer à la péniche.
    ©  Conseil Régional de Basse-Normandie / National Archives USA

    Les parachutistes sont prêts

    Mardi 6 juin 1944, 1 heure du matin - Les hommes de la 101e division aéroportée américaine survolent la Manche à bord d'un C-47. A partir d'1h20, ils se jettent dans les ténèbres. Plus de 6 000 hommes atterrissent autour de Carentan et de Sainte-Mère-Eglise. Ils doivent détruire des ponts et s'emparer des routes pour protéger le débarquement marin à Utah beach, prévu pour le petit matin. Souvent mal largués, les hommes s'organisent en peti... Lire la suite   
    ©  Conseil Régional de Basse-Normandie / National Archives USA

    En attente

    Mardi 6 juin 1944, 5 heures - Le jour qui se lève est maussade. Les hommes se préparent pour l'Heure-H. En fin de nuit, beaucoup sont passés des navires de transports aux barges de débarquement. En tout, ce sont plus de 1200 vaisseaux de guerre et 700 bateaux de soutien qui stationnent à 10 milles nautiques puis s'avancent vers les côtes. D'ici la tombée de la nuit, 156 000 soldats américains, britanniques, canadiens, ou membres de la Fran... Lire la suite   
    ©  Conseil Régional de Basse-Normandie / National Archives USA

    Drapeau et ballons

    Mardi 6 juin, petit matin - La bannière étoilée flotte au dessus de la Manche. Ce sont 59 000 soldats américains qui se préparent à mettre le pied sur le sol normand. Les navires se suivent en files régulières à l'approche des côtes. Chacun d'eux est relié à un ballon captif par un cable d'acier. Celui-ci permet d'éviter le passage des avions ennemis à basse-altitude.
    ©  Conseil Régional de Basse-Normandie / National Archives USA

    L'heure-H

    Mardi 6 juin 1944, 6h30 - C'est l'heure-H. Navires et barges se précipitent vers Omaha et Utah Beach. Les premiers chars roulent sur le sable tandis que les soldats progressent dans l'eau froide.
    ©  Conseil Régional de Basse-Normandie / National Archives USA

    L'assaut des gardes-côte

    Mardi 6 juin 1944, 7h30 - L'embarcation, un LCVP ("Landing craft, vehicule, personnel") approche à 12 noeuds de la côte avant de ralentir au contact du sable. Le feu ennemi gronde et les hommes avancent vers la plage. Les garde-côte ont de l'eau jusqu'à la taille et leur paquetage sur le dos. C'est l'Heure-H à Utah et Omaha Beach (photo).
    ©  Conseil Régional de Basse-Normandie / National Archives USA

    A bord de l'USS Nevada

    Mardi 6 juin 1944, dans la matinée - Les canons du cuirassé USS Nevada tirent leurs lourdes charges en direction de la batterie d'Azeville, puissante casemate du Mur de Normandie située tout près d'Utah Beach (cette poche de résistance allemande ne tombera que le 9 juin). La précision des tirs du navire devient légendaire, en atteignant des cibles situées à plus de 30 kilomètres.
    ©  Conseil Régional de Basse-Normandie / National Archives USA

    Déchargement

    Mardi 6 juin 1944, vers 11 heures - Un LCI (Landing Craft Infantry) débarque d'autres soldats. Les tirs allemands se sont calmés autour du Widerstandsnest 62, un élément du mur de l'Atlantique situé à proximité d'Omaha Beach. A cet instant, les combattants allemands manquent peut-être de munitions...
    ©  Conseil Régional de Basse-Normandie / National Archives USA

    Les renforts arrivent

    Mardi 6 juin 1944, mi-journée - Les renforts arrivent à Omaha Beach, près de Saint-Laurent-sur-Mer. Trois LCVP débarquent, contenant chacun 200 hommes. La plage est constellée de combattants et couverte d'une fumée blanche. Elle naît des explosions et des incendies allumés dans l'herbe pour aveugler l'artillerie allemande. Quelques positions stratégiques situées le long de la côte ont déjà été prises.
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    Les obstacles s'accumulent

    Mardi 6 juin, mi-journée - Les renforts continuent d'arriver à Omaha Beach. La progression des véhicules est rendue difficile. Six heures après la marée basse, la mer est au plus haut : les soldats arrivent sur un monticule de galets puis doivent franchir une zone de 200 mètres de marécages. Au loin, on aperçoit les hommes grimpant en file indienne le talus d'une cinquantaine de mètres de hauteur qui domine la plage. Sur le plateau, ils do... Lire la suite   
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    L'homme à la capuche

    Un marin de l'US Navy est blessé. Il observe les combats, le long de la falaise qui précède Colleville.
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    Caen sous les bombes

    Mardi 6 juin 1944, 13h30 - Les stratèges britanniques et américains sont unanimes : Caen doit tomber dès le premier jour. La cité est un important nœud ferroviaire vers Paris et possède un aérodrome vital pour les Alliés au moment d'établir une solide tête de pont sur le continent. Les bombardiers commencent à pilonner la ville en début d'après-midi. Mais il faudra près de deux mois pour conquérir Caen.
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    Sword Beach, cible des Britanniques

    Mardi 6 juin, après-midi - Depuis le matin, la seconde armée britannique s'est battue à Sword Beach, une plage longue de huit kilomètres entre Ouistreham et Saint-Aubin-sur-Mer. C'est la plus à l'est des cinq plages du débarquement et c'est d'ici que les troupes doivent se diriger en direction de Caen. Un bombardier américain Martin B-26 Marauder survole les environs.
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    Un homme à terre

    Mardi 6 juin, dans l'après-midi - Un homme a été blessé dans le naufrage de son véhicule de débarquement, à Omaha Beach. Des infirmiers tentent de le soigner. Des bouées de sauvetage servent d'oreiller. Avec Juno Beach, ce site fut le plus meurtrier pour les soldats américains : le bilan reconstitué fait état de 850 tués, 2200 blessés et 720 disparus.
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    Le naufrage de l'USS Tide

    Mercredi 7 juin, 9h40 - Les soldats entendent une explosion retentir au large d'Utah Beach. Le dragueur de mines USS-Tide vient de sauter sur un des explosifs bordant la côte. Cinq hommes sont morts, le navire prend l'eau et penche dangereusement. Les hommes à bord parviennent à être transbordés sur d'autres bateaux avant que l'USS-Tide ne sombre au large de Barfleur.
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    Cimetière provisoire

    Un aumônier américain se tient au milieu de parachutistes tués. Leurs corps sont enveloppés dans leur toile de parachute. Dès le début des opérations, les Alliés prévoient la mise en place de cimetières provisoires pour leurs soldats.
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    Prisonniers

    Vendredi 9 juin 1944 - Des soldats de la Wehrmacht ont été surpris près de Ravenoville, dans la Manche, à quelques kilomètres d'Utah Beach. Les Allemands, qui attendaient une attaque sur le Pas-de-Calais furent surpris par l'ampleur du débarquement. Mais leur résistance fut souvent désespérée et des exactions sont commises dans les deux camps. Il faudra près de deux mois aux Alliés pour s'assurer le contrôle de la Normandie.
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    Vue d'ensemble

    Samedi 10 juin 1944 - Le plus dur commence peut-être pour les Alliés. Ils craignent en effet que l'Allemagne ne regroupe ses forces pour contrer leur offensive. Le ravitaillement et la construction d'un port provisoire débutent pendant que les soldats continuent de se battre dans le bocage. Des dizaines d'embarcations continuent d'accoster à Omaha Beach.
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    Ville martyr

    Août 1944 - Saint-Lô, la préfecture de la Manche est une ville martyr. Comme la plupart des villes normandes, elle a subi batailles de rues et bombardements massifs. On estime que la Bataille de Normandie, décisive pour la Seconde guerre mondiale aurait causé la mort de plus de 50 000 civils.
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  • 28 avril 1760

    Québec

    Victoire du chevalier de Lévis à Sainte-Foy

     
      

    Qui connaît - en France - la victoire remportée par les Français sur les Anglais à Sainte-Foy, près de Québec, le 28 avril 1760 ? L'historien britannique Francis Packman l’a qualifiée de « plus grande victoire française en Amérique, parce qu’elle a fait un jour trembler le sort de la ville de Québec et de ce fait, trembler toute l’Amérique »

    Pendant la guerre de Sept Ans (1756-1763), sous les règnes de Louis XV, George II et George III, Français et Anglais s'affrontèrent sur tous les continents et en particulier en Amérique du Nord où les seconds s'emparèrent de la ville de Québec après la bataille des plaines d’Abraham et la mort de Montcalm, le 13 septembre 1759.

    Malgré cette défaite, la colonie de la Nouvelle-France restait toujours à la France ! Le gros des forces françaises n’avait pas été engagé dans la bataille des plaines d'Abraham. C'est alors qu'intervint le chevalier de Lévis... 

    Marie-Hélène Morot-Sir
    La bataille de Sainte-Foy, 28 avril 1760 (aquarelle de George Campion, vers 1850)

    La Nouvelle-France fait front

    (21 janvier 1721 – 18 juin 1794)Les Anglais avaient, durant tout l’été de 1759, incendié plus d’un millier de maisons et de bâtiments sur la côte sud du fleuve Saint-Laurent, violé les femmes, brûlé des enfants dans l'incendie de leurs maisons, détruit les moulins à farine, brûlé les récoltes et volé le bétail… tout cela sans grande résistance car les hommes étaient à Québec pour défendre la ville. 

    Kamouraska, Rivière-Ouelle, Sainte-Anne, Saint-Roch, Saint-Jean, L’Islet, Cap-Saint-Ignace, Montmagny, Berthier et tant d’autres villages, tous ont été détruits et anéantis par les huit cents soldats du major Georges Scott et les Rangers du capitaine Joseph Goreham envoyés sur les ordres du général James Wolfe !

    Celui-ci ne cachait pas son aversion pour les Français : « J’aurai plaisir, je l’avoue, à voir la vermine canadienne saccagée, pillée et justement rétribuée de ses cruautés inouïes », faisant référence aux victoires franco-canadiennes des années précédentes, insupportables pour cet Anglais convaincu de la supériorité de sa civilisation. « Si nous jugions peu probable que Québec tombe entre nos mains, avait-il écrit à Amherst le 6 mars 1759, je propose que nos canons mettent le feu à la ville, qu’ils détruisent les récoltes, les maisons et le bétail, tant en haut qu’en bas, et je propose d’expédier en France le plus grand nombre possible de Canadiens en ne laissant derrière moi que famine et désolation ».

    Pendant ce temps, les troupes anglaises s’acharnaient sur Québec, si bien qu’à la fin de l’été, après la bataille des plaines d'Abraham, elle était déjà en grande partie  détruite par les bombardements.

    La ville de Québec bombardée par les troupes du général Wolfe, été 1759

    Les Anglais prisonniers de leur conquête

    L’hiver qui suivit fut rude pour les colons mais aussi pour les Anglais enfermés dans Québec, qu’ils avaient dévastée et saccagée, y compris les provisions mises de côté pour passer l’hiver.

    De petits détachements de miliciens français empêchaient la garnison du général anglais James Murray de se ravitailler à l’extérieur. À quoi s'ajoutaient de petits groupes d’Indiens très mobiles, alliés aux Français, qui attaquaient les avant-postes britanniques. Mais pour les Anglais, le pire fut le froid, la ville manquant même de bois de chauffage, auquel se rajouta le scorbut. La garnison tomba de sept mille cinq cents hommes à quatre mille, à peine valides.

    Le chevalier François Gaston de Lévis, un militaire languedocien de quarante ans, prend alors le commandement des opérations à Montréal…

    Pierre de Rigaud de Vaudreuil de Cavagnial (22 novembre 1698 à Québec - 4 août 1778, Paris)Avec l’accord du gouverneur Pierre Rigaud de Vaudreuil, il réorganise les troupes françaises en vue d'attaquer au printemps la garnison de Québec. Ayant tiré les leçons de la défaite des plaines d'Abraham, il va intégrer les miliciens canadiens et les Amérindiens aux troupes régulières.

    Au lieu de s’en tenir à la manière européenne de faire la guerre, parfaitement symétrique, ordonnée et rigoureuse, Lévis s’appuie sur les colons eux-mêmes, sur les compétences que ces Français nés en Nouvelle-France ont acquises depuis un siècle et demi.

    Il fait confiance à leur esprit d'initiative, nourri de la pratique amérindienne de la guerre d’embuscade. En effet, aussi longtemps que les Canadiens avaient fait la guerre avec leurs alliés indiens, ils l'avaient gagnée à la seule exception de cette trop rapide bataille des plaines où le marquis de Montcalm avait jugé peu crédible la manière des colons de se battre à la manière des « Sauvages » !

    Lévis confie à François Charles de Bougainville la défense de l’Est de la colonie et au capitaine Pierre Pouchot, officier des troupes régulières du Béarn, celle de l’Ouest. Il se réserve avec François Charles de Bourlamaque un retour offensif sur Québec, à la tête de 7.000 hommes.

    Le 20 avril, les troupes se mettent en route, les unes descendant par le fleuve, de Montréal à la Pointe-aux-Trembles, où les autres les rejoignent le 25 ; le lendemain, l’avant-garde se met en mouvement, commandée par Bourlamaque, et marche vers la Vieille-Lorette pour atteindre les hauteurs du village de Sainte-Foy, en traversant les marais de la Suette, durant la nuit du 26 avril, malgré un violent orage.

    L'église de Sainte-Foy (Québec)Ni le tonnerre, ni la pluie, ne ralentissent la marche des soldats, qui prennent possession des maisons.

    L’avant-garde franchit un coteau boisé le matin du 27 avril et découvre les Anglais à peine à deux cents toises (400 mètres) de là. Après avoir avancé prudemment le long du coteau, elle s’établit sur la route de Sainte-Foy. Le corps des troupes passe par la droite, en silence cependant que l'arrière-garde se poste près du moulin de Dumont, près des remparts de Québec.

    Mais James Murray, averti de l’approche française, a eu le temps de ramener ses troupes sur Sainte-Foy avant qu’elles ne soient coupées par les deux ailes françaises. Il amasse des munitions dans l’église, qui a l'avantage d'être fortifiée et crénelée. En même temps, il expulse de Québec les bouches inutiles, femmes, enfants, vieillards, sans excès de commisération pour les malheureux livrés au froid et à la disette. 

    Voyant l'ennemi se rapprocher dangereusement, il renonce à tenir Sainte-Foy, fait sauter l'église et replie in extremis ses troupes sur les hauteurs de Québec, avec l'intention de pilonner au canon les troupes françaises.

    Le lendemain, il laisse des troupes en place dans la ville de Québec pour en assurer la défense et se porte au-devant des Français, en terrain marécageux, avec 3.000 hommes, vingt-deux canons et des obusiers.

    François Gaston de Lévis (20 août 1719, Ajac, Languedoc - 26 novembre 1787, Arras)Quatre bataillons et les Montagnards écossais commandés par Burton forment la droite de son dispositif, sur la route de Sainte-Foy. Quatre autres bataillons, sous les ordres de Fraser, forment la gauche, sur le chemin Saint-Luc.

    Le général anglais peut d'autre part compter sur deux bataillons de réserve : l’infanterie du major Dalling qui protège le flanc droit, et la compagnie de Rangers, avec cent volontaires, qui protège le flanc gauche.

    Tout étant en ordre chez les Anglais, la bataille s'engage.

    L’avant-garde française,  composée de dix compagnies de grenadiers, n'a pas perdu de temps et s’est déjà mise en ordre de bataille.

    Les Anglais tentent d'enlever le moulin Dumont, près de Sainte-Foy. Les Français qui l'occupent se replient vers un bois. François Charles de Bourlamaque tombe grièvement atteint d’un boulet qui tue sous lui son cheval. Il décèdera quelques jours plus tard à l’hôpital de Québec. Ses troupes, restées sans recevoir d’ordre, apercevant les grenadiers aux prises avec un ennemi double en nombre, s’élancent d’elles-mêmes à leur secours.

    « En face des Montagnards, les grenadiers attaquent au pas de charge : maison et moulin sont pris et repris plusieurs fois, à l’arme blanche, enfin, il leur reste leurs officiers, le capitaine d’Aiguebelle et le colonel d’Alguier, mais ils y périrent presque tous », raconte le chroniqueur Louis Le Jeune.

    Pendant cette action, le chevalier de Lévis relance à l'offensive son aile droite, composée de colons et de « Sauvages ».

    Le feu devient très vif, les miliciens canadiens se couchent pour recharger les armes et se précipitent ensuite pour fusiller les canonniers sur leurs pièces. Les Montréalais, animés par M. de Repentigny, se distinguent, malgré la mort du colonel Réaume, en arrêtant seuls en rase campagne le centre de l’armée anglaise. L'offensive de Murray a échoué.

    Canonniers anglais autour de Québec, en 1759Les Canadiens armés de leurs baïonnettes attaquent à nouveau avec leurs alliés amérindiens. Ils fondent sur les Anglais, traversent leurs rangs et les mettent immédiatement en fuite, ces diables rouges terrifiant particulièrement les Anglais avec leurs peintures de guerre et leurs cris effrayants, tomahawks brandis.

    Lévis, témoin de la débandade de l’ennemi, enfonce alors sa droite et la pousse de front. La déroute des Anglais est totale.

    Les troupes régulières françaises et les Canadiens les poursuivent au pas de course mais leur fuite est si rapide et les portes de la ville si proches qu’il leur sera impossible d’en empêcher l’entrée aux Anglais.

    Dans leur course pour se mettre à l’abri, ces derniers laissent aux mains des vainqueurs, toute leur artillerie, les munitions, les outils de retranchement, mais aussi leurs morts et la plus grande partie de leurs blessés, près de mille deux cents au total, ce qui fait plus du tiers de leur armée.

    D’après le journal de John Knox, il aurait été sans doute des plus faciles pour les Français de pénétrer aussitôt dans Québec et de s’emparer immédiatement de la ville… Pourtant ils furent dans l’impossibilité de le tenter car, si les Anglais avaient été largement vaincus et décimés, eux-mêmes étaient totalement exténués. Plus de huit cents d’entre eux avaient été tués ou blessés, parmi lesquels un chef de brigade, six chefs de bataillons, quatre-vingt-seize autres officiers, n’ayant eu d’ailleurs à opposer aux vingt-deux canons de Murray que trois seules petites pièces de campagne, traînées à bras dans les marais de la Suette.

    Les Indiens, comme toujours à la fin des combats, s’étaient précipités pour découper et enlever toutes les chevelures de l’ennemi, pour eux des trophées importants, le signe même de leur bravoure qu’ils rapportaient traditionnellement après les batailles pour orner l’entrée de leurs habitations. Le chevalier de Lévis essaya vainement de faire cesser cette pratique.

    La bataille de Sainte Foy se soldait par une incontestable victoire française. Le chevalier de Lévis, les compagnies régulières françaises avec les Canadiens et les Amérindiens avaient relevé tous ensemble l’honneur de la Nouvelle France. Mais le moment n’était pas venu de se réjouir car les Anglais n’étaient pas encore à terre !...

    Course de vitesse

    Immédiatement, le soir même du 28 avril, Lévis fit commencer les travaux autour des remparts en vue du siège de Québec, sous la direction de M. de Pontleroy, ingénieur en chef, et de Montheillard, commandant de l’artillerie. Le chevalier espérait, en voyant le mois de mai arriver, que les glaces du fleuve allaient à nouveau laisser passer les vaisseaux et il comptait sur l’arrivée de la flotte française, persuadé que le Roi ne les abandonnerait pas et leur enverrait tous les secours nécessaires.

    Murray de son côté ne resta pas inactif, il fortifia de son mieux la défense, d’autant plus qu’il possédait un matériel important qui lui permettait de résister convenablement. Il avait déjà mis au point une tactique, celle d’atermoyer. Il voulait laisser passer un peu de temps parce que lui aussi voyait se profiler ce mois de mai et comptait sur l’arrivée de la flotte anglaise pour le secourir.

    Chaque camp scruta alors le Saint-Laurent avec inquiétude... Les premiers navires dont on apercevrait la proue fendant les eaux du fleuve détermineraient effectivement le vainqueur ! Il fallut attendre jusqu’au 9 mai.

    Tous les regards se tournèrent vers le fleuve au moment où l’étrave d’une première frégate se présenta, ce vaisseau remontait lentement le Saint Laurent, le pavillon anglais flottait au vent ! C’était bien en effet une frégate anglaise, la Lowestoffe de 28 canons, puis très rapidement elle fut suivie de deux autres vaisseaux, le Vanguard de 70 canons et le Diana de 32 canons. Cette flotte était commandée par Lord Colvill.

    Les Français avaient donc attendu en vain les secours... Ceux-ci avaient bien été envoyés de France, mais ils étaient, malheureusement, restés bloqués dans la baie des Chaleurs, à l'embouchure du Saint-Laurent, en Gaspésie. Le sort en était-il donc jeté, pour eux et la Nouvelle France ? Pas encore ! La Nouvelle-France n’était pas totalement tombée puisque « les Anglais n’en avaient que les murs ».

    Le chevalier de Lévis, les Franco-Canadiens et les Amérindiens avaient fait le maximum à Sainte-Foy en obligeant les troupes anglaises de James Murray à s’enfermer dans la ville de Québec. Pour l’heure, il n’y avait plus rien à tenter, aussi Lévis s’employa-t-il à faire lever le siège rapidement, craignant avec raison, qu’ils ne soient coupés dans leur retraite.

    Les Français triomphent à l'issue de la bataille de Sainte-Foy, 28 avril 1760 (aquarelle)
    Uchronie : refaisons l'Histoire !

    Certes si, à l’inverse de la réalité, des vaisseaux français étaient arrivés en premier devant Québec, la ville eut immédiatement rendue aux Français. Cela aurait-il changé le sort de la Nouvelle-France ? Ce n'est pas sûr !

    À la signature du traité de Paris qui mit fin à la guerre de Sept Ans, trois ans plus tard, en 1763, peut-être le roi Louis XV aurait-il malgré tout sacrifié les « arpents de neige » du Canada pour conserver plus sûrement ses riches îles à sucre des Antilles, particulièrement Saint-Domingue...

    Lendemain de victoire

    Après Québec, les Anglais, avec leurs renforts, attaquèrent Montréal, dont la capitulation eut lieu le 8 septembre 1760. Ils refusèrent aux Français les honneurs de la guerre d’une manière des plus inciviles si bien que Lévis, dans la nuit précédant la reddition, choisit de brûler les drapeaux des régiments français plutôt que de les voir tomber entre les mains anglaises. De même, il refusa de rencontrer le général Amherst et d’échanger avec lui les politesses d’usage, laissant les autres officiers s’en charger. Lui-même s’embarqua le 18 octobre et arriva à La Rochelle le 27 novembre.

    Il avait proposé de continuer la lutte sur l’Ile Sainte-Hélène, face à Montréal, bien que sachant que la résistance ne pourrait durer très longtemps, afin de simplement sauver l’honneur des armes françaises. Le gouverneur Pierre Rigaud de Vaudreuil vint à bout de sa ténacité.

    La France avait bien envoyé des secours ! Cinq vaisseaux marchands étaient partis de Bordeaux, escortés par la frégate Le Machault de 26 canons, transportant deux mille tonneaux de vivres et de munitions. L’expédition joua de malchance peu après s’être éloignée des côtes françaises : deux vaisseaux marchands furent arraisonnés par des navires anglais, L’Aurore et le Soleil, puis deux semaines plus tard le Fidélité fit naufrage. Sur les six, trois seulement, le Machaut, le Marquis de Malauze et le Bienveillant, tous chargés de soldats, de vivres et de tout ce dont manquait terriblement la Nouvelle-France, y compris des vêtements et des chaussures, parvinrent dans le golfe du Saint-Laurent.

    Avertis que les Anglais étaient déjà parvenus à Québec, ils se réfugièrent dans la baie des Chaleurs, puis, lorsque les bateaux anglais les pourchassèrent, essayèrent de s’abriter dans la rivière Ristigouche. Voyant que la situation était sans issue, le commandant François Chenard de La Giraudais fit couler son navire afin que la cargaison ne puisse tomber aux mains du commodore Byron, mais il avait eu le temps de donner toute la nourriture aux Acadiens et aux Micmacs cachés dans les bois, qui tous mouraient de faim depuis le « Grand dérangement » qu’ils venaient de subir.

    Épilogue : chevalier puis duc et maréchal

    Statue du chevalier de Lévis, à QuébecLe général James Murray est devenu le premier gouverneur anglais de la province de Quebec.

    Quant à son infortuné vainqueur, le chevalier de Lévis, il a poursuivi en Europe une brillante carrière au service de la monarchie. Devenu gouverneur d'Arras en 1780 et élevé à la dignité de maréchal de France, avec le titre de duc et de non plus seulement de chevalier, il est mort en 1787.

    Sa statue orne la façade de l’Assemblée nationale à Québec. À ses pieds, on voit son épée brisée et les drapeaux brûlés. L’œuvre de Philippe Hébert, qui date de 1896, rend hommage à cet homme déterminé, irréductible et valeureux, qui ne plia jamais devant l’ennemi de la Nouvelle France.

    Cette phrase du chevalier de Lévis résonne à jamais sur le sol de la Nouvelle-France : « Nos espoirs sont élevés. Notre foi dans les gens est grande. Notre courage est fort. Et nos rêves pour ce magnifique pays ne mourront jamais ».

    L'église de Sainte-Foy, ravagée par une explosion de poudre pendant la bataille, est le lieu tous les ans, le 28 avril, d'une cérémonie commémorative. Y sont présentés les drapeaux des régiments

    Fin

     

     

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